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DÉCENTRALISATION DU REVENU MINIMUM D'INSERTION ET CRÉATION DU REVENU MINIMUM D'ACTIVITÉ

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Donner aux départements le pilotage intégral du revenu minimum d'insertion et créer un revenu minimum d'activité complétant, pour certains allocataires, le RMI. Tels sont les objectifs du projet de loi présenté le 7 mai en conseil des ministres par François Fillon, ministre des Affaires sociales, du Travail et de la Solidarité.

Projet de loi « Après une progression rapide au tout début de la mise en place du revenu minimum d'insertion » - qui fête ses 15 ans cette année - « le taux d'accès à l'emploi et à la formation ne s'est pas amélioré de façon significative [et] seulement un allocataire sur deux bénéficie aujourd'hui du contrat d'insertion prévu par la loi », déplore le gouvernement. Selon lui, l'organisation et le fonctionnement du dispositif « ne sont pas suffisamment mobilisateurs » et le RMI « n'aboutit pas assez à l'insertion ». C'est à ce « relatif échec » que François Fillon entend s'attaquer avec le projet de loi présenté le 7 mai en conseil des ministres. Réforme qui devrait être débattue par les parlementaires dès la dernière semaine de mai et s'appliquer à compter du 1er janvier 2004.

Elaboré sans aucune concertation et d'ores et déjà très critiqué par les associations et la caisse nationale des allocations familiales (1), ce texte, « fondé sur la valorisation du travail »,   « a pour objectif de favoriser l'insertion et l'incitation au retour à l'activité des personnes les plus éloignées de l'emploi ». Pour cela, il procède, en premier lieu, à la décentralisation du revenu minimum d'insertion. Et met ainsi en œuvre la loi constitutionnelle du 28 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République (2). Le gouvernement entend renforcer « la cohérence d'un dispositif dont la gestion est aujourd'hui partagée entre l'Etat, au titre de l'allocation, et les départements, au titre de l'insertion ». Ainsi, comme l'avait annoncé Jean-Pierre Raffarin (3), c'est le conseil général qui, à l'avenir, devrait disposer du pilotage intégral du RMI, devenant le seul responsable pour décider de l'admission, veiller aux conditions de versement de l'allocation et assurer l'insertion. En outre, pour renforcer cette gestion de proximité et mobiliser davantage les départements, le projet de loi réforme l'organisation et le fonctionnement du pilotage local de l'insertion en les confiant, là aussi, au conseil général. Dans l'exposé des motifs du texte, le ministère des Affaires sociales se veut rassurant : ce « projet de réforme ne remet pas en cause l'architecture globale du revenu minimum d'insertion » qui « reste [...] une prestation de solidarité [dont le] montant et [les] conditions d'attribution sont fixés au niveau national ».

Second axe du projet gouvernemental : la création d'un revenu minimum d'activité (RMA) complétant, dans certains cas, le revenu minimum d'insertion. Il s'agit d'encourager le retour ou l'entrée dans l'emploi de personnes percevant le RMI depuis au moins 2 ans. Lié à un contrat de travail à durée déterminée de 20 heures par semaine, ouvert aux secteurs marchand et non marchand, le revenu minimum d'activité devrait assurer à son titulaire des ressources au moins égales au SMIC calculé sur la base de 20 heures hebdomadaires. Concrètement, le revenu minimum d'activité devrait être composé d'une allocation forfaitaire de RMI prévue pour une personne seule après abattement du forfait logement et d'un complément de rémunération à la charge de l'employeur. Ce dernier aurait la charge de déterminer des activités de tutorat, de suivi individualisé et de formation destinées à favoriser l'insertion professionnelle du salarié dans le cadre d'un parcours d'insertion prévu à son contrat.

L'idée d'un revenu minimum d'activité n'est pas nouvelle. Avant même que Jacques Chirac n'en fasse l'un de ses engagements de campagne, une proposition de loi (Centre et RPR) du début 2001, adoptée seulement en première lecture par les sénateurs, prévoyait la création d'un revenu minimum d'activité pour favoriser le retour à l'emploi des titulaires non seulement du revenu minimum d'insertion, mais aussi de l'allocation de solidarité spécifique, de l'allocation d'insertion, de l'allocation d'assurance veuvage et de l'allocation de parent isolé.

