La Cour de justice des Communautés européennes a rendu le 25 février un arrêt fondamental en matière d'accès aux soins des retraités quand ils se déplacent dans un autre pays membre de l'Union européenne.
La Cour affirme de façon solennelle, en formation plénière, que la situation des retraités diffère de celle des autres migrants. Le législateur européen ayant entendu favoriser la mobilité effective de cette catégorie d'assurés sociaux, malgré une vulnérabilité et une dépendance potentiellement plus grandes en matière de santé. La réglementation communautaire (1) distingue en effet la situation des travailleurs salariés ou non salariés qui n'ont droit au remboursement des soins au cours d'un séjour sur le territoire d'un autre pays membre que si leur « état vient à nécessiter immédiatement des prestations » et celle des pensionnés ou retraités qui n'ont à démontrer aucune condition relative à leur santé. Cette distinction emporte des conséquences précises, selon les juges.
Aucune condition supplémentaire ne peut être imposée par un établissement hospitalier, un organisme de sécurité sociale ou un Etat, pour prendre en charge (ou rembourser) les soins des titulaires de pensions séjournant provisoirement dans un autre Etat membre. Ceux-ci ne peuvent donc être soumis à la condition que « l'affection ayant nécessité les soins soit apparue de manière soudaine et que les soins étaient immédiatement nécessaires » ou à une quelconque procédure d'autorisation préalable. De même, le fait que les soins requis soient « éventuellement liés à une pathologie préexistante et connue de l'assuré telle qu'une maladie chronique ne saurait suffire à empêcher l'intéressé de bénéficier des dispositions », précisent les juges. Seule demeure donc une restriction : si les soins ont été programmés et si le séjour a été planifié à des fins médicales, la caisse peut refuser le remboursement.
La Cour rappelle également l'obligation de coopération des organismes concernés (établissements de santé ou de sécurité sociale) pour assurer l'application de la législation communautaire. Ainsi, le fait de ne pas être muni du formulaire E111 - pour un court séjour - ne suffit pas à refuser la prise en charge des soins. « En pareil cas, il incombe en effet à l'institution du lieu de séjour de s'assurer que l'intéressé ne détient pas un tel formulaire et, à défaut, d'en solliciter la délivrance », précise la Cour. Si l'institution du lieu de séjour refuse de servir des prestations en nature, c'est à l'institution du lieu de résidence de rembourser directement à l'assuré le coût des soins qu'il a dû supporter, « de manière à garantir à ce dernier un niveau de prise en charge équivalent à celui dont il aurait bénéficié si les dispositions [communautaires] avaient été respectées », quitte à se retourner ensuite contre la caisse de sécurité sociale fautive.
(1) Règlements européens n° 1408/71 du 14 juin 1971 (notamment les articles 22 et 31) et n° 574/72 du 21 mars 1972.