(Loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 et décision du Conseil constitutionnel n° 2003-467 DC du 13 mars 2003, J.O. du 19-03-03)
En adoptant définitivement les 12 et 13 février dernier la loi pour la sécurité intérieure, députés et sénateurs ont donné le feu vert à un texte emblématique de la majorité, puisqu'il répond au thème numéro un de la dernière campagne électorale. Il se sera considérablement musclé durant son parcours parlementaire et aura fait couler beaucoup d'encre, notamment en raison du nombre important de nouveaux délits qu'il institue. Ces incriminations visent essentiellement à réprimer les « nouvelles formes de délinquance », selon le gouvernement.
Première cible désignée : les réseaux mafieux. Plusieurs mesures phares de la loi ont ainsi pour point commun d'être destinées à enrayer le développement de ces filières sur le territoire français. C'est en tout cas le sens de la pénalisation de la prostitution, de la répression de l'exploitation de la mendicité ou encore de l'aggravation des sanctions des délits de conditions de travail et d'hébergement contraires à la dignité humaine. Dans la même logique, les sénateurs ont prévu l'incrimination de la « traite des êtres humains », qui vise les situations d'exploitation des personnes sous toutes les formes, et constitue l'infraction préalable à la commission ultérieure d'autres infractions comme le proxénétisme ou la mendicité organisée, par exemple.
Par ailleurs, parce que ces réseaux font parfois intervenir, à différents niveaux, des personnes de nationalité étrangère, la loi ouvre de nouveaux cas de retrait de titre de séjour. Elle offre toutefois la possibilité aux prostitués sans-papiers qui dénoncent leur proxénète d'obtenir une autorisation provisoire de séjour, voire, en cas de condamnation définitive de l'intéressé, une carte de résident. Toujours au chapitre de la prostitution, le législateur a prévu quelques mesures pour marquer sa volonté de considérer les prostitués d'abord comme des victimes.
Plus généralement, le gouvernement a également voulu sanctionner tout un ensemble de comportements, considérés désormais comme délictueux. Dans son collimateur : les attroupements dans les halls d'immeuble qui portent atteinte à la libre circulation, les gens du voyage qui s'installent illégalement sur des propriétés privées ou communales, ou encore certaines formes de mendicité.
Au menu de la loi également : une série de dispositions destinées, entre autres, à renforcer les moyens d'enquête des forces de l'ordre.
Une vingtaine d'articles, parmi les plus importants du texte, ont été critiqués et portés devant le Conseil constitutionnel par les parlementaires de l'opposition. Tous ont été jugés conformes à la Constitution. Les neuf sages ont simplement assorti leur décision de plusieurs réserves d'interprétation, précisant notamment la manière dont devraient être appliquées les mesures relatives au racolage, à la mendicité agressive, à l'occupation illicite de terrains ou encore aux nouveaux cas de retrait de carte de séjour.
La traite des êtres humains est le fait, en échange d'une rémunération ou de tout autre avantage (ou d'une promesse de rémunération ou d'un avantage), de recruter une personne, de la transporter, de la transférer, de l'héberger ou de l'accueillir, pour la mettre à la disposition d'un tiers, même non identifié, afin (code pénal [CP], art. 225-4-1 nouveau) :
soit de permettre la commission contre cette personne des infractions de proxénétisme, d'agression ou d'atteintes sexuelles, d'exploitation de la mendicité, de conditions de travail ou d'hébergement contraires à sa dignité ;
soit de contraindre cette personne à commettre tout crime ou délit.
Exemple de situation visée dans ce dernier cas : « les groupes organisés de pilleurs d'horodateurs, tous mineurs étrangers, placés sous la férule de majeurs les ayant recrutés à cet effet » (Rap. A.N. n° 508, décembre 2002, Estrosi).
La traite des êtres humains est punie de 7 ans d'emprisonnement et de 150 000 € d'amende (CP, art. 225-4-1 nouveau). Une peine aggravée selon la victime et les circonstances ayant entouré la commission du délit. Elle passe ainsi à 10 ans de prison et 1,5 million d'euros d'amende si l'infraction est commise :
à l'égard d'un mineur ;
à l'encontre d'une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur ;
à l'égard de plusieurs personnes ;
à l'égard d'une personne qui se trouvait hors du territoire de la République ou lors de son arrivée sur le territoire de la République ;
lorsque la personne a été mise en contact avec l'auteur des faits grâce à l'utilisation, pour la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé, d'un réseau de télécommunications ;
dans des circonstances qui exposent directement la personne à l'égard de laquelle l'infraction est commise à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ;
avec l'emploi de menaces, de contraintes, de violences ou de manœuvres dolosives visant l'intéressé, sa famille ou une personne étant en relation habituelle avec lui ;
par un ascendant légitime, naturel ou adoptif de la victime ou par une personne qui a autorité sur elle ou abuse de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ;
par une personne appelée à participer, par ses fonctions, à la lutte contre la traite ou au maintien de l'ordre public.
La tentative de commettre le délit de traite est punie des mêmes peines que le délit lui-même (CP, art. 225-4-7 nouveau).
Les responsables des réseaux de traite des êtres humains - ainsi que les proxénètes -peuvent encore être condamnés, à titre complémentaire, à la « confiscation de tout ou partie de leurs biens, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis » (CP, art. 225-25 nouveau).
Les peines encourues en cas de traite, de nature correctionnelle, deviennent par ailleurs criminelles lorsque les faits sont commis avec certaines circonstances aggravantes. Ainsi, l'infraction est punie de 20 ans de réclusion criminelle et de 3 millions d'euros d'amende lorsqu'elle est commise en bande organisée (CP, art. 225-4-3 nouveau). Les peines sont portées à la réclusion criminelle à perpétuité et à 4,5 millions d'euros d'amende en cas de recours à des tortures ou à des actes de barbarie (CP, art. 225-4-4 nouveau).