I - LA DÉCENTRALISATION DU RMI

Le conseil général devrait assurer, au 1er janvier 2004, le pilotage intégral du revenu minimum d'insertion, tant pour son volet prestation, que pour son volet insertion.

Selon le gouvernement, «  cette orientation s'inscrit dans un long processus de décentralisation de l'action sociale qui a confié depuis 20 ans aux départements l'aide aux personnes en difficulté. Ce savoir-faire doit être aujourd'hui fortement valorisé. Le département sera le seul responsable pour décider l'admission, veiller aux conditions de versement de l'allocation et assurer l'insertion. »

A - L'allocation de RMI

Pour l'essentiel, la réforme donne compétence au président du conseil général pour les décisions relatives à l'allocation de revenu minimum d'insertion : attribution, renouvellement, suspension... Mais les conditions générales du bénéfice du RMI (âge, résidence, ressources) ne sont pas modifiées.

1 - LA DEMANDE D'ALLOCATION

a - Les lieux de dépôt de la demande

Le demandeur peut s'adresser au centre communal ou intercommunal d'action sociale, au service départemental d'action sociale ou aux associations ou organismes à but non lucratif agréés à cet effet par le président du conseil général (et non plus par le représentant de l'Etat).

En outre, la demande de RMI pourrait aussi être déposée auprès d'une caisse d'allocations familiales ou de mutualité sociale agricole « ayant reçu l'agrément du président du conseil général ».

Lors du dépôt de sa demande, l'intéressé recevra une information complète sur les droits et obligations d'un allocataire du RMI.

b - L'instruction de la demande

L'instruction administrative du dossier reste assurée par l'organisme auprès duquel la demande a été déposée. Avec, le cas échéant, l'appui de la caisse d'allocations familiales ou la mutualité sociale agricole (en particulier pour la détermination de la base ressources).

Dans la réforme, l'organisme instructeur n'a plus nécessairement la responsabilité de l'élaboration du contrat d'insertion et de sa mise en œuvre. Cette possibilité demeure toutefois ouverte, par convention avec le conseil général .

c - La décision d'attribution

Le texte donne compétence au président du conseil général - et non plus au préfet - pour l'attribution de l'allocation.

Autres dispositions

Le projet de loi toilette les dispositions concernant l'accès au revenu minimum d'insertion (RMI) des personnes sans résidence stable et des ressortissants communautaires.

Les personnes sans résidence stable

Les personnes sans résidence stable devront élire domicile auprès d'un organisme agréé par le président du conseil général (et non plus conjointement par ce dernier et le préfet) ou, ajoute le projet de loi, auprès d'un centre communal ou intercommunal d'action sociale (CCAS ou CIAS). Celles qui circulent en France sans domicile ni résidence fixe au sens de la loi du 3 janvier 1969 (relative aux activités ambulantes et aux personnes circulant en France sans domicile ni résidence fixe), au nombre desquelles figurent les gens du voyage, bénéficient des mêmes règles, que le CCAS, le CIAS ou l'organisme soit situé ou non dans leur commune de rattachement.

Actuellement, l'octroi des prestations d'aide sociale aux personnes dont la présence sur le territoire métropolitain résulte de circonstances exceptionnelles et qui n'ont pu choisir librement leur lieu de résidence, ou les personnes pour lesquelles aucun domicile fixe ne peut être déterminé, relève d'une décision de la commission d'admission à l'aide sociale. Le projet de loi écarte cette règle pour le bénéfice du revenu minimum d'insertion.

La régularité du séjour des ressortissants communautaires

Le texte prévoit que les ressortissants de l'Union européenne et de l'Espace économique européen (4) doivent, pour bénéficier du RMI, non pas détenir un titre de séjour comme les étrangers, mais simplement remplir les conditions exigées pour bénéficier d'un « droit au séjour ».

2 - LE SERVICE DE L'ALLOCATION

Le service de l'allocation reste assuré dans chaque département par les caisses d'allocations familiales (CAF) et de mutualité sociale agricole (MSA), mais en vertu d'une convention signée avec le département. Cette convention, dont les règles générales seront déterminées par décret, fixe les conditions dans lesquelles :

 le service de l'allocation est assuré ;

 les compétences du département sont déléguées pour les décisions individuelles relatives à l'allocation, à l'exception de celles concernant à la suspension de son versement.

