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Quatre principes pour la révision de la loi de 1975

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Non-discrimination, égalité des chances, possibilité de choix, équité de la charge financière :tels sont les quatre principes retenus dans le document d'orientation, adopté - très discrètement - le 19 mars en séance plénière par le Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH), dans le cadre de son travail préparatoire à la révision de la loi de 1975. Ce texte bref reprend, à quelques amendements de forme près, les propositions formulées, le 22 janvier dernier, par le Comité d'entente des as- sociations représentatives des personnes handicapées et des parents d'enfants handicapés - dit plus simplement Comité d'entente (1). C'est donc le fruit d'un consensus intervenu entre les 58 associations qui se retrouvent dans cette instance informelle.

Comité et conseil formulent un constat préalable : ils estiment « impossible » de bâtir une loi de programmation en quelques mois. Ils envisagent donc « une loi-cadre organisant quelques grands principes ». Néanmoins, ces « engagements politiques forts » devront « se traduire rapidement en objectifs précis et en espèces sonnantes et trébuchantes, dans une loi de programmation qui devra être mise en chantier dans la foulée », précise Laurent Cocquebert, directeur général de l'Unapei (2).

Premier principe, donc, la non-discrimination. La loi de 1975 a affirmé des droits pour les handicapés qui, 28 ans après, ne sont toujours pas totalement appliqués, constatent les associations. La nouvelle loi doit donc les reprendre dans leur ensemble, mais en les assortissant d'une obligation de résultats. « Sinon, dans 30 ans, nous en serons au même point. » La non-discrimination impose notamment que l'ensemble des services offerts aux citoyens soient « accessibilisés », et pas seulement au plan architectural. Cette obligation de droit commun s'impose aussi à l'Etat comme à l'ensemble des collectivités, précise le document. Et elle englobe tous les services, ceux de la petite enfance, de l'Education nationale, du monde du travail comme les activités sportives, culturelles, de loisirs, de tourisme...

Cette accessibilité n'étant pas acquise pour l'instant et certaines personnes ayant des incapacités trop lourdes, la collectivité doit rétablir au maximum l'égalité des chances par un processus de compensation. Celui-ci peut englober, selon les cas, des interventions humaines, techniques et financières. L'aide humaine peut, pour les handicaps mentaux et psychiques, prendre la forme d'une assistance juridique. Ce qui suppose que la réforme des tutelles aboutisse et soit assortie des financements adéquats.

Le payeur ne peut être l'évaluateur

Préalable à la compensation : une évaluation des besoins de la personne, partant de ses incapacités mais aussi de ses potentialités et de ses aspirations. Le système actuel des diverses commissions départementales doit être complètement modifié, estime le conseil, et un organisme unique créé, avec des équipes pluridisciplinaires. Surtout, insiste Régis Devoldère, président de l'Unapei, l'évaluation doit être réalisée par une instance indépendante. « Il n'est pas question, comme le réclament certaines collectivités dans le cadre de la décentralisation, que “le payeur soit le décideur” ». L'aide sera ainsi définie non pas d'abord en fonction d'un cadrage financier, mais bien à partir du projet de la personne. Elle fera l'objet d'un contrat, adaptable à tout moment.

« Ne plus subir, pouvoir choisir »  : cette demande très forte des nouvelles générations fonde le troisième principe. On s'approche de la possibilité de choix si la société est accessible et les incapacités compensées, constate le conseil. Mais il faut aussi que les places offertes dans toute la gamme des établissements et services spécialisés le soient en nombre suffisant et que ces équipements - qui constituent, pour certains handicaps, souvent les plus lourds, l'une des formes de la compensation - procurent aux intéressés l'éducation et l'accompagnement correspondant à leurs besoins et à leurs attentes.

Dernière question, et non la plus fa- cile : le financement. « Le médico-social a un coût, à la société d'en définir le ni- veau », indique le conseil . Aucun doute, cependant, c'est bien à la solidarité nationale d'intervenir pour prendre en charge l'évaluation et les aides techniques et humaines d'une part, le revenu de remplacement pour les personnes qui ne peuvent pas, ou partiellement, travailler, d'autre part.

« Solidarité nationale, cela implique clairement que l'on sorte le handicap de l'aide sociale, de l'assistance à connotation caritative, pour affirmer des droits, commente Laurent Cocquebert. Nous précisons aussi par là que nous ne voulons pas que le handicap bascule dans le champ de compétence des départements, avec tous les risques de disparité de traitement que cela entraîne. » Reste que le document d'orientation ne parle pas de sécurité sociale ni de 5e risque handicap-dépendance, même si beaucoup y pensent tout haut. « C'est un texte de consensus et ces points restent en débat, indique Marie-Sophie Desaulle, présidente de l'Association des paralysés de France  (APF). En tout état de cause, si le handicap devait être géré par un organisme de protection sociale, il faudrait innover par rapport au paritarisme traditionnel et faire place aux associations, eu égard au rôle déterminant qu'elles jouent dans le secteur. »

Consensus sur la compensation

Pour l'heure, les porte-parole du Comité d'entente se félicitent -  « et ce n'est pas de la langue de bois »  - de l'avancée réalisée, au terme d'une longue maturation entre associations. « Nous avons tous mieux pris en compte la diversité des handicaps et avanc les uns vers les autres, commente Catherine Deschamps, directrice de la vie sociale à l'APF. Le consensus est désormais très fort sur la notion de compensation des incapacités, qui faisait peur à certains, car elle était au départ très liée à la revendication d'une vie autonome à domicile. Il est désormais bien entendu qu'elle doit prendre des formes très diverses et qu'elle s'applique quel que soit le lieu de vie. De même sur l'accessibilité : ce n'est pas qu'une question d'escaliers. Le concept s'est beaucoup enrichi de notre réflexion commune. »

  « Il est aussi très important que le CNCPH, qui représente la société civile, ait repris à son compte ces principes, se réjouit Marie-Sophie Desaulle. C'est de bon augure pour la réforme de la loi. » M.-J.M.

Notes

(1)  Comité d'entente : C/o Unapei - 15, rue Coysevox - 75876 Paris cedex 18 - Tél. 01 44 85 50 50.

(2)  Le CNCPH est organisé en sept commissions. La cinquième, intitulée « Choix de vie, évaluation, compensation, autonomie », qui a travaillé sur ce document d'orientation, est co-présidée par l'Unapei et par l'APF.

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