Faire de la prise en charge médico- sociale des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer et du soutien à leur famille une véritable priorité de santé publique :tel est l'objectif que s'est fixé France Alzheimer (1). L'union compte le décliner par une campagne d'information grand public durant la semaine précédant la Xe journée mondiale Alzheimer, le 21 septembre.
L'ampleur des besoins ne fait pas de doute. La récente actualisation de l'étude épidémiologique Paquid (Personnes âgées quid), menée par l'Inserm en Aquitaine depuis 1988, permet d'évaluer à 750 000 le nombre de patients atteints de la maladie d'Alzheimer en France (dont 15 % de moins de 65 ans), à 150 000 les nouveaux cas par an et à 770 000 le total des démences séniles chez les plus de 75 ans (dont 80 % de maladies d'Alzheimer). Toujours selon cette étude, 40 %des déments vivent en institution et 72 % des personnes hébergées en maison de retraite sont atteintes de démence. Ce qui confirme l'urgence de la médicalisation et du renforcement de l'encadrement réclamés par les établissements pour personnes âgées...
Autre donnée importante de l'enquête : seuls 36 % des sujets déments suivent actuellement un traitement médicamenteux, ce qui donne une indication sur la faiblesse de la prise en charge médico-psycho-sociale de cette maladie neuro-dégénérative, dont on sait aussi qu'elle est souvent diagnostiquée tardivement. Pour Françoise Forette, présidente du comité scientifique de France Alzheimer, ces carences ont compté dans l'ampleur de la catastrophe sanitaire provoquée par la récente canicule. Parmi les patients hospitalisés en urgence et qui ont survécu à leur « coup de chaleur », beaucoup arrivent maintenant dans les services de gériatrie. Ils en étaient au début d'un Alzheimer non diagnostiqué, ce qui a eu pour effet de les rendre insensibles aux messages de prévention.
La canicule a également souligné les carences du système d'aide aux familles, le manque d'accueils de jour ou de vacances susceptibles de leur fournir un répit. « La prise en charge de la souffrance des familles est encore plus défaillante que les soins aux malades eux-mêmes », juge Françoise Forette. Un diagnostic que partagent évidemment les bénévoles des 102 associations locales France Alzheimer, qui insistent aussi sur la nécessité de doter les centres locaux d'information et de coordination gérontologiques (CLIC) des personnels médicaux et sociaux nécessaires. « Le plan d'action lancé par le gouvernement (2) ne se met en place que très lentement », juge Jean Doudrich, le président de l'union, qui affirme à son tour la nécessité de créer un cinquième risque de sécurité sociale pour assurer un droit à compensation de la dépendance.
Pour l'immédiat, France Alzheimer s'est intéressée à l'allocation personnalisée d'autonomie (APA). Les 500 réponses récoltées lors d'une enquête lancée auprès de ses adhérents au premier semestre 2003 font ressortir, selon Christelle Pothier, chargée de l'action sociale, une « insatisfaction générale ». C'est « mieux que rien », disent les usagers, mais les sommes reçues sont loin de couvrir le coût réel de la prise en charge d'un malade Alzheimer. Quant aux procédures d'attribution, elles manquent de transparence et restent aléatoires. Moins du tiers des personnes concernées ont ainsi fait l'objet d'une évaluation de leur état de santé par une équipe pluridisciplinaire. Pour les personnes vivant à domicile, seules 43 % des réponses indiquent que l'APA a permis des changements dans la vie des intéressés, tandis que 44 % jugent que le personnel d'aide n'est pas formé à la prise en charge spécifique de la maladie d'Alzheimer. Des données qui méritent d'autant plus réflexion que les démences séniles représentent 72 % des demandes potentielles d'APA.
(1) France Alzheimer : 21, boulevard Montmartre - 75002 Paris - Tél. 01 42 97 52 41.
(2) Voir ASH n° 2265 du 31-05-02.