En l'absence de cette convention, les caisses devraient assurer le service de la prestation dans le respect des dispositions réglementaires précitées. Pendant cette période, le département devrait verser chaque mois à chacun de ces organismes un montant équivalent au douzième des sommes qu'ils ont versées au titre de l'année précédente.

3 - LE SUIVI DU DROIT À L'ALLOCATION

La réforme prévoit la compétence du président du conseil général, et non plus du préfet, pour les décisions relatives :

 au renouvellement du droit à l'allocation, non plus après avis de la commission locale d'insertion, mais au vu de la mise en œuvre du contrat d'insertion (et, le cas échéant, du nouveau contrat d'insertion)  ;

 à la suspension de l'allocation ;

 à la reprise du versement après suspension de son paiement ;

 à la fin du droit au RMI ;

 au paiement de l'allocation aux mains de tiers  ;

 à l'avance sur droits  et versement d'acomptes  ;

 à la dispense de faire valoir ses droits aux créances d'aliments et aux pensions alimentaires.

Il est également prévu que le réexamen du montant de l'allocation, qui peut être demandé par l'intéressé ou l'organisme payeur, pourra aussi l'être par le président du conseil général (et non plus le préfet).

4 - LES CONTENTIEUX

Un recours contre une décision relative à l'allocation de RMI peut être formé devant la commission départementale d'aide sociale. La composition de cette dernière devrait être modifiée : les 2 représentants du conseil départemental d'insertion n'en feront plus partie.

B - Le dispositif d'insertion

Le contrat d'insertion devrait être réformé, « afin qu'il puisse traduire l'implication effective de l'allocataire et de la collectivité : le contrat contient désormais des dispositions définissant de façon concrète le projet d'insertion ou le calendrier des démarches correspondantes », explique l'exposé des motifs.

La politique départementale et locale d'insertion devrait également être revue « pour renforcer [la] gestion de proximité et mobiliser davantage les départements [...] en mettant fin à l'enchevêtrement actuel des compétences de l'Etat et du département ». Ainsi, dans la réforme envisagée, le président du conseil général préside et désigne les membres du comité départemental d'insertion ainsi que les membres et les présidents des commissions locales d'insertion. C'est également lui qui élabore et met en œuvre le programme départemental d'insertion. Enfin, la commission locale d'insertion, qui n'a plus compétence pour approuver les contrats d'insertion, se voit confier « une mission d'animation territoriale du dispositif d'insertion par une évaluation du besoin local et par des propositions d'amélioration de l'offre d'insertion ».

1 - LE CONTRAT D'INSERTION

La philosophie du dispositif RMI n'étant pas modifiée, la réforme lie toujours le bénéfice de l'allocation à une démarche d'insertion de son bénéficiaire, formalisée dans un contrat d'insertion. Lequel tient compte de la situation personnelle du demandeur (et des membres de son foyer). Mais ce contrat, selon le projet de loi, sera établi par le président du conseil général, et non plus par la commission locale d'insertion. En outre, sa conclusion est expressément prévue dans les 3 mois de la mise en paiement de l'allocation.

Le montant du RMI

Le projet de loi prévoit que le montant du revenu minimum d'insertion est fixé, par décret,  une fois par an - contre 2 fois - en fonction de l'évolution des prix. Soulignons toutefois que, depuis 1998, le RMI n'a été revalorisé qu'une seule fois par an, au 1er janvier.

a - La conclusion du contrat

Le texte réécrit l'article L. 262-37 du code de l'action sociale et des familles pour affirmer dans des termes plus contraignants la nécessité de conclure un contrat d'insertion dans les 3 mois qui suivent la mise en paiement de l'allocation de RMI. En effet, il mentionne que, dans ce délai, chaque allocataire, ainsi que les personnes prises en compte pour la détermination du montant de cette allocation qui satisfont à une condition d'âge, « doivent » conclure un contrat d'insertion avec le département représenté par le président du conseil général. Actuellement, il est simplement indiqué que le contrat est « établi » avec la commission locale d'insertion.

