« L'année 2002 a été marquée par une considérable augmentation des violences et menaces racistes, sous toutes les formes, à des niveaux jamais atteints au cours des dix dernières années », constate la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH) dans son rapport annuel, qui devait être remis le 27 mars à Jean-Pierre Raffarin. Les chiffres sont, à cet égard, éloquents. Un total de 313 violences contre les personnes et les biens a ainsi été enregistré en 2002 par le ministère de l'Intérieur, soit le niveau le plus élevé depuis 1992 et un chiffre plus que doublé par rapport à 2000.
Au premier rang des victimes : la communauté juive. La commission souligne ainsi qu'avec 193 faits recensés, les actes de violences antisémites ont été six fois plus nombreux en 2002 que l'année précédente. Cela alors même que ces dix dernières années - à l'exception de 2000 qui avait connu un pic exceptionnel au plan de l'antisémitisme - les autres formes d'actions racistes et xénophobes avaient plutôt tendance à prédominer. Constat similaire sur le plan des actes d'intimidation ou menaces : sur 992 enregistrés sur l'ensemble du territoire, 731 ont été de nature antisémite. Un niveau « sans précédent » qui, selon la CNCDH, est à rapprocher de la recrudescence du conflit proche-oriental.
Plus globalement, l'instance remarque une plus large dissémination des actes de malveillance à caractère raciste ou antisémite sur l'ensemble du territoire, alors que jusque-là ils étaient plutôt concentrés en Ile-de-France. Elle note également « l'apparition » de ce phénomène dans les établissements scolaires. Autre source d'inquiétude pointée du doigt par la commission : l'activité des tribunaux sur le front de la lutte contre le racisme et l'antisémitisme. Elle constate ainsi « qu'en dépit de la sensibilisation des parquets et de la mise en place du numéro d'appel 114, les juridictions restent insuffisamment saisies, au regard des faits recensés, même si les condamnations sont en général plus sévères ».
Pressentant des risques de tensions « dans un contexte international instable », la CNCDH souhaite que le gouvernement « mette sans tarder en place une politique forte et cohérente de lutte contre le racisme, accompagnée d'instruments efficaces de pilotage et d'évaluation ». Quelques jours avant la remise du rapport, à l'occasion de la journée mondiale de lutte contre le racisme, le 20 mars, François Fillon rappelait, de son côté, qu'il proposerait au comité interministériel sur l'intégration du 10 avril la création d'une « autorité indépendante pour l'égalité des droits ».