Par ailleurs, « lorsque le crime ou le délit qui a été commis ou qui devait être commis contre la personne victime de l'infraction de traite des êtres humains est puni d'une peine privative de liberté d'une durée supérieure à celle de l'emprisonnement encouru en application des articles 225-4-1 à 225-4-3, l'infraction de traite des êtres humains est punie des peines attachées aux crimes ou aux délits dont son auteur a eu connaissance et, si ce crime ou délit est accompagné de circonstances aggravantes, des peines attachées aux seules circonstances aggravantes dont il a eu connaissance » (CP, art. 225-4-5 nouveau). Autrement dit, si l'auteur de faits de traite des êtres humains - passibles donc d'une peine de 7 ans d'emprisonnement - commet ce délit à l'encontre d'une personne, par exemple, ultérieurement victime d'un viol, il encourra la peine attachée au crime de viol, soit 15 ans de réclusion criminelle, tout comme l'auteur du viol.
La loi prévoit que les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsable du délit de traite des êtres humains (CP, art. 225-4-6 nouveau). Elles encourent alors :
une amende qui peut représenter le quintuple du montant prévu pour les personnes physiques ;
les peines prévues par l'article 131-39 du code pénal (dissolution, interdiction d'exercer une ou plusieurs activités professionnelles, placement sous surveillance judiciaire, etc.).
L'idée est venue des sénateurs socialistes et a reçu l'assentiment du ministre de l'Intérieur. La loi prévoit désormais que des places en centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) « sont ouvertes à l'accueil des victimes de la traite des êtres humains dans des conditions sécurisantes » (code de l'action sociale et des familles, art. L. 345-1 modifié).
Reste à savoir maintenant si des crédits pourront être débloqués à cet effet dès cette année. Interpellé à ce sujet par les députés de l'opposition, Nicolas Sarkozy a promis que « des moyens seront mobilisés » (J.O.A.N. [C.R.] n° 4 du 22-01-03).
Deux ans d'emprisonnement et 75 000 € d'amende. Telle était, jusqu'à présent, la peine encourue pour avoir obtenu d'une personne, « en abusant de sa vulnérabilité ou de sa situation de dépendance », la fourniture de services non rétribués ou en échange d'une rétribution manifestement sans rapport avec l'importance du travail accompli. La même sanction était encourue par celui qui soumet une personne à des conditions de travail ou d'hébergement incompatibles avec la dignité humaine en abusant de la vulnérabilité de cette dernière ou de sa situation de dépendance.
Ainsi, pour que ces deux délits soient constitués, il fallait non seulement que la vulnérabilité (ou l'état de dépendance) de la victime soit établie, mais encore qu'il y ait un abus de celle-ci par l'auteur des faits. Soit « un ensemble de conditions difficiles à rassembler », selon le député (UMP) Christian Estrosi (Rap. A.N. n° 508, décembre 2002, Estrosi). C'est pourquoi la loi efface aujourd'hui toute référence à la notion d'abus. Il suffit désormais simplement de démontrer que l'auteur des faits avait connaissance de la vulnérabilité ou de l'état de dépendance de la victime pour que les délits soient constitués (CP, art. 225-13 et 225-14 modifiés).
La peine encourue pour les deux délits est par ailleurs aggravée et passe à 5 ans d'emprisonnement et 150 000 € d'amende.
Les mineurs victimes de l'infraction d'absence de rémunération du travail et du délit de conditions de travail ou d'hébergement contraires à la dignité humaine sont désormais considérés comme des personnes vulnérables ou en situation de dépendance (CP, art. 225-15-1 nouveau). Il en est de même pour les étrangers victimes des mêmes faits à leur arrivée sur le territoire national.
L'objectif est que ce type de délit soit mieux sanctionné car, « actuellement, la jurisprudence ne considère pas les mineurs comme vulnérables ou en situation de dépendance », a expliqué le sénateur (UMP) Jean- Patrick Courtois aux cours des débats (J.O. Sén. [C.R.] n° 57 du 15-11-02).
En outre, « les investigations de la mission sur les différentes formes d'esclavage [...] ont clairement établi que la majeure partie des victimes » de ces délits sont « étrangères et souvent en situation irrégulière », a souligné, de son côté, le sénateur (PS) Jean-Pierre Sueur (J.O. Sén. [C.R.] n° 57 du 15-11-02). Et c'est cette situation de clandestinité qui, précisément, les rend vulnérables.
A noter : lorsque ces délits sont commis contre des mineurs, le délai de prescription - 3 ans - ne commence dorénavant à courir qu'à partir de leur majorité (code de procédure pénale [CPP], art. 8 modifié).
Lorsque les délits d'absence de rémunération d'un travail et de conditions de travail et d'hébergement contraires à la dignité humaine sont commis à l'égard de plusieurs personnes, les peines encourues sont désormais de 7 ans d'emprisonnement (au lieu de 5 ans) et de 200 000 € d'amende (au lieu de 150 000 €) (CP, art. 225-15 modifié).
Deux nouvelles circonstances aggravantes font, par ailleurs, leur apparition :
lorsque les infractions sont commises à l'égard d'un mineur (7 ans d'emprisonnement et 200 000 € d'amende) ;
lorsqu'elles sont perpétrées à l'égard de plusieurs personnes parmi lesquelles figurent un ou plusieurs mineurs (10 ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende).
La loi pour la sécurité intérieure étend la compétence des inspecteurs du travail à la constatation des infractions d'absence de rémunération d'un travail et en matière de conditions de travail et d'hébergement contraires à la dignité humaine (code du travail, art. L. 611-1 modifié).
A l'Assemblée nationale comme au Sénat, les défenseurs de la loi pour la sécurité intérieure ont toujours pris soin de présenter les dispositions relatives à la lutte contre le développement de la prostitution comme des mesures visant plus les proxénètes que les prostitués eux-mêmes.
La loi Sarkozy supprime toute distinction entre racolage actif et racolage passif. Seul le premier était sanctionné auparavant et, en l'occurrence, par une simple contravention.