A cette fin, dès la mise en paiement de l'allocation, le président du conseil général devrait désigner une personne chargée d'élaborer le contrat avec les intéressés et de coordonner la mise en œuvre de ses différents aspects économiques, sociaux, éducatifs et sanitaires. Il pourrait aussi, par voie de convention, confier cette mission à une collectivité territoriale ou un organisme, notamment ceux pouvant recevoir la demande (centre communal ou intercommunal d'action sociale, service départemental de l'action sociale, associations ou organismes à but non lucratif, caisse d'allocations familiales et de mutualité sociale agricole). Dans tous les cas, il doit informer sans délai l'allocataire de sa décision.

b - Le contenu du contrat

Selon le projet gouvernemental, le contrat d'insertion comporte toujours des actions orientées vers l'accompagnement social et l'insertion professionnelle. Ces dernières sont toutefois réécrites afin de définir « de façon concrète le projet d'insertion ».

Ainsi, il est prévu que le contrat soit établi au vu des éléments utiles à l'appréciation de la situation professionnelle, sociale, financière et de santé de l'allocataire (et des personnes prises en compte pour la détermination du montant du RMI sous condition d'âge), ainsi que de leurs conditions d'habitat. Il comporte une ou plusieurs des actions concrètes suivantes :

 une orientation vers le service public de l'emploi précédée, le cas échéant, d'un bilan d'évaluation des capacités de l'intéressé ;

 des activités ou stages destinés à acquérir ou à améliorer les compétences professionnelles ou à favoriser l'insertion en milieu du travail.

Des conventions passées entre le département et les organismes chargés de l'emploi et de la formation professionnelle devraient fixer les modalités de mise en œuvre de ces actions d'insertion professionnelle. Et déterminer, aussi, la nature des informations nominatives échangées sur la situation des bénéficiaires.

Le contrat d'insertion peut, selon le texte, également comporter des dispositions concernant :

 des prestations d'accompagnement social ou permettant aux bénéficiaires de retrouver ou de développer leur autonomie sociale ;

 des actions permettant l'accès à un logement, au relogement ou l'amélioration de l'habitat  ;

 des actions visant à faciliter l'accès aux soins, les soins de santé ne pouvant pas, en tant que tels, être l'objet du contrat d'insertion.

Dès lors que l'allocataire bénéficie d'une mesure d'accès à l'emploi ou d'une prestation comportant un accompagnement personnalisé, l'employeur ou le prestataire devrait adresser une attestation trimestrielle tenant lieu de contrat d'insertion à la personne chargée d'élaborer le contrat et de suivre sa mise en œuvre. Si cette dernière constate que le bénéficiaire ne suit pas l'action d'insertion, elle le convoque. Et si elle établit que l'action n'est pas respectée du fait de l'allocataire, le versement du RMI pourra être suspendu.

c - La révision du contrat

Si le contrat d'insertion n'est pas respecté, il sera révisé à la demande du président du conseil général, et non plus du président de la commission locale d'insertion et du préfet.

La révision pourra toujours être sollicitée par le bénéficiaire.

2 - LA POLITIQUE DÉPARTEMENTALE ET LOCALE D'INSERTION

Actuellement, le préfet et le président du conseil général conduisent ensemble la politique d'insertion du RMI, avec le concours des partenaires intéressés.

Celle-ci s'appuie, notamment, sur deux structures spécifiques : pour le niveau départemental, le comité départemental d'insertion (CDI)  ; et pour le niveau infra- départemental, la commission locale d'insertion (CLI).

La mission essentielle du comité départemental d'insertion est d'élaborer le programme départemental d'insertion (PDI), annuel, qui aborde l'ensemble des aspects et moyens d'insertion. Et celle de la commission locale d'insertion est double : élaborer un programme local d'insertion, annuel, en vue de favoriser et de coordonner le développement local d'insertion. Et approuver les contrats d'insertion.

Dans le cadre de la réforme envisagée, le président du conseil général conduit désormais seul (et non plus conjointement avec le préfet) l'action sociale et professionnelle des bénéficiaires du RMI. Il bénéficie à cette fin du concours de l'Etat, des autres collectivités territoriales et des autres personnes morales de droit public ou privé, notamment les associations, concourant à l'insertion sociale et professionnelle. En outre, la composition et les missions des instances locales sont revues.

