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LE TROISIÈME PLAN DE LUTTE CONTRE LES EXCLUSIONS

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Dominique Versini a présenté, le 25 mars, son plan national de renforcement de la lutte contre la précarité et l'exclusion. Un milliard d'euros y sera consacré d'ici à 2005.

Programme national 2003-2005

La secrétaire d'Etat à la lutte contre l'exclusion et la précarité a détaillé, le 25 mars, le troisième plan triennal de lutte contre l'exclusion, qu'elle avait présenté lors du conseil des ministres du 19 mars. Intitulé « plan national de renforcement de la lutte contre la précarité et l'exclusion », il porte sur la période 2003-2005.

Dominique Versini avait déjà communiqué une première mouture du programme le 22 décembre (1). Elle attendait, avant d'en faire connaître sa forme définitive, l'avis du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale  (CNLE), qui l'a rendu le 28 février (2).

Malgré la contribution de cette instance - qui comprend de nombreuses associations œuvrant dans le champ de la lutte contre l'exclusion -, la nouvelle version du programme est peu remaniée. Le plan s'est formellement enrichi de « 5 fiches supplémentaires » (consacrées à la santé des élèves, la lutte contre l'illettrisme, les programmes régionaux d'accès à la prévention et aux soins, et au sport), mais celles-ci n'abordent pas de nouveaux thèmes, à l'exception de la fonction intégrative du sport.

Au final donc, la version définitive du programme reste très proche de celle de la fin de l'année. En particulier, elle ne comporte pas - ce qui avait suscité de vives critiques de la part du collectif Alerte (3)  - de volet « emploi »  . En réalité, ce dernier n'est pas porté par Dominique Versini mais par François Fillon - comme elle l'a d'ailleurs rappelé en présentant officiellement son plan et l'explique dans nos colonnes (voir ce numéro). Le ministre des Affaires sociales, du Travail et de la Solidarité a en effet annoncé, le 18 mars, une série de mesures de soutien à l'emploi : relance du contrat initiative-emploi, fusion des contrats emploi-solidarité et emploi consolidé, création d'un revenu minimum d'activité... (4). Mesures qui devraient être reprises dans le futur plan national d'action pour l'inclusion  (PNAI II) qu'il présentera en juillet prochain à l'Union européenne.

Le programme poursuit l'objectif «  prioritaire  » de rendre effective la loi de lutte contre les exclusions de 1998. Aussi, très logiquement, prévoit-il essentiellement (mais pas seulement) des compléments, ajustements ou prolongements de dispositifs existants, issus tant de cette loi que des précédents plans de lutte contre l'exclusion. Il comprend 41 fiches, s'articule autour de cinq axes : rendre effectif l'accès aux droits et à la citoyenneté, renforcer l'accès au logement et en diversifier l'offre, améliorer les dispositifs d'accueil et d'hébergement et l'accès aux soins, et mieux répondre aux besoins des publics précaires. D'une manière générale, le programme vise à la fois à répondre à l'urgence et à organiser la lutte contre l'exclusion sur le long terme. Ainsi qu'à articuler le social, le médico-social et le sanitaire, en particulier sur les dispositifs d'accueil et d'hébergement.

L'Etat promet de mobiliser, d'ici à 2005, un milliard d'euros supplémentaire à la lutte contre les exclusions dans le cadre du programme dont les modalités d'affectation ne manquent pas d'interroger les associations (voir ce numéro). Il viendra s'ajouter aux quelque 24 milliards d'euros consacrés par l'Etat en 2003 aux publics en difficulté. Notons que les collectivités locales avaient investi, pour leur part, 13,5 milliards d'euros, en 2002, dans la lutte contre les exclusions.

I - L'ACCÈS AUX DROITS ET À LA CITOYENNETÉ

Les crédits du plan pour les mesures d'accès aux droits s'élèvent à 95 millions d'euros.

A - L'accueil des publics en difficulté

1 - UNE DÉMARCHE QUALITÉ DE L'ACCUEIL

Ainsi que le souhaitaient de nombreux organismes et instances (5), une norme qualité sera élaborée pour améliorer la qualité des services rendus aux usagers dans les lieux d'accueil administratif.

Une mesure justifiée par le fait que « le guichet est la principale source d'information. Les contacts directs avec un organisme l'emportent largement sur les autres moyens d'information indirects (téléphones, courrier)  ». Et, contrairement aux établissements sociaux et médico-sociaux et aux lieux de vie et d'accueil, ces lieux administratifs ne sont pas concernés par l'obligation de procéder à la démarche d'auto-évaluation de leur activité et de la qualité de leurs prestations prévue par la loi du 2 janvier 2002 (6), alors qu'ils reçoivent le même public en difficulté.

La norme qualité devrait être élaborée avec le concours d'un organisme labellisateur et éventuellement certificateur. Ainsi qu'avec la participation des professionnels concernés, des organismes sociaux, des associations et des usagers.

Elle devrait porter, notamment, sur l'aménagement des locaux, le respect de la discrétion, la confidentialité, la formation des agents d'accueil (éventuellement commune à plusieurs systèmes d'aide et organismes sociaux favorisant la polyvalence et un premier accueil unique) et les délégations consenties au personnel. Elle s'intégrera, précise le plan, dans une démarche globale visant la qualité de l'ensemble des services offerts par les organismes concernés.

Entre mars et juin 2003, le gouvernement s'engage à élaborer un cahier des charges, lancer un appel d'offres, choisir l'organisme labellisateur, et mettre en place un comité de pilotage présidé par une personnalité experte et auquel participeront des représentants d'associations, d'organismes sociaux, des usagers et des élus locaux.

Le cahier des charges prévoira :

 de juin à septembre 2003 : le cadrage de « la faisabilité »  ;

 de septembre 2003 à mars 2004 : l'élaboration d'un avant-projet de référentiel ;

 d'avril à octobre 2004 : une expérimentation et une enquête ;

 de novembre 2004 à février 2005 : la validation et la publication du référentiel.

2 - UN PREMIER ACCUEIL ADMINISTRATIF POLYVALENT

Les démarches d'accès aux droits pour les usagers seront simplifiées à travers, notamment, l'amélioration du premier accueil du public.

En effet, compte tenu de la multiplicité des points de contacts avec la population en matière sociale (caisses d'allocations familiales, centres communaux d'action sociale, mairies, ANPE, Assedic, caisses primaires d'assurance maladie, etc.) les usagers « pour un tiers des personnes interrogées », note le texte, « ne savent pas à quel organisme s'adresser et [sont] en permanence renvoyés d'un organisme vers un autre ».