Désormais, « le fait, par tout moyen, y compris par une attitude même passive, de procéder publiquement au racolage d'autrui en vue de l'inciter à des relations sexuelles en échange d'une rémunération ou d'une promesse de rémunération » est puni de 2 mois d'emprisonnement et d'une amende de 3 750 € (CP, art. 225-10-1 nouveau). Le Conseil constitutionnel précise toutefois qu'il appartiendra à la juridiction compétente de prendre en compte, dans le prononcé de la peine, la circonstance que l'auteur a agi sous la menace ou par contrainte. Et ce conformément à l'article 122-2 du code pénal (inchangé), qui prévoit que « n'est pas pénalement responsable la personne qui a agi sous l'empire d'une force ou d'une contrainte à laquelle elle n'a pu résister ».
Signalons au passage que la nouvelle loi vient sanctionner également le fait « de vendre, louer ou de tenir à la disposition, de quelque manière que ce soit, d'une ou de plusieurs personnes, des véhicules de toute nature en sachant qu'elles s'y livreront à la prostitution » (10 ans d'emprisonnement et 750 000 € d'amende) (CP, art. 225-10 4° nouveau).
La question de la pénalisation des clients a longuement été débattue au cours de l'examen du texte, pour être finalement écartée. Les peines déjà infligées aux clients de prostitués mineurs - 3 ans d'emprisonnement et 45 000 € d'amende - sont toutefois étendues aux clients de prostitués présentant une particulière vulnérabilité, apparente ou connue de l'intéressé, due à une maladie, une infirmité, une déficience physique ou psychique ou un état de grossesse (CP, art.225-12-1 modifié).
Et si l'infraction est commise « de façon habituelle » ou à l'égard de plusieurs de ces personnes vulnérables, ou encore « si la personne a été mise en contact avec l'auteur des faits grâce à l'utilisation, pour la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé, d'un réseau de communication », ces peines sont portées à 5 ans d'emprisonnement et 75 000 € d'amende.
C'était, à l'origine, une des propositions d'amendements avancées par le collectif Alerte (1). Pour marquer leur volonté de considérer les prostitués d'abord comme des victimes, les parlementaires ont accepté d'intégrer dans la loi le principe selon lequel « toute personne victime de l'exploitation de la prostitution doit bénéficier d'un système de protection et d'assistance, assuré et coordonné par l'administration en collaboration active avec les divers services d'interventions sociales ».
Il est, par ailleurs, prévu qu'à partir de l'année prochaine, le gouvernement déposera chaque année sur le bureau de l'Assemblée nationale et du Sénat, à l'ouverture de la session ordinaire, un rapport faisant état de l'évolution de la situation démographique, sanitaire et sociale des personnes prostituées ainsi que des moyens dont disposent les associations et les organismes qui leur viennent en aide.
Dans la même logique que les dispositions relatives à la lutte contre le proxénétisme, pour « combattre les filières mafieuses qui tirent profit de la misère d'autrui » (Rap. A.N. n° 508, décembre 2002, Estrosi), la loi pour la sécurité intérieure crée la nouvelle incrimination d'exploitation de la mendicité, punie de 3 ans d'emprisonnement et d'une amende de 45 000 € (CP, art. 225-12-5 nouveau). Il s'agit plus précisément de sanctionner le fait :
« d'organiser la mendicité d'autrui en vue d'en tirer profit » ;
de « tirer profit de la mendicité d'autrui, d'en partager les bénéfices ou de recevoir des subsides d'une personne se livrant habituellement à la mendicité » ;
« d'embaucher, d'entraîner ou de détourner une personne en vue de la livrer à la mendicité, ou d'exercer sur elle une pression pour qu'elle mendie ou continue de le faire » ;
« d'embaucher, d'entraîner ou de détourner à des fins d'enrichissement personnel, une personne en vue de la livrer à l'exercice d'un service moyennant un don sur la voie publique ».
Cette quatrième définition, ajoutée sur proposition du député (UMP) Lionnel Luca, vise les réseaux qui obligent des personnes à se livrer à des activités professionnelles « sous prétexte de rendre service », comme « nettoyer les vitres de véhicules automobiles » (J.O.A.N. [C.R.], n° 6 du 24-01-03).
S'inspirant de ce qui existe déjà en matière de lutte contre le proxénétisme, les parlementaires ont également décidé d'assimiler à l'exploitation de la mendicité « le fait de ne pouvoir justifier de ressources correspondant à son train de vie tout en exerçant une influence de fait, permanente ou non, sur une ou plusieurs personnes se livrant à la mendicité ou en étant en relation habituelle avec cette ou ces dernières ».
Pour le Conseil constitutionnel, il appartiendra toutefois au juge, lors du prononcé de toutes ces peines, de faire application, dans le respect des droits de la défense, du principe énoncé à l'article 121-3 du code pénal, qui précise qu'il n'y a « point de délit sans intention de le commettre ».
Les peines encourues en cas de condamnation pour exploitation de la mendicité passent à 5 ans d'emprisonnement et 75 000 € d'amende si l'infraction a été commise (CP, art. 225-12-6 nouveau) :
à l'égard d'un mineur ;
à l'égard d'une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, une maladie, une infirmité, une déficience physique ou psychique ou un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur ;
à l'égard de plusieurs personnes ;
à l'égard d'une personne qui a été incitée à se livrer à la mendicité soit hors du territoire de la République, soit à son arrivée sur le territoire de la République ;
par un ascendant légitime, naturel ou adoptif de la personne qui mendie ou par une personne qui a autorité sur elle ou abuse de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ;
avec l'emploi de la contrainte, de violences ou de manœuvres dolosives sur la personne se livrant à la mendicité, sur sa famille ou sur une personne étant en relation habituelle avec elle ;
par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteurs ou de complices, sans qu'elles constituent une bande organisée.
Ces circonstances s'inspirent de celles prévues en matière de proxénétisme.
Enfin, lorsque que le délit d'exploitation de la mendicité est commis en bande organisée, les peines encourues sont portées à 10 ans d'emprisonnement et 1,5 million d'euros d'amende (CP, art. 225-12-7 nouveau).