Le RMI dans les départements d'outre-mer

Le rôle du président du conseil général est également renforcé dans les départements d'outre-mer. Selon le texte, il devrait désormais nommer, seul, le directeur de l'agence départementale d'insertion qui n'est plus l'ordonnateur des recettes et des dépenses. Il lui reviendrait aussi, notamment, d'agréer les organismes sans but lucratif pouvant recevoir une demande d'allocation. Et de décider de la suspension du versement de l'allocation.

L'instruction des demandes d'allocation devrait dorénavant être effectuée pour le compte du conseil général, et non plus de l'Etat.

Signalons aussi que les règles de participation financière de l'Etat au dispositif sont modifiées.

a - Le conseil départemental d'insertion

Le texte prévoit que le conseil départemental d'insertion, composé notamment de représentants des services de l'Etat, des collectivités territoriales et des organismes concourant à l'insertion sociale et professionnelle, est placé auprès du président du conseil général. Lequel en assure la présidence et arrête la liste de ses membres.

Ce conseil va être chargé, non plus d'élaborer et d'adopter le programme départemental d'insertion, mais seulement d'émettre un avis sur celui-ci.

Le conseil départemental d'insertion n'examinera plus le programme local d'insertion, dont tout ou partie de la mise en œuvre pourrait être déléguée par le conseil général à des communes ou à des établissements publics de coopération intercommunale, selon des modalités fixées par convention.

b - La commission locale d'insertion

Il devrait revenir au président du conseil général seul (et non plus conjointement avec le préfet) d'arrêter la liste des membres de la commission locale d'insertion, désignés le cas échéant par la collectivité ou la personne morale qu'ils représentent. Et d'en choisir le président.

Le président du conseil général devrait aussi, seul, fixer le nombre et le ressort territorial des commissions locales d'insertion, toujours après consultation des maires des communes chefs-lieux de canton, et après avis du conseil départemental d'insertion.

La commission locale d'insertion se voit ôter sa compétence en matière d'approbation des contrats d'insertion , qui relèvera du conseil général. Elle devrait proposer les « mesures propres à favoriser ou à conforter l'insertion » .

Quant à ses propositions en matière d'élaboration du programme départemental d'insertion, elle les adressera au président du conseil général.

La commission va également perdre sa compétence en matière d'élaboration du programme local d'insertion pour se borner à « proposer au conseil général » un tel programme.

Pour finir, le texte prévoit que la commission locale d'insertion sera chargée de donner un avis sur les suspensions du versement de l'allocation envisagées par le président du conseil général en cas, du fait de l'intéressé :

 de non-conclusion du contrat d'insertion dans les 3 mois du versement de l'allocation ;

 du non-renouvellement de celui-ci ou de la non-conclusion d'un nouveau contrat ;

 ou encore en cas de non-respect du contrat.

Mais la commission n'aura plus à donner son avis sur la reprise du paiement de l'allocation après suspension du versement .

c - Le programme départemental d'insertion

Il reviendra, avant le 31 mars de chaque année, au conseil général d'adopter le programme départemental d'insertion.

3 - LE FINANCEMENT

En contrepartie du « pilotage du revenu minimum d'insertion » intégral par les départements, le texte prévoit que le financement de l'allocation de RMI ne sera plus à la charge de l'Etat. Et que les charges financières résultant, pour les départements, des transferts et création de compétences réalisés par la réforme seront compensées par l'attribution de ressources équivalentes constituées d'une partie du produit d'un impôt perçu par l'Etat dans les conditions fixées par la loi de finances.

Le projet initial prévoyait la suppression de l'obligation faite aux conseils généraux de consacrer chaque année à l'insertion un crédit d'au moins 17 % des allocations versées l'année précédente. Cette disposition - qui avait suscité la colère des associations (5)  - a disparu de la version présentée en conseil des ministres.

II - LA CRÉATION D'UN REVENU MINIMUM D'ACTIVITÉ

Pour faciliter l'insertion sociale et professionnelle des titulaires du revenu minimum d'insertion rencontrant des difficultés particulières d'accès à l'emploi, le projet de loi complète le RMI par un revenu minimum d'activité (RMA). Et ce, par le biais d'un nouveau contrat de travail : le «  contrat insertion-revenu minimum d'activité  », dont la mise en œuvre « est conditionnée pour l'employeur par la détermination d'activités de tutorat, de suivi individualisé et de formation », explique l'exposé des motifs.

Ce nouveau contrat devrait être mis en œuvre à partir du 1er janvier 2004.

