La Commission européenne a publié les résultats d'une étude sur les coûts qu'engendrerait l'absence de politique sociale pour l'économie de l'Union européenne (UE). Ce document constitue en quelque sorte le corps de la doctrine sociale de l'Europe et s'avère un contrepoids non négligeable aux théories néo- libérales qui imprègnent actuellement nombre de politiques dans les Etats membres ou au niveau européen (1).
Plusieurs facteurs contribuent aujourd'hui à la performance des politiques sociales dans l'économie, estime l'étude. Tout d'abord, l'investissement dans des politiques actives en matière d'intégration permet d'accroître les chances de faire entrer dans la vie économique les groupes et les personnes qui, sans aide, pourraient être incapables de participer. Selon des estimations, « la sous-utilisation des ressources humaines disponibles dans l'UE et les coûts plus généraux des pertes pour l'économie (y compris en termes de mauvaise santé, de criminalité et de coûts connexes) pourraient être compris entre 1 000 et 2 000 milliards d'euros par an (12 à 20 % du produit intérieur brut) ». Ensuite, l'investissement dans des normes élevées, y compris en matière de santé et de sécurité sur le lieu de travail, augmente la productivité et réduit les pertes accidentelles. « Le coût des mauvaises conditions de travail ou des situations dangereuses pour l'économie européenne est estimé à quelque 3 % du produit intérieur brut par an et environ 500 millions de journées de travail perdues. » Enfin, l 'investissement dans l'éducation et la formation accroît directement la productivité et réduit les échecs sociaux. Il permet également d'améliorer l'adaptation des personnes aux emplois proposés sur le marché du travail et de réduire les disparités salariales.
La Commission européenne entend aussi réagir aux comparaisons « classiques et simplistes entre le modèle social des Etats-Unis et celui de l'Union européenne, dont l'un serait considéré comme peu onéreux et l'autre très coûteux ». Des comparaisons « erronées » : les dépenses en matière de santé, d'éducation, de protection sociale et d'autres besoins sociaux sont relativement analogues dans l'ensemble des pays développés, de l'ordre de 30 % du produit intérieur brut. La grande différence entre l'Union européenne et les Etats-Unis ne réside pas dans le niveau des dépenses sociales mais dans la prise en charge collective - au travers de la fiscalité et des assurances publiques - et non individuelle - au moyen de dépenses et d'assurances privées, après impôts. La répartition des « prestations de nos systèmes sociaux d'une manière plus équitable entre nos populations se traduit par moins de problèmes sociaux », conclut l'étude.
(1) L'étude complète est publiée en anglais « Costs of non-social policy: towards an economic framework of quality social policies - and the costs of not having them » - D. Fouarge, rapport à la DG Emploi. Elle est téléchargeable sur Internet : europa.eu.int/comm/employment_social/news/index_fr.html