L'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France est modifiée afin de prévoir de nouveaux cas de retrait de titre de séjour (ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, art. 12 modifié).
Dans la ligne de mire : les étrangers autorisés à séjourner sur le territoire français coupables d'infractions telles que le proxénétisme ou le racolage (CP, art. 225-5 à 225-11), l'exploitation de la mendicité d'autrui (CP, art. 225-12-5 à 225-12-7), la demande de fonds sous contrainte (CP, art. 312-12-1), la traite des êtres humains (CP, art. 225-4-1 à 225-4-4) ou sa tentative (CP, art. 225-4-7), ou encore les vols à la tire dans les transports collectifs des voyageurs (CP, art.311-4 7°).
Toutes ces personnes peuvent ainsi se voir dorénavant retirer leur carte de séjour temporaire. Précision du Conseil constitutionnel : seuls les étrangers qui ont commis ces faits sont visés. Ceux qui en sont seulement soupçonnés échappent à cette disposition. En outre, il appartiendra à l'autorité compétente, lorsqu'elle envisagera de retirer la carte de séjour, de « prendre en considération le droit de chacun à mener une vie familiale normale ».
Les préfets sont, dans la même logique, autorisés à prendre, par arrêté, des mesures de reconduite à la frontière à l'encontre d'un étranger détenant un visa de court séjour (valable 3 mois) - ou d'un ressortissant d'un pays dispensé de l'obligation de visa -, « dont le comportement a constitué une menace pour l'ordre public » (ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, art. 22 I 2° modifié).
La loi pour la sécurité intérieure étend le champ d'application du délit d'aide à l'entrée irrégulière sur le territoire français aux zones internationales des aéroports (ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, art. 21 I modifié).
Seules les personnes qui commettaient ce délit en France pouvaient, jusqu'à présent être inquiétées. La législation ne prévoyait rien à l'encontre de ceux qui, se trouvant dans l'espace international des zones aéro- portuaires situées sur le territoire national, facilitaient ou tentaient de faciliter, « par aide directe ou indirecte », l'entrée, la circulation ou le séjour irréguliers d'un étranger en France.
Pour mémoire, les peines encourues sont de 5 ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende (10 ans et 750 000 € si l'infraction est commise en bande organisée). Un certain nombre de peines complémentaires visant principalement les trafiquants de main-d'œuvre et les « passeurs » sont également prévues (suspension du permis de conduire, interdiction d'exercer une activité de transporteur, etc.).
L'étranger qui porte plainte ou témoigne contre une personne qu'il accuse d'avoir commis à son encontre les infractions de proxénétisme, d'exploitation de la mendicité et de traite des êtres humains, va pouvoir dorénavant se voir octroyer, en échange, une autorisation provisoire de séjour. A condition, toutefois, que sa présence ne constitue pas une menace à l'ordre public.
Il est prévu que cette autorisation provisoire de séjour ouvre droit à l'exercice d'une activité professionnelle.
Un décret en Conseil d'Etat doit déterminer « notamment les modalités de protection, d'accueil et d'hébergement » de l'intéressé.
En cas de condamnation définitive de la personne mise en cause, une carte de résident (d'une validité de 10 ans, renouvelable de plein droit) pourra être délivrée à l'étranger ayant déposé plainte ou témoigné.
Au départ, le ministre de l'Intérieur avait envisagé de sanctionner directement les « squatters ». Mais avait finalement renoncé, devant le tollé déclenché par son avant-projet (2). La question est, par la suite, revenue sur le devant de la scène à l'Assemblée nationale, sous la forme d'un amendement de la majorité. Mais avec comme cible, cette fois, non pas les mal-logés contraints d'occuper illégalement des immeubles pour avoir un toit, mais ceux qui mettent à la disposition de ces personnes, moyennant « le versement d'une contribution ou la fourniture de tout avantage en nature », un bien immobilier appartenant à autrui, « sans être en mesure de justifier de l'autorisation du propriétaire ou de celle du titulaire du droit d'usage de ce bien » (CP, art. 313-6-1 nouveau).
Les « marchands de sommeil » qui organisent un tel commerce sont ainsi dorénavant passibles de un an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende.
Le gouvernement précédent s'était déjà attaqué, avec la loi sur la sécurité quotidienne (3), aux « phénomènes d'envahissement des cages d'escaliers » en prévoyant l'intervention possible des forces de l'ordre lorsque des groupes entravent les accès ou nuisent à la tranquillité. Mais sans toutefois y associer de sanction. La loi pour la sécurité intérieure va plus loin en créant un nouveau délit, passible de 2 mois d'emprisonnement et de 3 750 € d'amende et visant « les voies de fait ou la menace de commettre des violences contre une personne, ou l'entrave apportée, de manière délibérée, à l'accès et à la libre circulation des personnes ou au bon fonctionnement des dispositifs de sécurité et de sûreté », lorsqu'elles sont « commises en réunion de plusieurs auteurs ou complices, dans les entrées, cages d'escaliers ou autres parties communes des immeubles collectifs d'habitation » (code de la construction et de l'habitation [CCH], art. L. 126-3 nouveau).
Nicolas Sarkozy a expliqué aux députés pourquoi il avait choisi de créer un délit plutôt qu'une contravention. « Si l'occupation est une simple contravention, la police ou la gendarmerie, saisies par un voisin excédé, auraient comme seul pouvoir de dresser un procès-verbal », ce qui « ne permet pas de faire dégager les lieux ». Le délit permet, en revanche, « l'interpellation et, si besoin, la garde à vue pour faire cesser le trouble » (J.O.A.N. [C.R.]n° 1 du 15-01-03).
L'Etat « appuiera autant qu'il le pourra les initiatives des élus locaux pour permettre le financement de salles communes dans les quartiers qui n'en disposeraient pas », a par ailleurs promis le ministre de l'Intérieur devant les sénateurs. « On doit s'assurer que, dans ces quartiers, des salles existent pour que, à toute heure, certains jeunes puissent s'y retrouver » (J.O. Sén. [C.R.]n° 56 du 13-11-02).