A - La conclusion d'un contrat insertion-RMA

1 - QUI POURRA CONCLURE UN CONTRAT INSERTION-RMA ?

a - Les allocataires du RMI concernés

Le projet de loi stipule simplement que le contrat insertion-revenu minimum d'activité sera réservé aux titulaires du RMI remplissant les conditions pour conclure un contrat d'insertion . Les conditions de durée d'ouverture des droits au versement du RMI requises pour bénéficier d'un contrat insertion-RMA seront déterminées par décret.

Toutefois, dans l'exposé des motifs, le gouvernement donne d'ores et déjà des précisions sur le profil des personnes concernées. Il explique ainsi que « le revenu minimum d'activité est destiné principalement aux allocataires du revenu minimum d'insertion qui ne sont ni en très grande difficulté, et pour lesquels une insertion sociale est prioritaire, ni proches du marché du travail auquel ils accèdent directement ou via l'ANPE ». C'est-à-dire ceux « qui ne peuvent accéder à l'emploi dans les conditions ordinaires du marché du travail et pour lesquels un temps d'adaptation est nécessaire ». En outre, le RMA devrait être réservé « aux allocataires du revenu minimum d'insertion le percevant depuis au moins 2 ans  ».

b - Les employeurs visés

D'après le projet de texte, pourront conclure un contrat insertion-revenu minimum d'activité avec un allocataire du RMI aussi bien des employeurs du secteur marchand que non marchand. Sont visés :

 les collectivités territoriales et leurs établissements publics administratifs ;

 les autres personnes morales de droit public, à l'exception des établissements publics à caractère industriel et commercial ;

 les personnes morales de droit privé chargées de la gestion d'un service public ;

 les organismes de droit privé à but non lucratif  ;

 les employeurs, autres que ceux sus mentionnés, dont les établissements industriels et commerciaux, publics et privés et leurs dépendances, les établissements publics à caractère industriel et commercial, les offices publics ou ministériels, les professions libérales.

En revanche, devraient être expressément exclus du bénéfice de ce contrat :

 les particuliers employeurs  ;

 les départements, les services de l'Etat et, dans les départements d'outre-mer, les agences d'insertion.

2 - QUELLES SERONT LES CONDITIONS PRÉALABLES ?

La passation d'un contrat insertion-revenu minimum d'activité devrait être subordonnée, d'une part, à la conclusion d'une convention entre le département et l'employeur et, d'autre part, à des conditions propres à l'employeur.

a - La conclusion d'une convention employeur/département

Selon le projet de loi, pour pouvoir embaucher un titulaire du RMI en contrat insertion-revenu minimum d'activité, l'employeur doit conclure avec le département une convention comportant des dispositions relatives :

 aux objectifs d'insertion professionnelle et aux modalités d'orientation professionnelle du bénéficiaire du contrat ;

 aux actions de tutorat, de suivi individualisé, d'accompagnement et de formation destinées à favoriser l'insertion professionnelle du salarié dans le cadre de son parcours d'insertion que l'employeur doit mettre en œuvre.

Le projet de loi indique que les conventions passées avec les collectivités territoriales, les personnes morales de droit public, les personnes morales de droit privé chargées de la gestion d'un service public et les organismes de droit privé à but non lucratif seront conclues dans le cadre du développement d'activités répondant à des besoins collectifs non satisfaits.

Un décret devrait venir préciser le contenu de la convention et sa durée qui ne peut excéder 18 mois.

Contrôle et suivi du RMI et du RMA

Outre la mise en place d'un dispositif de suivi, d'évaluation et de contrôle commun au revenu minimum d'insertion et au revenu minimum d'activité, piloté par le ministère chargé de l'action sociale, le projet de loi confie à l'inspection générale des affaires sociales une mission de contrôle de l'application des normes et de l'effectivité des prestations. Selon l'exposé des motifs, « l'Etat demeure [ainsi] responsable du suivi des politiques conduites en matière d'allocation et d'insertion des bénéficiaires du RMI et du RMA non seulement pour en évaluer et restituer les résultats, mais aussi pour faciliter les échanges des bonnes pratiques de terrain » .

b - Les conditions propres à l'employeur

Selon le projet de loi, pour conclure un contrat insertion-revenu minimum d'activité, l'employeur devra :

 ne pas avoir procédé à un licenciement économique dans les 6 mois précédant la date d'effet du contrat ;

 être à jour du versement de ses cotisations et contributions sociales.