Aussi, le plan a-t-il pour ambition :

 de simplifier les démarches d'accès aux droits pour les usagers ;

 d'améliorer la qualité du premier accueil des usagers  ;

 d'assurer une information décloisonnée des personnels en charge des différents guichets grâce à un travail en réseau et à l'accès à une information partagée.

Dans cet objectif, les organismes sociaux devront « développer les interfaces et les échanges d'informations ». De plus, les agents d'accueil devraient être formés à la polyvalence et à la prise en compte des difficultés spécifiques d'accès aux droits des personnes étrangères. Un soutien à «  la mise en réseau des agents qui, sur un territoire, ont une fonction d'accueil de proximité (salariés et bénévoles d'associations, agents des collectivités locales, représentants des différents organismes susceptibles d'accueillir des publics en difficultés, secrétaires de mairie...)  » est également prévu. Les logiciels de simulation des droits potentiels des plus démunis, utilisables par l'ensemble des agents d'accueil quel que soit l'organisme gestionnaire, seront développés.

Pour finir, le plan prévoit la mise en place d'un portail Internet des services sociaux à la disposition du public et des professionnels. Ce portail, pour sa partie destinée au public, « sera une source d'informations pratiques et de contacts avec l'ensemble des acteurs du domaine ». Premier niveau d'orientation pour la population, il permettra aux professionnels de développer un dispositif de premier accueil administratif polyvalent de ce public. Pour sa partie uniquement dévolue aux professionnels (extranet), il sera « un outil de mutualisation des bonnes pratiques concernant l'amélioration des lieux d'accueil administratif et l'élaboration d'un référentiel “qualité” ». Il sera également, pour eux, un support de formation et d'auto-évaluation.

Sont prévus en 2003  :

 un aménagement des conventions de l'Etat avec les différents organismes concernés ;

 une concertation au niveau national sous l'égide de la commission pour les simplifications administratives (COSA) entre l'ensemble des organismes sociaux concernés, en vue de l'élaboration de protocoles inter-organismes ;

 des travaux préparatoires à la mise en route du portail des services sociaux. 2004 et 2005 seront consacrés à la construction du portail Internet, ainsi qu'à la formation à l'accueil polyvalent des publics en grande précarité.

B - L'amélioration des conditions de domiciliation

Le plan prévoit d'améliorer, dès cette année, les conditions de domiciliation des personnes sans domicile fixe.

Pour mémoire, ces personnes doivent être domiciliées auprès d'organismes agréés ou de centres communaux d'action sociale  (CCAS) pour accéder aux prestations sociales et à la couverture maladie universelle, de même que pour l'établissement de la carte nationale d'identité et la réception de leur courrier. Or, le dispositif législatif et réglementaire actuel prévoit des règles d'agrément différentes selon les dispositifs :si les CCAS sont habilités de plein droit pour la couverture maladie universelle, ils doivent en revanche demander un agrément pour le revenu minimum d'insertion et il existe un vide juridique pour les domiciliations hors aide sociale...

Aussi, le plan entend-il simplifier et harmoniser les règles en matière de domiciliation pour le versement des prestations sociales. Et préciser celles en matière de refus et de fin de domiciliation et d'autorisation de réception de courrier (courriers recommandés, actes d'huissier, commandements de justice...).

Le programme prévoit également de créer une attestation unique de domiciliation, dont pourrait bénéficier l'intéressé quel que soit l'organisme domiciliaire.

Un état des lieux des régions les plus concernées (Ile- de-France, Provence-Alpes-Côte-d'Azur, Rhône-Alpes) par les difficultés de domiciliation sera établi dans la perspective d'une « amélioration du maillage territorial des structures domiciliaires ».

C - Les mesures relatives aux prestations sociales

1 - LA SIMPLIFICATION DES DÉCLARATIONS DE RESSOURCES...

Le programme se fixe pour objectif, dès cette année, de faciliter pour les personnes en difficulté leur accès aux droits en cas de passage d'un dispositif à un autre d'une part, et de lisser les effets de seuil, d'autre part.

Actuellement, l'accès à chaque prestation sous condition de ressources est régi par l'application de règles spécifiques pour la prise en compte des ressources. De ce fait, les usagers rencontrent des difficultés pour se faire ouvrir leurs droits (multiplication des pièces justificatives...) et risquent de les perdre lors du passage d'un dispositif à un autre. Pour remédier à cette situation, il est envisagé d'harmoniser les bases ressources pour l'attribution du revenu minimum d'insertion et de l'allocation de parent isolé. Ainsi que de fixer une base ressources pour le bénéfice des prestations servies par les caisses d'allocations familiales, « calée sur le revenu fiscal le plus approprié ». Un groupe de travail inter-administratif est chargé, depuis le début de l'année, de mener un travail d'expertise sur les incidences de ces mesures.

2 - …ET DES FORMULAIRES DE DEMANDE DE PRESTATIONS

Dans la droite ligne des simplifications administratives envisagées (7), les formulaires de demande de prestations seront revus pour être plus facilement compréhensibles. Et les justificatifs exigés limités à ceux « strictement nécessaires » pour l'obtention des allocations. L'objectif final est, sinon de réussir à élaborer un formulaire unique valable pour toute demande de prestation, du moins de permettre des passerelles entre les formulaires existants pour faciliter la recherche systématique des droits par les organismes gestionnaires.

Dès cette année, de nouveaux formulaires seront mis en circulation pour l'obtention du revenu minimum d'insertion (« début 2003 » ), de l'allocation aux adultes handicapés et de l'allocation compensatrice pour tierce personne ( « courant 2003  » ).

Le texte précise que les travaux de la commission d'orientation pour la simplification du langage administratif (COSLA) seront poursuivis, de même que le toilettage des pièces justificatives pour l'obtention des minima sociaux et des courriers de notification.

3 - L'AMÉLIORATION DE LA SORTIE DES DISPOSITIFS

Le plan fixe pour objectif, à l'horizon 2005, de faire cesser toute rupture de droit entre deux dispositifs.

A cette fin, et dans un souci d'anticipation des ruptures de droits, un entretien systématique trois mois avant la sortie des dispositifs de prise en charge des publics les plus fragiles (chômeurs, titulaires de l'allocation de parent isolé...) devrait être généralisé. De plus, les organismes sociaux devraient prospecter les droits des usagers, et «  inverser la logique actuelle  » qui veut que ce soit les intéressés qui demandent les allocations auxquelles ils ont droit. Les conventions liant l'Etat et les organismes sociaux seront aménagées dans ce sens, affirme le plan.

