Le projet de loi relatif à la décentra- lisation du revenu minimum d'insertion (RMI) (voir ce numéro) continue de susciter de virulentes réactions. Ainsi, certains membres du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale (1), ont réitéré, à l'issue de la réunion exceptionnelle de cette instance, le 6 mai, leurs regrets que le texte présenté cette semaine en conseil des ministres « n'ait fait l'objet d'aucune concertation préalable » (2). Une procédure « d'autant plus stupéfiante que ce projet concerne un sujet sensible, complexe, dont dépendent les moyens d'existence de nombreuses personnes défavorisées ».
Sur le fond, pour l'association « La raison du plus faible » (3), c'est « l'esprit même » du dispositif qui est remis en cause. Ainsi, retirer l'approbation des contrats d'insertion à la commission locale d'insertion (CLI) pour la confier au conseil général « fait disparaître la proximité [...], l'échange entre partenaires dans l'appréciation des cas singuliers- donc une plus juste appréciation des situations - et la transparence ». L'association demande une audition, avant toute suspension de l'allocation, de la personne par la CLI, « qui fera connaître son avis sur l'opportunité d'une mesure qui peut avoir des conséquences dramatiques ». Elle réclame également la création d'une commission chargée de donner un avis sur les réclamations ou recours gracieux contre les refus d'agrément des contrats d'insertion ou contre les décisions mettant fin au versement de l'allocation. Cette instance apparaît d'autant plus utile qu' « en mettant fortement l'accent sur l'insertion dans l'emploi, ce texte accroît le risque de mettre en échec les personnes fragiles, prêtes à accepter dans leur contrat d'insertion des engagements qu'elles ne seront pas en mesure de tenir, avec pour conséquence la perte de leur seul revenu, le RMI », ajoute l'association.
Quant au revenu minimum d'activité (RMA), l'intéressement qui y est rattaché « ne fera guère que compenser les coûts entraînés par la reprise d'emploi », regrette « La raison du plus faible ». Elle craint que l'ouverture de ce nouveau contrat au secteur marchand « produise plus souvent un effet d'aubaine pour l'entreprise qu'une véritable chance d'insertion pour le salarié ». Une opinion partagée par un collectif d'associations et d'organisations syndicales- regroupant notamment AC !, Act-Up, le Collectif national pour les droits des femmes, la FSU, le mouvement national des chômeurs et précaires (4)... Dans un communiqué du 6 mai, celui-ci relève que le revenu minimum d'activité « n'améliorerait ni le revenu ni les droits des chômeurs concernés » et serait « encore moins rémunérateur que l'actuel dispositif de cumul du RMI avec un revenu d'activité pourtant déjà insuffisant ».
(1) Les associations du collectif Alerte qui en sont membres (ATD quart-monde, la FAPIL, Médecins du monde, Secours catholique, Secours populaire français, Uniopss), ainsi que Envie, l'Unccas, Jean-Baptiste de Foucauld, président de Solidarités nouvelles face au chômage, et Martin Hirsch, président d'Emmaüs France.
(2) Voir ASH n° 2309 du 2-05-03.
(3) La raison du plus faible : 11, avenue Beaucour - 75008 Paris - Tél. 01 39 53 08 38.
(4) Contact : AC ! - 42, rue d'Avron - 75020 Paris - Tél. 01 43 73 36 57.