A noter : la nouvelle loi permet aux polices municipales de « constater par rapport » le nouveau délit (code général des collectivités territoriales, art. L. 2212-5 modifié).
La loi crée une nouvelle sanction pénale destinée à réprimer la « mendicité agressive ». Le code pénal comprend ainsi une nouvelle section consacrée à la « demande de fonds sous contrainte », venant après celles relatives à l'extorsion et au chantage.
La loi donne aux associations de défense des locataires d'immeubles collectifs à usage d'habitation déclarées depuis au moins 5 ans la possibilité de se porter partie civile dans certains cas d'atteintes à la personne (violences...) ou aux biens (destructions, dégradations, détériorations...) (code de procédure pénale, art. 2-20 nouveau) . A condition toutefois que l'infraction ait été commise dans un immeuble faisant partie de l'objet associatif de l'organisme. Et que la victime - ou, si celle-ci est un mineur ou un majeur protégé, son représentant légal -ait donné son accord.
Définition de la nouvelle infraction : il s'agit du fait, « en réunion et de manière agressive, ou sous la menace d'un animal dangereux, de solliciter, sur la voie publique, la remise de fonds, de valeurs ou d'un bien ». La peine encourue est de 6 mois d'emprisonnement et de 3 750 € d'amende.
La distinction avec le délit, déjà existant, d'extorsion de fonds n'est pas évidente, au premier abord. Ce dernier, en effet, est défini comme « le fait d'obtenir par violence, menace de violence ou contrainte [...] la remise de fonds, de valeurs ou d'un bien quelconque » (CP, art. 312-1 inchangé). « La référence aux faits commis en réunion ou sous la menace d'un animal dangereux est spécifique » à la nouvelle infraction, explique le député Christian Estrosi. Et, autre différence, le nouveau délit ne vise que des comportements de voie publique. Enfin, précise encore le député, le législateur a voulu affirmer « sa volonté de lutter spécifiquement contre la mendicité agressive en adoptant une incrimination ciblée sur ce type de comportements » (Rap. A.N. n° 508, décembre 2002, Estrosi).
Le Conseil constitutionnel a précisé que le juge qui retiendra le nouveau délit devra écarter celui d'extorsion de fonds.
Le code pénal prévoit désormais que « le fait de maintenir un enfant de moins de 6 ans sur la voie publique ou dans un espace affecté au transport collectif de voyageurs, dans le but de solliciter la générosité des passants », constitue une privation de soins (CP, art. 227-15 alinéa 2 nouveau). Une infraction punissable, pour mémoire, de 7 ans d'emprisonnement et 100 000 € d'amende.
Selon l'analyse du député (UMP) Christian Estrosi, « si les parents sont en état de nécessité absolue, ils ne seront pas considérés comme pénalement responsables, en application de l'article 122-7 du code pénal » (J.O.A.N. [C.R.] n° 4 du 21-01-03). Cet article prévoit que la personne qui, face à un danger actuel ou imminent qui menace elle-même ou autrui accomplit un acte nécessaire à la sauvegarde de la personne, n'est pas pénalement responsable.
Le ministre de l'Intérieur a voulu s'attaquer à « la minorité des gens du voyage qui s'installe en force sur des propriétés privées ou communales » sans autorisation. Et a prévu en conséquence un dispositif qui, bien que répressif, devrait selon lui inciter davantage les maires à se conformer aux prescriptions de la loi « Besson » du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage (4). L'aménagement d'aires de stationnement conditionnera, en effet, pour ceux-ci, le recours à la procédure pénale créée par la loi pour la sécurité intérieure.
Le gouvernement précédent s'était déjà penché sur le problème des stationnements irréguliers. Mais il avait abordé la question sous un angle différent de celui choisi par Nicolas Sarkozy, s'adressant plutôt aux maires afin qu'ils prévoient des emplacements pour les nomades. La loi « Besson » du 5 juillet 2000 a ainsi imposé aux communes de plus de 5 000 habitants- obligatoirement inscrites dans un schéma départemental - de construire des aires d'accueil permanentes. Elle a également prévu, en contrepartie, des aides financières et des moyens renforcés pour lutter contre le stationnement illicite.
Mais pour le député (UMP) Christian Estrosi, « les instruments mis à la disposition des maires pour obtenir, dès lors qu'ils remplissent leurs obligations d'accueil, le respect des propriétés privées ou communales, sont trop faibles ». De plus, les procédures d'expulsion par la voie civile sont, selon lui, « coûteuses, en particulier pour les petites communes, longues et peu efficaces » (Rap. A.N. n° 508, décembre 2002, Estrosi). D'où la création d'un délit d'installation sans titre sur un terrain (CP, art. 322-4-1 nouveau). La nouvelle infraction réside dans le fait « de s'installer en réunion, en vue d'y établir une habitation, même temporaire, sur un terrain appartenant » :
à une commune inscrite dans un schéma départemental et qui s'est conformée à ses obligations ;
à une commune qui n'est pas inscrite dans ce schéma (les communes de moins de 5 000 habitants peuvent ne pas y être inscrites) ;
à tout propriétaire autre qu'une commune.
Ainsi, « en l'absence de schéma départemental (5) , le dispositif[...] ne s'applique que pour les terrains privés » (Rap. A.N. n° 508, décembre 2002, Estrosi).
A noter : plusieurs milliers de gens du voyage ont défilé le 27 janvier 2003 pour protester contre les dispositions de la loi les concernant. Une délégation de manifestants a été reçue Place Beauvau et a obtenu du ministre l'engagement qu'un « comité de pilotage » sera mis sur pied pour examiner tous les mois l'avancement des schémas départementaux.
Le nouveau délit est punissable de 6 mois d'emprisonnement et de 3 750 € d'amende (CP, art. 322-4-1 nouveau).
La loi prévoit, au-delà, deux peines complémentaires (CP, art. 322-15-1 nouveau) :
la suspension du permis de conduire des auteurs du délit pour une durée de 3 ans au plus ;
la confiscation du ou des véhicules automobiles utilisés pour commettre l'infraction, à l'exception des véhicules destinés à l'habitation.