4 - LE TRAITEMENT DES DEMANDES DE MINIMA SOCIAUX, ACOMPTES ET AVANCES SUR DROITS

Le plan demande aux caisses d'allocations familiales (et de mutualité sociale agricole) de traiter en moins de 10 jours les demandes des bénéficiaires de minima sociaux. Et de développer le versement d'acomptes et d'avances de droits dès la constitution du dossier. Pour mémoire, la convention d'objectifs et de gestion de la caisse nationale des allocations familiales 2001-2004 a déjà prévu un traitement en 10 jours des dossiers de ces publics, ainsi que le « versement d'acomptes et d'avances, la priorité étant donnée à un traitement accéléré du droit aux prestations légales » (8).

A noter  : le programme prévoit également une meilleure information des services instructeurs.

D - L' harmonisation des conditions d'accès aux tarifs réduits

Le texte pose, pour cette année, l'objectif d'accorder des réductions tarifaires - pour les transports locaux, l'électricité, le téléphone (voir aussi)  - en fonction des ressources de la personne (critère privilégié) et non de son statut (titulaire du RMI, de l'API...). Actuellement, certaines réductions sont déjà accordées sur la base de ce critère, ou sur celle d'un « quotient familial » ou « quotient économique » (cantines scolaires, centres de loisirs, culture). Pour n'obtenir qu'un seul critère d'attribution des demandes de réduction tarifaire en fonction des ressources, l'attestation de type CMU complémentaire pourrait être promue comme justificatif, propose le plan.

E - Le soutien de l'expression des personnes démunies

Les expériences d'expression des personnes en situation d'exclusion seront, dès cette année, promues et généralisées « tant en amont de la prise de décision relative aux mesures les concernant que de leur suivi et de leur évaluation ».

Pour ce faire, les éléments de concertation avec les associations seront renforcés lors de l'élaboration du deuxième plan national d'action pour l'inclusion (PNAI II) (transmission de documents en temps utile, réunions de concertation, groupes de travail thématiques...). De plus, un appel à projets sur le thème de la participation des personnes démunies aux actions et projets relevant de la lutte contre les exclusions auprès de réseaux associatifs concernés doit être lancé « avec pour objectif la capitalisation de bonnes pratiques ». Ensuite, un groupe de travail, réunissant représentants des associations et usagers doit être créé pour établir un état des lieux, un repérage des bonnes pratiques existantes, des propositions tant méthodologiques qu'en matière de formation des professionnels et des bénévoles des associations. Enfin, une exigence d'expression des usagers sera incluse dans les conventions passées avec les associations et leurs différents partenaires.

L'évaluation des politiques de la lutte contre les exclusions

Dès cette année, une expertise sur la délimitation du périmètre des politiques concernées par la lutte contre les exclusions sera effectuée. Une méthodologie de présentation des objectifs, de l'identification des lignes budgétaires et d'évaluation des résultats des programmes de lutte contre les exclusions sera ainsi élaborée. Il s'agit de garantir la prise en compte de la lutte contre l'exclusion par l'ensemble des politiques sectorielles et de rendre plus lisibles les actions conduites.

Actuellement, la loi de lutte contre les exclusions du 29 juillet 1998 (9) prévoit un rapport biennal d'évaluation globale et transversale. Et celle du 2 janvier 2002, que la lutte contre les exclusions s'effectue « dans un cadre interministériel ». Par ailleurs, les fonds alloués par le budget de l'Etat à la politique de lutte contre l'exclusion font l'objet d'une programmation des crédits ministère par ministère. Pour toutes ces raisons, relève le gouvernement, « un mécanisme de suivi précis de l'effort global de l'Etat fait défaut », et la situation ne répond pas aux exigences européennes pour la présentation du nouveau plan national d'action pour l'inclusion (PNAI) 2003-2005, qui sera transmis aux instances européennes en juillet 2003.

F - Une campagne de communication

Pour mieux informer les usagers et les acteurs sur les droits fondamentaux et sensibiliser le grand public à la lutte contre l'exclusion, une campagne d'information média et hors média sera mise en œuvre au cours du « second semestre » (spots, inserts dans la presse, brochures « pédagogiques » pour les professionnels...), s'engage le gouvernement. Celle-ci était déjà inscrite dans le précédent programme de lutte contre les exclusions, mais n'avait pas été réalisée (10).

La campagne sera lancée par une journée nationale en présence de l'ensemble des acteurs concernés par la lutte contre les exclusions. Elle sera déclinée au niveau régional, sous l'égide des directions départementales et régionales des affaires sanitaires et sociales  (DDASS et DRASS), « afin de mieux faire connaître les objectifs et les outils de la campagne dans le but de favoriser leur utilisation  ».

Par ailleurs, un comité de pilotage regroupant des représentants de l'ensemble des acteurs sera institué sous la présidence du secrétariat d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion. Un second, plus restreint, sera chargé de la mise en place et du suivi de l'ensemble de la campagne.

G - Les mesures relatives à la justice

1 - L'ACCÈS AUX DROITS

Pour permettre aux personnes en situation d'exclusion de connaître leurs droits en matière de justice, le programme renforcera les lieux d'information.

Ainsi, les conseils départementaux d'accès au droit (CDAD) - chargés de construire un réseau d'accès au droit dans chaque département et qui auront à mettre l'accent sur les difficultés liées à l'exclusion -devraient couvrir le territoire national d'ici à 2005 (au 1er mars 2003, il en existait 71). Le dispositif « guichets uniques de greffe », animés par des professionnels expérimentés et destinés à faciliter les démarches des usagers au tribunal (accueil, information, saisine d'une juridiction sans avocat lorsqu'elle est possible...), sera étendu. Et le gouvernement s'engage à créer une vingtaine de maisons de la justice et du droit par an entre 2003 et 2007.

Une circulaire (à paraître) sensibilisera les présidents des tribunaux de grande instance à la priorité à donner aux projets d'action destinés aux publics les plus précarisés.

A noter  : un bilan des conseils départementaux de l'accès au droit devrait être réalisé en 2003 pour recenser et diffuser les modalités d'actions adaptées au public menacé d'exclusion.

2 - L'AIDE JURIDICTIONNELLE POUR LES FAMILLES À REVENUS MODESTES

Pour favoriser l'accès à l'aide juridictionnelle des familles à revenus modestes, un décret (dont la parution est prévue en mars-avril 2003) relèvera le correctif familial du plafond de ressources pour l'octroi de ce dispositif. Il devrait ainsi passer, pour les 2 premières personnes, de 93  € à 147  € (+ 93  € par personne supplémentaire). Ce qui se justifie, selon le secrétariat d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion, par le fait qu'il existe une inégalité de traitement entre certaines situations. En effet, les familles de 2 enfants et plus disposent de prestations familiales exclues de la base ressources pour l'admission à l'aide juridictionnelle. Alors que pour celles sans enfants ou avec un enfant de plus de 3 ans, le correctif est insuffisant pour compenser l'absence ou le faible montant des prestations familiales.

