Le ministère de la Justice commente les principales dispositions pénales de la loi du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, qui a renforcé la répression des formes les plus graves d'atteintes à la dignité humaine et celles des atteintes à la tranquillité ou la sécurité publiques (1). Sa circulaire revient également sur la loi du 3 février dernier aggravant les sanctions des infractions à caractère raciste, antisémite ou xénophobe (2) et dont les dispositions ont été complétées par la loi du 18 mars.
S'agissant en premier lieu de la lutte contre le proxénétisme et la prostitution, la chancellerie demande aux magistrats du ministère public « d'utiliser au mieux » les nouvelles dispositions relatives au proxénétisme par prêt de véhicule et à la peine complémentaire de confiscation de l'ensemble des biens et gel des avoirs. Etant entendu que les orientations de la circulaire du 18 décembre 2001 sur la lutte contre le proxénétisme aggravé (3) sont maintenues et doivent être amplifiées.
C'est en outre principalement au vu de « cet objectif prioritaire de lutte contre le proxénétisme » que doivent être mis en œuvre les articles de la loi sur le recours à la prostitution d'une personne vulnérable ou au racolage public. Sur ce dernier point, la circulaire invite notamment les procureurs de la République à « apprécier avec une particulière attention l'opportunité d'engager des poursuites contre des prostitués ayant fait l'objet de procédure pour racolage public ». Ce qui pourra « les conduire à mettre en œuvre une procédure alternative de rappel à la loi, d'orientation ou de régularisation lorsque les faits n'ont pas causé de troubles à l'ordre public justifiant la mise en mouvement de l'action publique ». Le ministère souligne, par ailleurs, que lorsque la personne qui se prostitue est en situation irrégulière ou est en situation régulière mais avec un permis de séjour qui peut lui être retiré, « il n'y aura que des avantages à ce que, pendant la
durée de l'enquête, elle fasse l'objet d'une procédure administrative destinée à permettre sa reconduite à la frontière, ce qui évitera ainsi des poursuites pénales ».
Enfin, il est recommandé une « application modérée de la loi pénale » à la personne qui se prostitue et racole sur la voie publique, « le plus souvent à la fois victime et auteur d'une infraction ». Et rappelé que si la personne poursuivie pour racolage public doit en principe, lorsqu'elle est condamnée à une peine d'emprisonnement, bénéficier du sursis ou du sursis avec mise à l'épreuve, « les peines alternatives de travail d'intérêt général, de jour-amende ou de suspension du permis de conduire [peuvent] par ailleurs s'avérer très opportunes ».
La circulaire en vient ensuite aux dispositions réprimant les délits d'exploitation de la mendicité. Lesquelles doivent être mises en œuvre avec « fermeté et détermination », mais réservées aux hypothèses qui révèlent une « véritable exploitation de la mendicité d'autrui ». Ce qui n'est pas le cas lorsque la femme ou les enfants d'une personne qui se livre à la mendicité tirent profit de cette activité.
En outre, en cas de mendicité avec un enfant en bas âge, le placement du mineur devra être ordonné par le magistrat du parquet dès le début de la procédure.
« Fermeté et rapidité » devront guider les magistrats du ministère public dans l'application des dispositions sanctionnant l'installation sans titre sur le terrain d'autrui, autrement dit l'occupation sans autorisation, par des gens du voyage, de terrains appartenant à des communes ou à des particuliers. Pour autant, l'application de la loi doit être « pragmatique ». Ainsi, les procédures alternatives aux poursuites - notamment la régularisation de la situation avec le départ, dans un bref délai, des personnes en infraction - doivent être privilégiées, et ce n'est qu'en cas d'échec que des poursuites pourront être engagées, explique le ministère de la Justice. Dans le même esprit, les saisies de véhicules ne devront être opérées « qu'avec l'assentiment ou sur instruction du parquet, après rapprochement préalable avec l'autorité préfectorale afin d'envisager la mise en place des mesures susceptibles de répondre aux éventuels troubles à l'ordre public pouvant en résulter ». La circulaire ajoute à ce sujet que le véhicule utilisé pour tracter une caravane « semble, sous réserve de l'interprétation à venir de la Cour de cassation, ne pas pouvoir être considéré comme un véhicule d'habitation dont la saisie serait juridiquement prohibée ».
Les dispositions légales relatives à la répression des conditions de travail ou d'hébergement contraires à la dignité de la personne, aux circonstances aggravantes de racisme ou d'homophobie, aux atteintes envers les personnes publiques ou les membres de leur famille, aux infractions commises dans les stades, ou encore aux outrages au drapeau ou à l'hymne national seront à mettre en œuvre tout aussi fermement.
De même, les violences dans les transports entraînant une incapacité temporaire de travail de moins de huit jours, justifieront « une réponse pénale systématique » ; toutefois, si des poursuites pénales ne paraissent pas s'imposer, de tels faits pourront faire l'objet d'une composition pénale (4).
Enfin, les auteurs du délit d'entrave à la libre circulation des personnes dans les parties communes d'immeubles pourront bénéficier des procédures alternatives aux poursuites ou, s'ils sont mineurs, de la procédure de réparation pénale. En cas de poursuites concernant des majeurs, en particulier dans l'hypothèse de réitération des faits, il devra être recouru à la procédure de convocation par officier ou agent de police judiciaire. La procédure de convocation par procès-verbal pourra être utilisée si un placement sous contrôle judiciaire paraît s'imposer parce que l'infraction a généré un trouble particulier à l'ordre public local.
(1) Voir ASH n° 2303 du 21-03-03.
(2) Voir ASH n° 2296 du 31-01-03.
(3) Voir ASH n° 2242 du 21-12-01.
(4) Sur cette mesure alternative aux poursuites, voir ASH n° 2226 du 31-08-01.