« L'alternative est aujourd'hui assez claire [...]. Les centres de formation de travailleurs sociaux peuvent devenir prestataires : ils devront vendre au meilleur rapport qualité-prix les formations produites. Ils peuvent rester partenaires : ils participent au service public de la formation professionnelle. Si les termes de l'alternative sont tranchés, il est probable, néanmoins, que la réalité de demain sera plus nuancée :prestataires ou partenaires, les centres de formation au travail social seront l'un et l'autre, la place du curseur n'étant pas à ce jour fixée.
« Selon la loi sur la lutte contre les exclusions, les centres de formation au travail social « participent au service public de la formation professionnelle », ils sont agréés par l'Etat, recrutent et exercent leurs missions suivant le schéma national des formations sociales arrêté par le ministre chargé des affaires sociales. C'est dire que la formation des travailleurs sociaux relève de l'intérêt général : son financement dépend principalement d'une politique nationale, pas d'un marché concurrentiel [...]. Dans cette perspective, les centres de formation au travail social participent à l'élaboration des schémas nationaux et régionaux encadrant les formations sanitaires et sociales. Ils sont ainsi placés dans une logique de partenariat.
« S'il y a décentralisation des formations au travail social et si les conseils régionaux en deviennent les tutelles, alors le code des marchés publics s'appliquera à l'ensemble de leurs activités. Les conseils régionaux fixeront le cadre des formations (nombre de personnes formées, localisation des formations, débouchés en termes d'emploi) et mettront les différents centres de formation en concurrence sur le plan de la qualité et des coûts. Les centres seront jaugés sur leur capacité d'adaptation et seront producteurs de formations. Ils seront ainsi placés dans une logique de prestataires.
« Reste ouverte aujourd'hui la question des agréments pédagogiques. S'il paraît à peu près certain que les diplômes et certificats [...]demeureront du domaine de l'Etat, rien à ce jour n'est acquis concernant l'organisation pédagogique - et donc financière - des centres [...] : qui décidera du nombre d'étudiants par formateur ?quel sera le salaire moyen retenu par formateur ? quels rapports entre l'administratif et le pédagogique ?[...]..., toutes questions qui déterminent pour une bonne part l'organisation du travail dans les centres.
« [...] Il faut certes éviter le manichéisme : si la pure marchandisation de la formation professionnelle doit être refusée [...], il n'empêche qu'un certain assouplissement du dispositif de formation aux besoins du terrain peut être bénéfique à l'action sociale. [...]Néanmoins je ne peux que pointer les dangers qu'une décentralisation à outrance ferait courir à la formation des travailleurs sociaux : clientélisme plus que proximité, concurrence plus qu'émulation, technocratisme plus que démarche qualité, et enfin tentation de faire de la formation un organe à disposition des politiques plus qu'au service de l'intérêt général.
« Il serait sage, en fin de compte, de laisser place à une fructueuse tension entre le national et le local, entre une politique d'intérêt général, même parfois opaque, et les besoins du terrain, parfois étouffants. Car, en dernière instance, c'est au service d'une grande idée que doit s'attacher le travail social - celle d'une société qui cherche à devenir meilleure pour les plus faibles -, pas à la satisfaction des intérêts catégoriels. »
(1) Le projet de loi relatif aux transferts de compétences, qui contient ces dispositions, est actuellement examiné au Conseil d'Etat et devrait être présenté en conseil des ministres le 1er octobre et discuté au Sénat au début du même mois. Sur le sujet, voir également ASH n° 2318 du 4-07-03.
(2) Cefprossce : Place du Marché-Couvert - BP 414 - 24104 Bergerac cedex - Tél. 05 53 22 23 00 - E-mail :