Cette mesure est déjà budgétée dans la loi de finances pour 2003 (11), et son coût est évalué, sur la durée du programme (2003-2005), à 19,8 millions d'euros.

Par ailleurs, une circulaire du ministère de la Justice, annoncée également pour mars-avril 2003, devrait inviter les bureaux d'aide juridictionnelle à ne plus prendre en compte l'hébergement gratuit dans le plafond de ressources. Cette inclusion n'est, en effet, pas explicitement prévue par la législation.

II - L'ACCÈS AU LOGEMENT ET LA DIVERSIFICATION DE L'OFFRE

700 millions d'euros d'ici à 2005 seront consacrés aux mesures « logement » du plan - que Dominique Versini avait déjà présentées aux côtés de Gilles de Robien en novembre 2002 (12)  - ainsi qu'à celles de l'hébergement (voir ci-après).

A - Les mesures générales

1 - LA CRÉATION D'UN GUICHET UNIQUE D'INFORMATIONS

Pour faciliter les démarches des locataires, le plan organise, pour une mise en place en 2003, un guichet unique d'informations sur le logement. A cette fin, le Fonds de solidarité pour le logement (FSL) fusionnera avec le Fonds eau, énergie et téléphone (une disposition législative sera soumise au Parlement cette année) (13).

Le programme prévoit également l'expérimentation d'une mission de « coordinateur-facilitateur » des agences départementales d'information sur le logement (ADIL) dans 11 départements en concertation avec l'ensemble des partenaires. Une circulaire doit en préciser les conditions de mise en œuvre.

Présentes dans 66 départements, les ADIL jouent un rôle « souvent actif au sein du groupe de pilotage du plan d'accès au logement des publics défavorisés ».

2 - L'AIDE ET LE SOUTIEN AUX ASSOCIATIONS

Prenant acte de l'investissement dans le domaine du logement de nombre d'entre elles, le texte entend faire participer les associations à toutes les étapes de la réflexion sur la décentralisation dans ce secteur. L'objectif est de consolider « des têtes de réseaux et des fédérations indispensables à la formation et à la qualification de leurs intervenants ». Cette année, le gouvernement veut engager, avec les associations, une table ronde sur la décentralisation, ainsi qu'un « tour de France du logement »  : rencontres régionales et locales avec l'ensemble des acteurs.

3 - LE RENFORCEMENT DU DROIT AU LOGEMENT

Pour rendre efficace le droit au logement, et « dans l'attente de la décentralisation », le système du numéro unique d'enregistrement (14) dans les départements sera amélioré. Le plan incite à en élargir le recueil de données en concertation avec les bailleurs, les collectivités locales et les associations.

Sachant que le gouvernement table sur la décentralisation pour améliorer la transparence des conditions d'attribution d'un logement.

Enfin, la commission de médiation pourra, notamment, se saisir elle-même des dossiers de demandeurs à qui un logement n'aurait pas été proposé au terme d'un délai anormalement long. Elle doit pouvoir aussi connaître les dossiers et les motifs de l'absence de proposition et, éventuellement, suggérer au préfet d'utiliser le contingent préfectoral.

Autant de mesures qui, selon Dominique Versini, doivent être mises en œuvre en 2003, sachant que le rôle et la compétence des commissions de médiation doivent être redéfinis par voie législative.

B - La prévention des expulsions

L'amélioration de l'accompagnement des locataires dans toutes les phases d'une procédure d'expulsion est un objectif que la secrétaire d'Etat à la lutte contre les exclusions entend réaliser dès cette année. Il s'agit d'éviter que des personnes se retrouvent expulsées du fait qu'elles n'ont pas su mobiliser les moyens à leur disposition pour se maintenir dans leur logement, se faire représenter devant la justice, ou utiliser le sursis accordé par le juge pour rétablir leur situation.

Pour ce faire, un guide doit être élaboré pour améliorer la formation des travailleurs sociaux sur les aspects sociaux et juridiques de la procédure des expulsions. L'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale sera également chargé de concevoir un outil destiné à une meilleure connaissance des expulsions et de leur mécanisme.

Par ailleurs, le ministère de la Justice devrait engager une concertation sur la possibilité de proposer un accompagnement social à l'intéressé. Il s'agirait pour ce dernier d'utiliser le délai accordé par le juge pour recouvrer ses droits, bénéficier d'un plan d'apurement, solliciter le Fonds de solidarité logement et rechercher, le cas échéant, un autre logement.

Enfin, un cahier des charges de l'enquête sociale sera élaboré en partenariat entre les ministères concernés (Equipement, Affaires sociales, Justice, Intérieur) et les conseils généraux, la caisse nationale des allocations familiales et les représentants d'associations.

C - Les mesures relatives au parc privé

Pour sécuriser les bailleurs privés et leur redonner confiance, des incitations fiscales seront instaurées en faveur de ceux qui confient leur logement en gestion à des associations agréées. De plus, le plan entend tirer un premier bilan du Loca-pass en liaison avec les acteurs concernés. Pour mémoire, ce dispositif offre aux salariés du secteur privé et aux jeunes de moins de 30 ans en recherche d'emploi la possibilité d'obtenir une avance gratuite leur permettant de financer une caution remboursable en quittant le logement ainsi qu'une avance remboursable d'un maximum de 18 mois de loyer en cas d'impayés.

Par ailleurs, et dès cette année, le plan souhaite améliorer la lisibilité des différents dispositifs d'aide aux associations qui interviennent dans la médiation locative ou dans la gestion directe d'un parc privé social (aide à la médiation locative, aide du fonds de solidarité logement). Il a également pour objectif de mieux prendre en compte les éventuels « surcoûts d'intérêt social ». C'est pourquoi sera établie une « remise à plat du dispositif d'aide ».

D - L'aide à la sédentarisation des gens du voyage

La réalisation de terrains familiaux locatifs ou d'habitat individuel pour les gens du voyage sera favorisée dès cette année, promet le plan. L'objectif : aider ces populations à se sédentariser et leur offrir, afin de leur permettre d'avoir un ancrage territorial sans renoncer à la pratique de l'habitat caravane, un habitat adapté. C'est-à-dire un habitat de transition entre l'accueil et le logement ordinaire. Celui-ci revêt plusieurs formes : terrains familiaux sans habitat en dur, habitat en individuel plus traditionnel, habitat mixte (bâti en dur et caravane), location ou accession à la propriété.

Un inventaire des expériences en cours et des points de blocage sera réalisé pour parvenir à un dispositif pérenne. De plus, un groupe de travail réunissant Etat et caisse nationale des allocations familiales est spécifiquement mandaté pour examiner les possibilités d'octroi d'une aide personnelle au logement.