En outre, l'embauche sous contrat insertion-RMA ne devra pas résulter du licenciement d'un salarié sous contrat à durée indéterminée.

3 - QUELLE SERA LA NATURE DU CONTRAT ?

Le contrat insertion-revenu minimum d'activité devrait être un contrat de travail à durée déterminée et à temps partiel, fixant les modalités du parcours d'insertion définies dans la convention conclue entre l'employeur et le département.

Par dérogation à la législation de droit commun sur le contrat à durée déterminée, le contrat insertion-RMA devrait être renouvelable au maximum 2 fois (contre une seule en principe), dans la limite de 18 mois. La durée de travail des bénéficiaires de contrats insertion-RMA devrait être de 20 heures par semaine. Et, sauf clauses contractuelles ou conventionnelles prévoyant une durée moindre, la période d'essai devrait durer 15 jours.

Le projet de loi indique que la durée du contrat, ainsi que les conditions de sa suspension et de son renouvellement seront fixées par décret. Sur ce dernier point, il précise tout de même que le renouvellement du contrat sera subordonné à celui de la convention employeur/département qui n'interviendra qu'à l'issue d'une évaluation des compétences professionnelles du salarié et de sa participation à l'activité de l'établissement.

4 - QUELLES SERONT LES CAUSES DE RUPTURE DU CONTRAT ?

D'après le texte du gouvernement, le contrat insertion-revenu minimum d'activité pourra être rompu avant son terme, à l'initiative du salarié, lorsque celui-ci justifiera d'une embauche pour une durée indéterminée ou déterminée d'au moins 6 mois, ou du suivi d'une formation conduisant à une qualification mentionnée à l'article L. 900-3 du code du travail, c'est-à-dire « une qualification correspondant aux besoins de l'économie prévisibles à court ou moyen terme ».

En outre, à la demande du salarié, le contrat insertion-RMA pourra être suspendu afin de lui permettre d'effectuer la période d'essai afférente à une offre d'emploi. En cas d'embauche à l'issue de cette période d'essai, le contrat insertion-RMA sera rompu sans préavis.

Le contrat ne pouvant se cumuler avec une autre activité professionnelle, un tel cumul devrait donner lieu à résiliation de la convention par le président du conseil général. Dans ce cas, le contrat pourrait être rompu avant son terme, sans qu'il y ait lieu à dommages et intérêts.

B - Le montant et le versement du RMA

1 - LE MONTANT

Le bénéficiaire d'un contrat insertion-revenu minimum d'activité devrait percevoir un revenu minimum d'activité au moins égal au produit du SMIC horaire par le nombre d'heures de travail effectuées, ce dernier étant fixé, dans le projet, à 20 heures par semaine. Sur la base du SMIC actuel, fixé à 6,83  € par heure, le montant du RMA s'élève à 136,60  € bruts par semaine (soit environ 594,21  € par mois selon le ministère).

Les modalités de détermination du revenu minimum d'activité et de l'aide du département à l'employeur et de leur versement devraient être fixées par décret, notamment en cas de suspension du contrat. Mais l'exposé des motifs du projet de loi explique déjà que le RMA sera composé de deux éléments :

  l'allocation de revenu minimum d'insertion prévue pour une personne seule, après abattement du forfait logement (soit 362,30  € par mois depuis le 1er juillet 2002)   (6)  ;

 et un complément à la charge de l'employeur.

Le texte est muet quant à la situation des titulaires du revenu minimum d'insertion qui, du fait de leur situation familiale (couple ou personnes à charge), perçoivent une allocation majorée qui, à elle seule, dépasserait le montant mensuel du RMA. Il pourrait en être ainsi, par exemple, pour un couple ou encore une personne isolée avec un enfant dont le montant du RMI s'élève aujourd'hui à 617,55  € par mois. Selon les informations obtenues du ministère des Affaires sociales, les intéressés devraient continuer à bénéficier de la majoration de leur allocation.