Pour le Conseil constitutionnel, il appartiendra toutefois au juge, lors du prononcé de toutes ces peines, de faire application, dans le respect des droits de la défense, des principes généraux énoncés aux articles 121-3 et 122-3 du code pénal qui précisent respectivement qu'il n'y a « point de délit sans intention de le commettre » et que « n'est pas pénalement responsable la personne qui justifie avoir cru, par une erreur sur le droit qu'elle n'était pas en mesure d'éviter, pouvoir légitimement accomplir l'acte.
La loi Besson du 5 juillet 2000 permet au maire d'une commune inscrite au schéma départemental et respectant les obligations qui lui incombent d'interdire, par arrêté, l'installation de résidences mobiles en dehors des endroits réservés. En cas de stationnement illicite, il peut alors obtenir, par référé du tribunal de grande instance, l'évacuation forcée du terrain concerné. Ces dispositions sont aujourd'hui aménagées.
Actuellement, dès lors qu'une commune inscrite dans un schéma départemental remplit les obligations qui lui incombent, son maire peut, par arrêté, interdire le stationnement de résidences mobiles sur le territoire de la commune en dehors des aires d'accueil aménagées. Ce pouvoir est également accordée pour les communes non inscrites au schéma départemental mais dotées d'une aire d'accueil et à celles qui décident, sans y être tenues, de contribuer au financement d'une telle aire.
Les maires des communes appartenant à des groupements de communes qui se sont dotés de compétences pour la mise en œuvre du schéma départemental disposent désormais également de ce pouvoir d'interdiction (loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000, art. 9 I modifié).
En cas de stationnement illicite, la loi Besson permet au maire d'une commune inscrite au schéma départemental et respectant les obligations qui lui incombent d'obtenir, par référé du tribunal de grande instance, l'évacuation forcée des espaces occupés. Le juge civil peut également prescrire aux occupants de rejoindre l'aire d'accueil, voire de quitter le territoire communal. Il peut être saisi par la commune lorsque l'occupation irrégulière concerne un terrain privé, dès lors que la situation est de nature à porter atteinte à la salubrité, à la sécurité ou à la tranquillité publique.
Pour le député (UMP) Christian Estrosi, « indépendamment de la lenteur et du coût de ces recours », « les procédures sont souvent annihilées par des changements incessants d'occupants, qui ne sont donc pas tous visés dans l'ordonnance initiale rendue par le juge, voire par des difficultés d'identification des personnes présentes sur le terrain » (Rap. A.N. n° 508, décembre 2002, Estrosi). La loi pour la sécurité intérieure permet en conséquence au juge, lorsque le requérant démontre l'impossibilité d'identifier les occupants du terrain, d'étendre à l'ensem- ble d'entre eux les effets de l'ordonnance d'évacuation (loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000, art. 9 II modifié).
Autre modification apportée à la loi « Besson » : les maires de communes non inscrites au schéma départemental peuvent désormais, au même titre que ceux des communes inscrites, se substituer aux propriétaires privés pour faire ordonner l'évacuation forcée d'un terrain, « lorsque le stationnement est de nature à porter atteinte à la salubrité, la sécurité et la tranquillité publiques » (loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000, art. 9-1 nouveau).
Les contrôles d'identité de police judiciaire pouvaient jusqu'à présent être effectués, à l'initiative des forces de l'ordre, dès lors que celles-ci disposaient à l'égard d'une personne d'un « indice faisant présumer » qu'elle avait commis ou qu'elle se préparait à commettre une infraction, qu'elle était susceptible de fournir des renseignements utiles à une enquête ou qu'elle faisait l'objet de recherches judiciaires.
La loi pour la sécurité intérieure remplace la notion d'indice par celle de « raisons plausibles de soupçonner » (CPP, art. 78-2 modifié).
Le gouvernement justifie cette modification par le fait que, pour le placement en garde à vue, la loi du 4 mars 2002 modifiant la loi sur la présomption d'innocence a retenu comme critère les « raisons plausibles », au lieu de « l'indice » (6).
Conséquence directe de la « tuerie de Nanterre », les professionnels de la santé et de l'action sociale ne sont désormais plus soumis au secret professionnel s'il s'agit d'informer les autorités préfectorales du caractère dangereux des personnes qui les consultent et dont ils savent qu'elles détiennent une arme ou qu'elles ont manifesté leur intention d'en acquérir une (code pénal, art. 226-14 3° nouveau) (7). L'objectif : « faciliter le repérage de personnes déséquilibrées susceptibles d'utiliser une arme » ( Rap. A.N. n° 508, décembre 2002, Estrosi) .
La loi pour la sécurité intérieure offre un fondement législatif aux traitements automatisés d'informations mis en œuvre par la police et la gendarmerie. Certains, comme le système de traitement des infractions constatées (STIC), n'avaient, en effet, jusqu'alors qu'un statut réglementaire (8). L'objectif des fichiers est, entre autres, de « faciliter la constatation des infractions à la loi pénale, le rassemblement des preuves de ces infractions et la recherche de leurs auteurs ».
Lutte contre l'homophobie (art. 47) . La loi pour la sécurité intérieure institue une circonstance aggravante en cas d'atteintes à la personne (meurtre, actes de tortures et de barbarie, violences, viol) commises pour un motif homophobe. La circonstance aggravante est constituée lorsque l'infraction est « précédée, accompagnée ou suivie de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature portant atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie [cette dernière] à raison de leur orientation sexuelle ».
Outre-mer (art.141) . La loi prévoit un ensemble de mesures destinées à lutter contre l'immigration clandestine dans les départements d'outre-mer. Et notamment en Guyane et à Saint-Martin (Guadeloupe), où est pérennisé un dispositif spécifique pour reconduire les clandestins à la frontière dans les 48 heures. Lequel devait arriver à échéance cette année.