E - La lutte contre l'habitat indigne et le saturnisme

Le programme d'action contre l'habitat indigne et la lutte contre le saturnisme, engagé sous l'ancien gouvernement (15), sera poursuivi et élargi à tout le territoire.

Dès cette année, une circulaire viendra rappeler la nécessité du programme d'action, affirme le plan. De plus, les collectivités territoriales et les différents partenaires négocieront, au niveau départemental, des protocoles d'accord avec des objectifs chiffrés et des moyens affichés. Ils seront adaptés aux situations locales et mis en place dans un cadre concerté avec les départements, les villes, les acteurs du logement, le mouvement HLM et les associations.

Par ailleurs, un repérage des situations insalubres doit être réalisé par les équipes (pluridisciplinaires) de maîtrise d'ouvrage d'utilité sociale  (MOUS) conduisant à solliciter, notamment, des associations à ce titre. Un programme de formation spécifique devrait être mis au point sur ce sujet. Il est également prévu le financement de travaux de sortie d'insalubrité et la solvabilisation des propriétaires impécunieux avec l'appui des partenaires financiers (secteur bancaire, commissions départementales de conciliation), et une réforme des opérations publiques de résorption de l'habitat insalubre. Puis, devrait être mise au point une labellisation pour les entreprises intervenant dans le secteur du saturnisme (diagnostic, travaux...). Enfin, des dispositions législatives seront prises pour renforcer l'efficacité des interventions publiques : meilleure protection des propriétaires occupants contre l'insalubrité, meilleure coordination des interventions entre saturnisme et insalubrité, renforcement des pouvoirs du maire en matière de péril. Des mesures qui doivent s'inscrire dans le projet de loi que doit « prochainement » proposer au Parlement le ministre de l'Equipement, des Transports, du Logement, du Tourisme et de la Mer, Gilles de Robien.

F - L'offre de logements pour les grandes familles et les personnes isolées

Le programme prévoit une politique d'accès au logement sans discrimination pour les grandes familles et les personnes isolées, pour lesquelles l'offre est notoirement insuffisante (en particulier dans certaines régions comme l'Ile-de-France).

C'est pourquoi, d'ici à 2005, la question de la taille des logements sera une des composantes à prendre en compte explicitement dans le « conventionnement global » qui liera chaque organisme bailleur social à la puissance publique. Dès cette année, de premières expérimentations seront menées.

En attendant, 3 mesures seront conduites, annonce le plan. D'abord, l'introduction de plus grands logements (à partir du T 5) et de logements convenant pour des personnes isolées dans les opérations en neuf, ou dans l'ancien, menées par les organismes HLM, dès lors que la base des données issues du numéro unique d'enregistrement en fait apparaître le besoin. Pour ce faire, les préfets devront imposer- comme cela se pratique dans certains départements (Val-de-Marne, Haute-Garonne...)  - des pourcentages significatifs de grands et petits logements dans les programmes neufs. Ensuite, il faudra « veiller à ce que les dispositifs d'aide encouragent le développement d'une offre de logements sociaux de grande taille dans le parc privé, de caractère durable, proches des équipements et services publics » pour remplir la mission d'intégration de ces familles.

Enfin, les partenariats avec des opérateurs œuvrant dans le champ du logement seront favorisés, promet Dominique Versini, et ce, depuis la proposition jusqu'au montage opérationnel et financier.

G - Les résidences sociales

Le développement des résidences sociales (résidences issues de foyers de travailleurs migrants, de foyers de jeunes travailleurs, de maisons-relais) - offre alternative à l'hébergement pour les grands exclus - sera encouragé, notamment en région parisienne. Sur ce point, les ambitions du gouvernement sont de permettre une plus large mixité d'accès aux résidences sociales, d'associer les décisions de création sur les plans départementaux d'accès au logement des publics défavorisés (PDALPD), d'accélérer le processus de réhabilitation des foyers de travailleurs migrants.

Pour remplir ces objectifs, une circulaire sur les résidences sociales doit venir recadrer leurs missions   (16). Le plan prévoit également une mobilisation des opérateurs concernés (bailleurs et associations). Enfin, en Ile-de-France, le rôle de coordination des politiques de logement social par le préfet de région sera réaffirmé.

III - LES DISPOSITIFS D'ACCUEIL ET D'HÉBERGEMENT

Outre le développement des maisons-relais, déjà engagé (voir encadré), le plan prévoit une « mise en cohérence de l'ensemble du dispositif urgence sociale », et ce, dès « le premier semestre 2003 ».

Le plan souhaite ainsi « mettre à plat l'ensemble du dispositif “urgence sociale” », « paramétrer et institutionnaliser » les niveaux de l'urgence, de la post-urgence et de l'insertion. Un cahier des charges national du numéro d'urgence pour les « 115  » doit être mis en place. Il s'agira également, dans ce cadre, de mieux articuler l'urgence sociale et l'urgence sanitaire (le « 115 » et le « 15 » ), et de mieux coordonner les acteurs de l'urgence sociale et leurs modes d'intervention. Et aussi : d'assurer un meilleur positionnement du dispositif au sein de l'ensemble de ceux de lutte contre les exclusions, d'instaurer un schéma national régionalisé d'accueil, d'hébergement et d'insertion et de définir un système d'information commun à l'urgence sociale.

Pour finir, le programme prévoit une meilleure prise en charge médico-psycho-sociale des publics et un meilleur fonctionnement pour les demandes de subventions des associations (voir encadré).

Un audit du dispositif « urgence sociale » est actuellement réalisé par l'inspection générale des affaires sociales et l'inspection générale des finances (appréciation des objectifs poursuivis, évaluation des besoins recensés, efficacité, conventionnement et financement du dispositif).

De plus, un groupe de travail national (regroupant la direction générale de l'action sociale, les directions régionales et départementales des affaires sanitaires et sociales et les associations) est institué. Il est chargé :

 de clarifier des missions de l'urgence sociale ;

 d'étudier la labellisation des différents niveaux d'urgence, de post-urgence et d'insertion ;

 et de faire la synthèse, en vue de la mise en place d'un schéma national d'accueil, d'hébergement et d'insertion, des groupes de travail régionaux. Ces derniers, créés au sein des DRASS et DDASS, travaillent à l'élaboration de schémas régionalisés.

IV - L'ACCÈS AUX SOINS

95 millions d'euros sont budgétés d'ici à 2005 pour le volet « accès aux soins » du plan.