2 - LES MODALITÉS DE VERSEMENT

Le revenu minimum d'activité devrait être versé par l'employeur. Ce dernier percevrait du département, via un organisme de son choix - notamment les caisses d'allocations familiales -, une aide égale au revenu minimum d'insertion pour une personne isolée, après abattement du forfait logement. Cette aide ne devrait pas pouvoir se cumuler, pour un même poste de travail, avec une aide de l'Etat à l'emploi.

En cas d'arrêt de travail, le titulaire du contrat bénéficierait du maintien de son salaire par l'employeur, dès le premier jour d'arrêt, dans des conditions fixées par décret et pour une durée limitée à la durée du contrat. Cette règle s'appliquerait pour :

 une incapacité physique, médicalement constatée, de continuer ou de reprendre le travail, ouvrant droit aux indemnités journalières versées par la sécurité sociale ;

 un accident du travail ou une maladie professionnelle ouvrant droit aux indemnités journalières de la sécurité sociale ;

 un congé légal de maternité, de paternité ou d'adoption donnant droit aux indemnités journalières de la sécurité sociale.

Les modalités de versement du RMA, notamment en cas de suspension du contrat de travail, devraient être fixées par décret.

3 - LE RÉGIME SOCIAL ET FISCAL DU RMA

En principe, seul le complément de salaire à la charge réelle de l'employeur devrait être considéré comme une rémunération soumise à cotisations salariales et patronales dues au titre des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales.

En outre, certains employeurs devraient être exonérés de ces cotisations sociales, prises alors en charge par l'Etat. Sont concernés, selon le projet de loi :

 les collectivités territoriales et leurs établissements publics administratifs ;

 les autres personnes morales de droit public, à l'exception des établissements publics à caractère industriel et commercial ;

 les personnes morales de droit privé chargées de la gestion d'un service public ;

 les organismes de droit privé à but non lucratif.

Par ailleurs, la rémunération versée aux bénéficiaires d'un contrat insertion-RMA ne devrait pas être imposable.

C - La mobilisation des crédits départementaux d'insertion

Selon le projet gouvernemental, le département mènera, avec la participation des employeurs concernés, des collectivités territoriales et de l'Etat, des actions destinées à faciliter le retour à l'emploi des personnes en contrat insertion-revenu minimum d'activité. Dans ce cadre, afin de mettre en œuvre les actions d'insertion professionnelle prévues par la convention conclue entre l'employeur et le département, ce dernier devrait conclure une convention avec l'Etat. Elle devrait déterminer les modalités de la participation de l'Etat à la mise en œuvre, au financement, au suivi et à l'évaluation du dispositif d'insertion professionnelle des bénéficiaires du contrat insertion-RMA.

Le département devrait également pouvoir conclure des conventions avec l'Agence nationale pour l'emploi pour la mise en œuvre des contrats insertion-RMA.

Enfin, le département pourrait prendre en charge, dans des conditions fixées par décret, tout ou partie du coût afférent aux embauches effectuées sous contrat insertion-RMA. Ainsi que tout ou partie des frais engagés pour ouvrir aux intéressés le bénéfice d'une formation dispensée sur le temps de travail.

D - Le maintien des droits connexes au RMI

D'après le projet de loi, pendant la durée du contrat insertion-revenu minimum d'activité, chacun des membres du foyer et chacune des personnes à charge du titulaire conservera les droits garantis aux bénéficiaires du revenu minimum d'insertion. Sont ici visés les droits dits connexes attachés à l'allocation : la non-imposition du RMI, le dégrèvement total de la taxe d'habitation, des règles spécifiques de prise en compte des ressources pour la détermination du droit aux prestations familiales et sociales, le droit à l'allocation de logement social, l'accès à la couverture maladie universelle et, le cas échéant, la couverture accident du travail et maladies professionnelles.

Catherine Sebbah et Sandrine Vincent

Notes

(1)  Voir ASH n° 2309 du 2-05-03 et ce numéro.

(2)  Voir ASH n° 2290 du 20-12-02.

(3)  Voir ASH n° 2301 du 7-03-03.

(4)  Ressortissants de l'Union européenne, plus l'Islande, la Norvège et le Liechtenstein.

(5)  Voir ASH n° 2309 du 2-05-03.

(6)  Le forfait logement est une somme censée représenter l'avantage que procure un logement occupé à titre gratuit ou le montant des aides au logement versées par la caisse d'allocations familiales.

LES POLITIQUES SOCIALES

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