« Fourre-tout sans grande cohérence », « affichage politique », « annonces qui dénient le travail effectué depuis des année... » Défense des enfants international (DEI) -France (1) ne mâche pas ses mots pour critiquer le projet de loi sur l'accueil et la protection de l'enfance présenté le 12 septembre par le ministre délégué à la famille (2).
Christian Jacob n'a pas mis en chantier le « véritable projet éducatif » que l'association réclame de ses vœux pour « sortir de l'urgence, de l'action fractionnée et des mesures dictées par l'émotion ». De plus, DEI-France désapprouve la nature même de ses propositions, jugeant la création d'un Observatoire national sur l'enfance maltraitée comme le « type même de la fausse bonne suggestion ». Tout d'abord parce qu'elle reviendrait à réunir au sein d'un même organisme deux fonctions bien distinctes, l'aide téléphonique et la démarche scientifique. Le danger de cette fusion des genres, précise DEI-France, avait déjà été souligné lors de la création du Service national d'accueil téléphonique pour l'enfance maltraitée. Mais surtout parce qu'un champ d'investigation limité à la maltraitance « est trop restrictif et traduit une méconnaissance du sujet », souligne-t-elle, rappelant que Pierre Naves, inspecteur général des affaires sociales, avait également formulé cette réserve dans son rapport remis en juin (3). Ses recommandations ne sont d'ailleurs pas évoquées dans le projet de loi.
« L'enfance maltraitée n'est qu'un sous-ensemble de l'enfance en danger », insiste DEI-France. « Le gouvernement s'apprête à refaire la même erreur que celle déjà commise avec la loi du 10 juillet 1989 [relative à la prévention des mauvais traitements à l'égard de mineurs et à la protection de l'enfance] qui multiplie les frontières et les compétences, et sans jamais définir le terme de “maltraitance”. » L'organisation aurait préféré la création d'un « observatoire national de l'enfance en danger », voire, plus largement, d'un « observatoire des questions éducatives et familiales ».
Sceptique, DEI-France l'est également sur la possibilité donnée aux associations de se constituer partie civile. « Comment imaginer qu'une association puisse se constituer partie civile contre l'avis d'un enfant et celui de ceux (par exemple son administrateur ad hoc désigné) qui ont pour mission de veiller à la défense de ses intérêts ? », s'interroge-t-elle. Pour mieux faire entendre la parole des enfants dans l'intervention judiciaire, mieux vaudrait, selon elle, envisager d'autres mesures. Par exemple, obliger le parquet à leur expliquer les décisions prises. Ou encore demander systématiquement aux services sociaux et médico-sociaux de prolonger le soutien et l'accompagnement de l'enfant et de sa famille au-delà du signalement effectué auprès de l'autorité administrative et judiciaire.
(1) DEI-France : 21, rue Hoche - 93500 Pantin - Tél. 06 85 84 94 54.
(2) Voir ASH n° 2324 du 12-09-03.
(3) Voir ASH n° 2316 du 20-06-03.