A - Les PRAPS

1 - UNE NOUVELLE PROGRAMMATION RÉGIONALE

La deuxième génération des programmes régionaux d'accès à la prévention et aux soins (PRAPS) 2003-2006 (17) doit, selon le plan, conforter la démarche de coopération locale engagée en mettant en place un système d'information adapté pour juger de l'efficacité des actions, renforcer leur volet prévention et mieux cibler les territoires défavorisés.

Pour ce faire, outre le diagnostic nécessaire à un meilleur repérage des populations précaires et des obstacles à leur accès aux soins, le programme prévoit la poursuite du développement des ateliers santé-ville (voir ci-après). Les associations devraient être davantage impliquées, au niveau local, à la définition des objectifs et à l'évaluation pour le volet prévention. Enfin, la mobilisation et la coordination des acteurs locaux, y compris des professionnels libéraux, seront réalisées à travers les « réseaux précarité ».

2 - UNE DÉMARCHE TERRITORIALISÉE D'ACCÈS À LA PRÉVENTION ET AUX SOINS

a - Des ateliers santé-ville...

Les ateliers santé-ville (18), créés en 1999 par le comité interministériel des villes, ont été développés conjointement par la direction interministérielle des villes et la direction générale de la santé dans deux régions pilotes : Ile-de-France et Provence-Alpes-Côte-d'Azur. A la suite du bilan interministériel et des travaux menés sur ces expériences, il est apparu que la territorialisation était une « plus-value des politiques de santé publique ». De surcroît, la publication prévue en 2003 d'un guide méthodologique devrait favoriser leur développement sur l'ensemble des villes en contrat de ville.

Or, la mobilisation du niveau régional, constate le secrétariat d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion, « s'est faite inégalement et pose la problématique de la prise en compte des territoires et de la programmation des politiques de santé afin de réduire les inégalités sociales spécifiques des zones urbaines sensibles  ». Aussi, le plan prévoit-il :

 de poursuivre le développement du cadre de l'atelier santé-ville en vue d'améliorer les conditions d'accès à la prévention et aux soins des publics vulnérables socialement dans les zones urbaines sensibles  ;

 de développer les actions de prévention en leur faveur, au travers de coopérations avec les municipalités en contrat de ville et de co-productions (villes/Etat) d'objectifs de programme de santé publique.

b - …Co-pilotés au niveau départemental et local

Pour ce faire, le programme entend renforcer le co- pilotage départemental et local des ateliers santé-ville. Il prévoit aussi une coordination des différents acteurs à travers la création ou le renforcement des réseaux médico-sociaux de proximité, des établissements de santé, des centres de santé, de la santé scolaire...

Bien entendu, l'intervention se fera en fonction de l'analyse des besoins par site, après identification, au niveau local, des besoins spécifiques des publics en situation de vulnérabilité et les déterminants de l'état de santé liés aux conditions de vie (habitat, logement, emploi, éducation).

Le texte prévoit aussi de rendre effectif l'accès aux services sanitaires et sociaux de droit commun, de faire participer activement la population à toutes les phases des programmes, et une concertation avec les professionnels et les institutions intervenant dans ce domaine.

c - Calendrier

La mise en œuvre de cette mesure s'échelonnera sur 4 ans ( 2003-2006 ). Elle sera financée par les crédits du Fonds interministériel des villes (FIV), un co-financement des partenaires du contrat de ville (collectivités territoriales) et des services déconcentrés de l'Etat.

B - La prise en charge de la souffrance psychique

L'amélioration de la prise en charge de la souffrance psychique des personnes en situation précaire ou d'exclusion est un objectif que le plan entend réaliser en 3 ans ( 2003-2005 ). Actuellement, sont observées « une psychiatrisation abusive de difficultés d'origine économique ou sociale ou une absence de réponses obérant l'avenir », de même qu'une réponse inappropriée et insuffisante face à la souffrance psychique des personnes les plus démunies du fait de « la multiplicité des intervenants possibles, l'absence de structures relais et [des] réticences des secteurs psychiatriques à prendre en compte d'autres pathologies que celles traditionnellement répertoriées ».

Aussi, pour remédier à cette situation, une meilleure cohérence des interventions entre les professionnels du social et de la santé mentale sera-t-elle encouragée. De même que l'intervention de professionnels des secteurs psychiatriques dans les structures accueillant les personnes en grande difficulté. Par ailleurs, la mise en place d'un dispositif mobile psychosocial est promise pour « aller au-devant des personnes qui ne se rendent pas d'elles-mêmes dans les secteurs et qui ne savent pas exprimer leurs symptômes ». La formation des professionnels concernés devrait être adaptée : sensibilisation des travailleurs sociaux à la souffrance psychique, et des intervenants des secteurs psychiatriques aux interactions entre souffrance psychique et problèmes sociaux. De plus, une réflexion sur un nouvel outil, tel que le contrat pluriannuel de santé mentale, devrait être engagée pour articuler le social, le médico-social et le sanitaire, et pour promouvoir l'investissement des élus locaux. Ensuite, la problématique de la souffrance psychique des personnes en situation d'exclusion devrait être prise en compte dans l'élaboration des schémas régionaux d'organisation sanitaire (SROS) de troisième génération. Enfin, le code de la santé publique, pour sa partie relative aux missions du secteur de la psychiatrie, doit être réformé de manière à organiser l'association des services de psychiatrie publique (ou/et, à défaut, libérale) et des divers services d'accompagnement à la personne pour une prise en charge conjointe.

C - Les permanences d'accès aux soins de santé

Les permanences d'accès aux soins de santé  (PASS) dans les hôpitaux, destinées à assurer une prise en charge médico-sociale des plus démunis, seront renforcées d'ici à 2005, affirme le plan. Et de nouveaux dispositifs, si des besoins sont exprimés par les agences régionales de l'hospitalisation, installés.

Le concept même de PASS devrait être adapté à l'ensemble de la population concernée :personnes les plus marginalisées, milieu rural... Plus largement, le plan entend instaurer des lieux de soins adaptés, souples et sans contraintes, éventuellement mobiles. Toutes « les possibilités d'accueil et de soins de premier recours, en amont et en aval, en lien avec les associations et les autres organismes sociaux » seront mobilisées, promet le plan.

En milieu rural, des unités mobiles devront être développées, ou en l'absence de PASS, les hôpitaux locaux devraient être sensibilisés à l'accueil de personnes très isolées en situation de précarité afin qu'elles y trouvent « un lieu d'accueil, d'orientation et de soins ».

Par ailleurs, l'accès aux soins bucco-dentaires sera amélioré, promet Dominique Versini. Pour cela, le plan prévoit d'organiser l'accès des personnes les plus démunies à une consultation d'odontologie de proximité et/ou de passer une convention avec les praticiens de ville. Et, en milieu rural, des consultations mobiles de soins bucco-dentaires devraient être mises en place. Enfin, les personnes non couvertes par l'aide médicale d'Etat devraient bénéficier de prothèses « de qualité ».

