Piètre bilan d'une année d'application de la loi du 4 mars 2002 sur les droits des malades que celui dressé par le Collectif interassociatif sur la santé (CISS) (1). « Et pourtant, nous étions assez satisfaits de la loi adoptée. Mais il n'y a rien de plus délicat pour un ministre que de mettre en œuvre la politique de ses prédécesseurs... », note Pierre Lascoumes, de l'association Aides et coordinateur du collectif, qui regrette également que les relations nouées depuis quelques années entre les associations et le ministère de la Santé se soient distendues.
Concrètement, l'agrément des associations habilitées à représenter les usagers du système de santé dans les instances qui leur sont ouvertes (2) est au point mort. Faisant le constat qu' « il existe de trop nombreux exemples où la participation voulue par l'autorité politique et organisée par des textes est détournée par la désignation de “représentants” de pure façade », les associations avaient elles-mêmes demandé l'instauration d'une telle procédure. Le texte adopté en mars 2002 les avait globalement satisfaites. Il fixe des critères tels que « l'activité effective et publique de l'association en vue de la défense des personnes malades et des usagers du système de santé », sa représentativité, son indépendance... « Or le ministre juge cette procédure d'agrément inapplicable sans que les raisons soient explicitées », s'étonne Pierre Lascoumes, qui note qu'elle ne semble pas poser de difficultés particulières dans le domaine de la consommation et de l'environnement. Jean-François Mattei semble pourtant s'engager sur une autre voie puisqu'il vient de confier à Alain- Michel Ceretti, président du Lien (Association de lutte, d'information et d'études des infections nosocomiales) et membre du CISS, une mission visant à « proposer, au terme de la concertation la plus large, les conditions de mise en œuvre d'une union nationale des associations de santé regroupant, sur un modèle inspiré notamment de l'Union nationale des associations familiales ou de l'Unapei, l'ensemble des associations ayant pour objet la représentation des malades, d'abord au niveau régional puis au niveau national » (3) . Une commande qui suscite des réserves du côté associatif. Le chargé de mission lui-même se montre ferme : « Nous n'accepterons pas un carcan nous maintenant dans une position vassale, une structure qui peut-être nous financerait mais nous obligerait à nous taire si nous avons envie de parler. » Christian Saout, président d'Aides, s'interroge de son côté : « Pourquoi contraindre la société civile à s'organiser quand personne n'est deman- deur ? »
L'indemnisation des victimes d'accidents médicaux graves non fautifs (4) peine aussi à se mettre en place. Les textes qui permettraient aux commissions régionales de conciliation et d'indemnisation de fonctionner ne sont pas, il est vrai, encore parus... Le ministère a promis leur publication d'ici à la fin du mois. Un numéro vert (0 800 779 887) fonctionne cependant depuis le 3 mars : on peut y obtenir des informations sur le dispositif ainsi qu'un préenregistrement pour une prise en charge prioritaire dès que les commissions seront opérationnelles.
Quant à la convention Belorgey sur l'assurance des personnes à risques aggravés, à laquelle la loi du 4 mars 2002 a donné un cadre légal (5), elle souffre toujours d'un manque de diffusion auprès des bénéficiaires potentiels et des organismes bancaires (6)...
Seul domaine où de réels progrès sont constatés : l'accès des patients à leur dossier médical (7). « Il y a toujours peu de demandes en médecine de ville mais le nombre semble avoir doublé à quadruplé dans les cliniques et les hôpitaux », résume Michel Delcey, de l'Association des paralysés de France. Les associations de victimes d'accidents estiment cependant qu'un quart des demandes se heurtent à des difficultés. D'une façon générale, il semble difficile d'obtenir les cahiers de liaison infirmiers et « toutes les transmissions des professionnels aux professionnels au jour le jour », souligne Michel Delcey. La loi et le décret d'application ne rendent possible, il est vrai, que l'accès à des informations « formalisées ». Par ailleurs, le prix de la reproduction des diverses pièces est parfois prohibitif... L'Agence nationale d'évaluation et d'accréditation en santé (ANAES) devrait rendre publiques, fin mars, des recommandations de bonnes pratiques sur la communication du dossier médical.
C.G.
(1) Il réunit une trentaine d'associations, parmi lesquelles l'AFM, Aides, l'APF, la FNAP-PSY, l'Unapei... Contact : Fédération Aides - Tour Essor - 14, rue Scandicci - 93500 Pantin - Tél. 01 41 83 46 46.
(2) Voir ASH n° 2264 du 24-05-02.
(3) Le rapport doit être remis au plus tard au mois de mai « pour que l'ensemble du dispositif soit constitué à la fin 2003 ».
(4) Voir ASH n° 2268 du 21-06-02.
(5) Voir ASH n°2268 du 21-06-02.
(6) Voir ASH n° 2274 du 30-08-02 et n° 2277 du 20-09-02.
(7) Voir ASH n° 2262-2263 du 17-05-02.