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L'action sociale auprès des personnes prostituées menacée

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Il y avait bien des rumeurs selon lesquelles les crédits - 6 millions d'euros pour 2003 - affectés au travail social avec les prostitués n'échapperaient pas aux restrictions. Mais, à part un ou deux responsables qui avaient obtenu l'information précise, les dirigeants associatifs s'attendaient à un gel à hauteur de 15 à 20 %. Ils étaient loin du compte : le report concerne 85 % des crédits qui sont versés aux directions départementales des affaires sanitaires et sociales pour subventionner notamment les services et établissements spécialisés qui accueillent et accompagnent les personnes prostituées ou en danger de prostitution.

La douche est froide, le mot est faible. « C'est une véritable catastrophe. C'est toute l'efficacité du travail social mené avec ce public qui est remise en cause », s'alarme Jean-Pierre Cousin, directeur du service « insertion jeunes » de l'Association nationale de réadaptation sociale (ANRS). C'est tout ce service (11 salariés) qui est menacé et par contre-coup la survie même de l'association. A l'Amicale du Nid, les six services de milieu ouvert, d'accueil et d'orientation (deux à Paris, les autres à Grenoble, Toulouse, Montpellier et Marseille), qui ont reçu l'an dernier 1 688 hommes et femmes, pourraient être en péril. Même inquiétude à l'Association nationale d'entraide féminine (ANEF) où l'on craint la fermeture du service « prévention prostitution » qui emploie sept salariés, accueille de 150 à 200 jeunes femmes par an et... refuse de 300 à 400 demandes ! « Déjà les crédits qui ont tendance à régresser nous ont obligés à diminuer les hébergements et les aides que nous apportons », se plaint Michel Gentet, directeur de l'ANEF à Paris. A Altaïr, on évoque les risques de licenciement des trois salariés qui vont dans la rue au contact des personnes, assurent l'accompagnement et le suivi social. « Nous recrutons des travailleurs sociaux spécialisés, car les problématiques sont complexes et exigent une action pérenne en profondeur. Mais cela nous impose des charges et le respect des conventions collectives. Comment travailler dans ces conditions et maintenir la qualité de nos prestations ? », s'irrite Jean- Pierre Cousin.

Le problème, c'est aussi que les difficultés de financement durent depuis des années. « En général, les crédits n'arrivent dans les services que dans les derniers mois de l'exercice. A cela s'ajoutent des difficultés spécifiques pour notre association parisienne puisque nous avons toujours une ardoise pour 1999 qui n'a pas été réglée et que la subvention de 2001 n'a été payée qu'en... avril 2002 », explique Caroline Boulot-De Potter, directrice générale de l'Amicale du Nid. « Tout le monde se désintéresse de cette ligne budgétaire qui a tendance à passer à la trappe », ajoute- t-elle. Une indifférence d'autant moins acceptable que la loi de sécurité intérieure, en renforçant la répression à l'égard des personnes prostituées, rend encore plus nécessaire l'accompagnement social et la prévention.

Cette fois néanmoins le coup est rude et plus grave que les années précédentes. Les cinq associations- Amicale du Nid, Altaïr, ANEF, ANRS, Aux captifs, la libération (1)  - ont donc adressé une lettre à Dominique Versini pour demander un rendez-vous et obtenir la levée d'un gel qui « menace d'asphyxie les services sociaux » et met en péril l'action sociale auprès des personnes prostituées ou en danger de l'être. Elles ont également obtenu un rendez-vous, le 30 juin, avec la direction des affaires sanitaires et sociales de Paris et, le 9 juillet, avec la direction générale de l'action sociale. De son côté, le président de la Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale a écrit, le 17 juin, à François Fillon, ministre des Affaires sociales, et à Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et l'égalité professionnelle.

Le plus urgent concerne bien évidemment le déblocage des crédits. Dans l'entourage de François Fillon, on se veut rassurant et l'on explique que le gel est momentané et « que les fonds pourront être libérés au fur et à mesure des nécessités ». Quoiqu'il en soit les associations voudraient obtenir le règlement du problème sur le fond afin de sortir, une fois pour toutes, de la fragilité financière liée au versement, le plus souvent annuel, des subventions. C'est ainsi qu'elles réclament, au minimum, un financement dans le cadre de conventions triennales et le respect de celles-ci par l'Etat. Et, dans l'idéal, une stabilisation du dispositif budgétaire et administratif avec le passage des associations en comité régional des organismes sociaux et médico-sociaux. Mais encore faut-il une volonté politique pour l'accompagnement social des personnes prostituées.

I. S.

Notes

(1)  C/o Aux captifs, la libération : 151, rue du Chemin- Vert - 75011 Paris - Tél. 01 49 23 89 98.

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