Autres objectifs : la recherche de modalités d'accueil et de soins adaptées aux personnes démunies qui suivent un traitement lourd après la sortie de l'hôpital. Et la sensibilisation et la formation des personnels aux questions liées à la précarité.

D - La santé des élèves

Le plan rappelle les mesures annoncées par Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire, au conseil des ministres du 26 février pour améliorer la santé des jeunes (19).

Pour mémoire, le ministère a décidé de faire passer le nombre de visites médicales de 1 à 3. Un « plan santé » annuellement révisé, conclu entre l'Education nationale, les collectivités territoriales et les autorités sanitaires permettra d'accompagner les publics les plus fragiles dans le suivi des avis donnés à l'occasion des visites médicales. De plus, les liaisons seront améliorées entre les professionnels de la santé scolaire et ceux de la santé mentale pour une meilleure prise en charge de la souffrance psychique des enfants adolescents. Enfin, l'organisation du service de médecine scolaire devrait être confiée aux départements, afin d'assurer une liaison plus efficace avec la protection maternelle et infantile.

Autant de mesures que le gouvernement souhaite voir appliquées à la rentrée 2003, sachant qu'elles nécessiteront une adaptation des lois, à venir, sur la décentralisation et sur la santé publique.

V - LES BESOINS DES PUBLICS PRÉCAIRES

Le plan consacre 110 millions d'euros au financement des différentes actions conduites en faveur des publics précaires.

A - La lutte contre l'illettrisme

1 - LA MISE EN PLACE DE PLANS D'ACTION RÉGIONAUX

Des plans d'action régionaux de lutte contre l'illettrisme seront mis en place dès cette année, affirme Dominique Versini. Ils auront pour objectif d'assurer un meilleur repérage des personnes illettrées, une offre de formation souple, un accompagnement des personnes ainsi qu'une meilleure couverture territoriale et une meilleure coordination. La préparation des plans d'action régionaux doit être précisée par circulaire du Premier ministre et impliquera l'ensemble des services déconcentrés (emploi, action sociale, culture et communication...).

Ces plans auront pour mission d'atteindre les différents publics concernés en sensibilisant à la question de l'illettrisme les personnels - notamment ceux des plates-formes d'accueil des étrangers - qui gèrent les dispositifs en direction des personnes en difficulté. Ils devront également développer une offre coordonnée de formation en permettant :

 une plus grande souplesse d'accès aux dispositifs ;

 une meilleure couverture du territoire (en offrant une formation de proximité et des plages horaires adaptées aux contraintes des publics)  ;

 une variété d'offres de services, adaptées à la diversité des publics (demandes individuelles, jeunes en insertion, demandeurs d'emploi, salariés...)  ;

 un meilleur suivi et un accompagnement des personnes.

La lutte contre l'illettrisme nécessitera également un travail interministériel, sur la durée, s'appuyant en particulier sur le dispositif de prévention de l'illettrisme mis en place par l'Education nationale (20) (voir aussi ci-après), explique Dominique Versini. Enfin, l'aide aux têtes de réseaux associatifs œuvrant dans le champ de la lutte contre l'illettrisme sera poursuivie, promet le plan.

2 - LA PRÉVENTION DE L'ILLETTRISME DES JEUNES D'ÂGE SCOLAIRE

Le plan rappelle les mesures déjà présentées par Luc Ferry au conseil des ministres en juin dernier (21) pour « réduire rapidement le nombre d'élèves qui ne [maîtrisent] pas la lecture ».

Pour mémoire, le ministère s'est engagé, notamment, à mener une expérimentation de cours préparatoires à faibles effectifs dans les établissements les plus difficiles, à développer la lecture dans les centres de vacances et de loisirs et à mettre en application de nouveaux programmes consacrant un temps déterminé aux activités de lecture et d'écriture.

3 - LA FORMATION DES PERSONNES EN SITUATION D'ILLETTRISME

Le programme de lutte contre l'illettrisme a permis de structurer une offre de formation spécifique, souvent labellisée (ateliers de formation de base, dispositif permanent de maîtrise des savoirs de base...) accessible à toute personne en situation d'illettrisme et qui offre une pédagogie individualisée. Pour augmenter l'accès à ces formations, de nouveaux programmes devraient structurer un dispositif d'information en direction du public et des institutions d'accueil en s'appuyant sur les centres ressources illettrisme présents dans chaque région.

Ensuite, les services publics de proximité seront « outillés » pour un premier repérage de difficultés sur les savoirs de base (en lien avec l'Agence nationale de lutte contre l'illettrisme) et à l'orientation vers les réponses de proximité (le réseau des missions locales, des permanences d'accueil, d'information et d'orientation [ML-PAIO] et l'ANPE), promet le plan. Lequel prévoit aussi de développer la qualité des prestations et de faciliter l'accès aux formations par le « recours accru » aux technologies de l'information et de la communication et à la formation ouverte et à distance  (FOAD) (en lien avec le programme formations ouvertes et ressources éducatives, FORE II), en l'accompagnant par des formations des intervenants sur le sujet.

Pour finir, le programme se fixe pour objectif de structurer ou de faire émerger une offre de formation locale en direction des salariés de bas niveau de qualification (articulation avec les engagements de développement de la formation, déclinaison régionale d'accords nationaux avec des organismes paritaires collecteurs agréés ou des entreprises).

Une circulaire de lancement du programme 2003 Insertion, réinsertion, lutte contre l'illettrisme  (IRILL) doit être publiée en avril. En mai, un service téléphonique régional d'information sur l'illettrisme (offres de services, organismes de formation) - s'appuyant sur les ressources illettrisme présents dans chaque région - devrait être mis en place. Enfin, d'avril à juin 2003 une action concertée entre l'Agence nationale de lutte contre l'illettrisme, l'ANPE et la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle sera conduite sur le repérage et l'orientation, promet Dominique Versini.

B - La reprise d'activité des femmes

Cette année, après évaluation de l'aide à la reprise d'activité des femmes  (ARAF), ses conditions d'attribution seront, le cas échéant, aménagées, de même que son montant. L'objectif est double : permettre un meilleur accès à l'ARAF et utiliser l'ensemble des crédits disponibles (la sous-consommation actuelle mesurée au niveau national recouvre une grande disparité au niveau régional avec des taux variant entre 66,63 % et 22,39 %).

Pour mémoire, ce dispositif apporte un soutien financier aux femmes en difficulté prenant ou reprenant un emploi, ou encore, créant une entreprise (22). Son montant est de 305  € si les enfants sont scolarisés, et de 460  € s'ils ne le sont pas.