Travail dissimulé (art. 46) . Le législateur aggrave les peines contre ceux qui exercent une activité économique sans avoir déclaré leur entreprise, dissimulent leurs salariés ou une partie des salaires. Les contrevenants s'exposent désormais à 3 ans d'emprisonnement et 45 000 € d'amende.
Fouilles de véhicules (art. 11, 12,13) . La loi étend les possibilités de « visite des véhicules ». Les officiers et agents de police judiciaire sont ainsi autorisés à procéder à la fouille de voitures dans des enquêtes pour vol et recel, et non plus seulement en matière de terrorisme, de trafic de stupéfiants et de transport d'armes et d'explosifs.
Dépistage de MST en cas d'agression sexuelle (art. 28) . Toute personne contre laquelle il existe des indices graves ou concordants d'avoir commis un viol, une agression sexuelle ou une atteinte sexuelle peut dorénavant faire l'objet d'un dépistage de maladies sexuellement transmissibles (MST) (9). Une opération effectuée, le cas échéant, sans le consentement de l'intéressé, « à la demande de la victime ou lorsque son intérêt le justifie ». Refuser de se soumettre à cet examen est puni de un an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende. Précision du Conseil constitutionnel : il appartiendra à l'autorité judiciaire de ne pas répondre favorablement à la demande de prélèvement sanguin si la nature de l'acte en cause n'implique aucun risque pour la santé de la victime (absence de contact physique).
Garde à vue (art.19) . Les députés ont supprimé l'obligation, imposée aux forces de l'ordre par la loi Guigou sur la présomption d'innocence (10), d'informer la personne gardée à vue de son « droit au silence ». Un droit qui n'est donc pas, en lui-même, remis en cause. C'est simplement sa notification, mal vécue par la police selon les parlementaires, qui est supprimée.
Outrage au drapeau ou à l'hymne national (art. 113) . « Outrager » publiquement les symboles que sont le drapeau tricolore et l'hymne national constitue désormais un délit pouvant valoir à son auteur une amende de 7 500 € . Commis en réunion, cette infraction est punie de la même peine ainsi que de 6 mois d'emprisonnement. Le champ de la nouvelle infraction est strictement délimité. Ne sont ainsi visés que les « outrages » proférés au cours d'une « manifestation organisée ou réglementée par les autorités publiques ». Une expression qui doit être entendue, selon le Conseil constitutionnel, comme se référant aux « manifestations publiques à caractère sportif, récréatif ou culturel se déroulant dans des enceintes soumises par les lois et les règlements à des règles d'hygiène et de sécurité en raison du grand nombre de personnes qu'elles accueillent ».
La loi indique que les services de police et de gendarmerie nationales peuvent mettre en œuvre « des applications automatisées d'informations nominatives recueillies au cours des enquêtes préliminaires ou de flagrance ou des investigations exécutées sur commission rogatoire » et concernant tout crime ou délit, ainsi que « les contraventions de la cinquième classe sanctionnant un trouble à la sécurité ou à la tranquillité publiques ou une atteinte aux personnes, aux biens ou à l'autorité de l'Etat ». Jusqu'à présent, seules six contraventions de cinquième classe pouvaient donner lieu à une inscription aux fichiers.
La rédaction choisie par le législateur revient à élargir le champ des infractions concernées. Les auteurs d'atteinte à l'état civil de la personne ou d'utilisation d'un document délivré par une administration publique et comportant des mentions devenues incomplètes ou inexactes peuvent, par exemple, figurer désormais dans les fichiers. Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), doit préciser la liste des contraventions susceptibles de conduire à une inscription (11).
Sont susceptibles d'être inscrites dans les traitements automatisés de police judiciaire les personnes « sans limitation d'âge », à l'encontre desquelles il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elles aient pu participer, comme auteurs ou complices, à la commission de certaines infractions (voir ci-dessus). Autrement dit, des mineurs peuvent faire l'objet d'une inscription dans les fichiers. A charge toutefois pour le futur décret, a précisé le Conseil constitutionnel, de prévoir une durée de conservation des faits commis par les mineurs conciliant, d'une part, la nécessité de rechercher les auteurs des infractions et, d'autre part, le relèvement moral et éducatif des mineurs délinquants.
Il en est de même pour les victimes d'infractions, l'idée étant de pouvoir organiser la restitution de leurs objets volés ou de les informer de l'interpellation de l'auteur des faits. Possibilité leur est toutefois offerte de s'opposer à ce que les informations nominatives les concernant soient conservées dans le fichier, « dès lors que l'auteur des faits a été condamné ».
A noter : les témoins ne peuvent être inscrits à ce seul titre dans les traitements automatisés de police judiciaire.
Le traitement des informations nominatives est opéré « sous le contrôle du procureur de la République compétent ». Ce dernier peut demander qu'elles soient effacées, complétées ou rectifiées, « notamment en cas de requalification judiciaire ».
En cas de décision de relaxe ou d'acquittement devenue définitive, les données personnelles concernant les personnes mises en cause sont effacées sauf si le procureur en prescrit le maintien pour des raisons liées à la finalité du fichier, auquel cas elle fait l'objet d'une mention.
Enfin, les décisions de non-lieu et, lorsqu'elles sont motivées par une insuffisance de charges, de classement sans suite, font l'objet d'une mention sauf si le procureur de la République ordonne l'effacement des données personnelles.
Le législateur énumère la liste des personnes habilitées à consulter les traitements automatisés de police judiciaire. Au-delà des « personnels spécialement habilités des services de police et de gendarmerie », l'accès aux informations est ainsi également ouvert :
au parquet ;
aux juges d'instruction « pour les recherches relatives aux infractions dont ils sont saisis ».
Les personnes dont les données figurent dans les « traitements de souveraineté » - fichiers intéressant la sûreté de l'Etat, la défense ou la sécurité publique - mis en œuvre par la police et la gendarmerie n'avaient, jusqu'à présent, qu'un droit d'accès indirect aux informations les concernant, par l'intermédiaire d'un membre de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, magistrat ou ancien magistrat chargé de procéder aux vérifications et d'en informer simplement le requérant.
Désormais, la commission peut, en accord avec le responsable du traitement, communiquer aux personnes mentionnées dans ces fichiers certaines des informations qui y sont conservées et qui les concernent, dès lors que cette communication ne met pas en cause la sûreté de l'Etat.
La loi allonge la liste des personnes exerçant une fonction publique « protégées » contre les menaces ou actes d'intimidation (CP, art. 433-3 modifié) . Les gardiens d'immeubles, les sapeurs-pompiers ou encore les professionnels de santé font ainsi leur apparition aux côtés d'autres agents incarnant l'autorité publique ou assumant des missions de service public. La sanction - 2 ans d'emprisonnement et une amende de 30 000 € - s'applique désormais également si la menace a été proférée dans l'exercice ou du fait des fonctions de la personne, sa qualité étant apparente ou connue de l'auteur. Le bénéfice du dispositif est, par ailleurs, étendu au conjoint, aux ascendants, aux enfants et à toute autre personne vivant habituellement au domicile de l'agent. Signalons au passage que les dispositions prévoyant des peines aggravées en cas d'atteintes à la personne commises à l'encontre des personnes exerçant une mission ou une fonction publique sont modifiées de la même façon (art. 20 bis) .
Le fichier des personnes recherchées constitue une base de donnée destinée à faciliter les recherches effectuées par les forces de l'ordre à la demande des autorités judiciaires ou administratives. Selon les chiffres communiqués par le ministère de l'Intérieur, près de 20 millions de consultations ont lieu chaque année, notamment lors de contrôles routiers.
L'inscription d'une personne au fichier était jusqu'à présent toujours facultative mais la loi pour la sécurité intérieure la rend aujourd'hui obligatoire pour certaines catégories de personnes. Au premier rang : celles qui font l'objet d'une peine d'interdiction de séjour ou encore d'un placement sous contrôle judiciaire.
A la suite des attentats du 11 septembre 2001 et afin de renforcer l'efficacité de la lutte contre le terrorisme, le gouvernement précédent avait, avec la loi pour la sécurité quotidienne, pris des mesures provisoires autorisant la consultation des fichiers de police judiciaire à des fins d'enquête administrative dans les domaines de la sécurité. La loi pour la sécurité intérieure pérennise aujourd'hui ces mesures et va même encore plus loin, en étendant la consultation administrative à des hypothèses ne touchant pas à des questions de sécurité.
L'administration a, par exemple, désormais l'obligation de consulter les fichiers dans le cadre d'une procédure d'instruction des demandes d'acquisition de la nationalité française, de délivrance ou de renouvellement des titres relatifs à l'entrée et au séjour des étrangers (loi n° 95-73 du 21 janvier 1995, art. 17-1 modifié). En pariel cas, au-delà des agents de la police et de la gendarmerie nationales « spécialement habilités à cet effet », la consultation peut être effectuée « par des personnels investis de mission de police administrative », dans des conditions qu'un décret en Conseil d'Etat devra déterminer.
Pour le Conseil constitutionnel, ces dispositions ne portent pas atteinte aux droits des étrangers, « lesquels ne comprennent en principe ni celui d'acquérir la nationalité française, ni celui de voir renouveler leur titre de séjour ». Toutefois, précisent les neuf sages, la consultation des fichiers ne saurait être entendue comme remettant en cause l'acquisition de la nationalité française lorsque celle-ci est, en vertu de la loi, de plein droit, ni le renouvellement d'un titre de séjour lorsque celui-ci est de plein droit en vertu de la loi ou est commandé par le respect du droit de chacun à mener une vie familiale normale.
Le fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG) a été créé par la loi du 17 juin 1998 relative à la répression des infractions sexuelles ainsi qu'à la protection des mineurs (12). A l'origine, il a été conçu pour centraliser les traces et empreintes génétiques des personnes condamnées pour des infractions à caractère sexuel.
La loi pour la sécurité quotidienne l'a étendu une première fois aux atteintes les plus graves contre les personnes ou les biens (13) : atteintes volontaires à la vie de la personne, tortures, actes de barbarie et violences volontaires, crimes de vols, extorsions et destructions, dégradations et détériorations dangereuses pour les personnes, actes de terrorisme.
Aujourd'hui, le champ d'application du fichier est de nouveau élargi. La liste des infractions concernées comprend désormais, notamment, la traite des êtres humains, les atteintes aux libertés de la personne, le proxénétisme ou encore l'exploitation de la mendicité (CPP, art. 706-55 modifié).
Jusqu'à présent, le fichier national automatisé des empreintes génétiques ne centralisait que les empreintes de personnes définitivement condamnées. Désormais, les empreintes des personnes à l'encontre desquelles il existe « des indices graves ou concordants » rendant vraisemblable qu'elles aient commis une infraction entrent dans le champ du fichier (CPP, art. 706-54 modifié).
A la différence de ce qui est prévu pour les personnes condamnées, la conservation des empreintes de ces suspects constitue toutefois une faculté et non une obligation. La décision appartient à un officier de police judiciaire agissant soit d'office, soit à la demande du procureur de la République ou du juge d'instruction.
Une procédure permet par ailleurs l'effacement des empreintes, « lorsque leur conservation n'apparaît plus nécessaire compte tenu de la finalité du fichier ».
Signalons encore que les officiers de police judiciaire peuvent également, d'office ou à la demande du procureur de la République ou du juge d'instruction, faire procéder au rapprochement de l'empreinte génétique de toute personne à l'encontre de laquelle il existe « une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis un crime ou un délit », avec les données incluses aux fichiers. Il s'agit d'une simple comparaison, sans conservation de l'empreinte dans le fichier.
Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, doit préciser, notamment, la durée de conservation des informations enregistrées.
A noter : la loi pour la sécurité intérieure porte de 6 mois à 1 an d'emprisonnement et de 7 500 € à 15 000 € d'amende les peines encourues en cas de refus de se soumettre à un prélèvement biologique (CPP, art. 706-56 modifié).
Olivier Songoro