Les mesures du plan déjà mises en œuvre

Associations subventionnées (23) . Une circulaire du 24 décembre 2002 (J.O. du 27-12-02) (24) a donné un cadre aux relations financières entre l'Etat et les associations. Pour l'essentiel, elle prévoit un dossier commun de demande de subventions auprès de l'ensemble des administrations de l'Etat. Le dossier initial a vocation à rassembler les documents fournis par l'association, en vue de leur conservation par l'administration. Il doit permettre d'éviter de réclamer plusieurs fois les mêmes pièces ou documents, sa validité est permanente. Par ailleurs, la circulaire invite l'administration à instruire les dossiers dans des délais raisonnables.

Maisons-relais. La circulaire décrivant le dispositif des « maisons-relais », sortes de résidences sociales, est déjà parue.200 maisons devaient être créées (pour un total de 5 000 places, dont 1 000 dès cette année)   (25) . Pour mémoire, la circulaire a fixé les conditions de gestion de ces petites structures (de 10 à 25 logements) par un hôte ou un couple d'hôtes, ainsi que celles de validation du projet à l'attribution des logements et leurs modalités de financement.

C - L'accès à l'électricité et à l'eau

1 - L'INSTAURATION D'UN « TARIF SOCIAL ÉLECTRICITÉ »

Un « tarif social électricité » sera, selon le programme, instauré en 2003. Actuellement, certaines personnes démunies bénéficient d'allocations accordées dans le cadre du dispositif national d'aide aux impayés d'électricité (224 265 aides pour 49,2 millions d'euros)   (26), ou du service minimum électricité (341 146 ménages en 2001).

La loi relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité du 10 février 2000 (27) a certes instauré un droit objectif à un tarif social électricité, sous condition de ressources, attribué au regard de la composition familiale du foyer, mais elle n'est pas applicable, faute de texte d'application. Un décret doit, prochainement, pour rendre effectif ce droit :

 déterminer les bénéficiaires (ressources mensuelles au foyer par unité de consommation)  ;

 fixer une modulation de la réduction sociale tarifaire (30 %, 40 % et 50 %) en fonction de la composition familiale ;

 et déterminer les personnes du foyer conformément au mode retenu pour le calcul des ressources du foyer autorisant l'éligibilité à la couverture maladie universelle complémentaire.

2 - L'AMÉNAGEMENT DE L'ACCÈS AU SERVICE TÉLÉPHONIQUE

Le service universel des télécommunications- qui comprend une réduction tarifaire téléphonique (28) et un dispositif d'aide aux impayés (29)  - devrait, cette année, être réaménagé pour être plus attractif.

A cette fin, un décret doit intégrer dans l'assiette des dettes éligibles les communications téléphoniques des postes fixes vers les mobiles. De plus, le délai de saisine de la commission départementale d'aide pour les personnes en difficulté doit être porté de 15 à 30 jours.

Ces mesures sont prises « dans l'attente de la fusion » du fonds eau, énergie et téléphone avec le fonds solidarité logement . Par ailleurs, d'autres mesures pourront être intégrées lors de la transposition, en 2003, de la dernière directive européenne relative au service universel.

D - L'aide alimentaire des personnes en difficulté

Le plan entend intégrer, dès cette année, les actions d'insertion par l'alimentation (épiceries sociales, repas partagés...) dans une action globale de la lutte contre l'exclusion.

Pour cela, et conformément aux préconisations du conseil national de l'alimentation (30), l'action des associations mobilisées sur ce thème devrait être renforcée, notamment en ce qui concerne la formation de bénévoles. De plus, une réflexion sera menée, avec l'appui du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, sur les initiatives à engager pour arriver à une meilleure prise en compte de l'alimentation dans les politiques de lutte contre l'exclusion, a promis Dominique Versini. Enfin, l'alimentation doit également être à l'ordre du jour de la campagne d'information générale .

E - L'offre culturelle et artistique

Le texte se donne pour objectif d'encourager la participation des publics en difficulté à l'ensemble de l'offre culturelle artistique, de même que leur expression et leurs créations.

Il envisage, d'ici à 2004, plusieurs mesures pour y parvenir. Ainsi, l'utilisation des chèques d'accompagnement personnalisé (CAP), qui permettent d'acquérir des biens dans des domaines divers (alimentation, habillement...), dont les loisirs et la culture (31), devrait être développée pour accéder aux biens et aux équipements culturels. Un réseau de lutte contre l'exclusion, propre aux questions culturelles ( « actions, capitalisation des expériences et partage des résultats par une politique éditoriale » ) - y compris leur matérialisation sur un portail électronique -devrait être constitué.

Une charte sur le développement de l'action culturelle en direction des publics exclus doit être élaborée avec les têtes du réseau associatif ; ce qui permettra un premier cadre général formalisé de partenariat avec la culture. Ensuite, des indicateurs de suivi de la politique culturelle de lutte contre les exclusions seront, selon le plan, mis au point en lien avec l'Observatoire des politiques publiques en Europe du Sud  (OPPES), lié à l'université de Montpellier, et Arteca, organisme pour l'observation de la culture en Lorraine (les premiers crédits ont pu être inscrits au budget 2002).

Autres mesures envisagées :

 la poursuite de l'aide apportée aux associations sur des projets culturels pour amener les publics vers les équipements et les productions, ou encore pour les aider à développer leur propre expression ;

 le développement de la structure de concertation « culture et lutte contre les exclusions » élargie à de nouveaux membres ;

 la diffusion d'une information concernant tous les dispositifs existants pour accéder à la culture et aux loisirs (chèques d'accompagnement personnalisé, titres de paiement offerts par les différents départements ministériels- Sports, Culture et Tourisme...).

F - L'aide au départ en vacances

Le départ en vacances des personnes en difficulté sociale sera favorisé comme « élément d'un parcours d'intégration ». En effet, près de 10 millions de personnes ne partent pas en vacances sur une période de 2 ans, dont 6,5 par contrainte. Or, les vacances permettent à certaines familles de se remobiliser pour effectuer diverses démarches d'insertion qui les concernent.

Aussi, pour encourager le départ en vacances des publics en difficulté, le plan prévoit :

 de conforter l'action des associations œuvrant dans le champ du départ en vacances des personnes en situation d'exclusion ;

 de promouvoir des partenariats tri-annuels auprès des administrations concernées par l'aide financière aux associations du secteur ;

 de prendre en compte cette thématique dans la campagne de communication prévue en 2003  ;

 de saisir le CNLE et de mener des travaux sur cette question en partenariat avec les différents interlocuteurs institutionnels et associatifs.

LES POLITIQUES SOCIALES

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