Très attendu (1), le rapport du groupe de travail interministériel sur les logements-foyers, piloté par l'inspecteur général des Ponts et Chaussées Jean-Pierre Grunspan, est enfin diffusé officiellement, soit plus de six mois après sa remise à la directrice générale de l'action sociale et au directeur général de l'urbanisme, de l'habitat et de la construction. Au final, un état des lieux- assez difficile à établir - et une trentaine de propositions sur l'adaptation des logements-foyers à l'évolution de la population hébergée et aux nouvelles exigences de sécurité.
En effet, destinés à l'origine à accueillir des personnes âgées valides, ils hébergent aujourd'hui des personnes de plus en plus dépendantes. Or, les logements-foyers sont soumis depuis peu, comme tous les établissements recevant des personnes âgées, à un nouveau règlement de sécurité-incendie (type J) dont le respect peut entraîner des dépenses très élevées de mise aux normes et, corrélativement, une hausse de la redevance à la charge des résidents. En outre, dans le cadre de la réforme de la tarification des établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes (EHPAD), les logements-foyers qui dépassent un seuil significatif de dépendance- GIR moyen pondéré (GMP) (2) supérieur à 300 - doivent conclure une convention avec l'Etat et le conseil général par laquelle ils s'engagent, en particulier, à adapter leurs locaux.
Pour dresser son état des lieux, le groupe de travail « s'est heurté rapidement à un double obstacle » : la multiplicité de définitions du concept de logement-foyer, qui résulte de la coexistence de trois cultures administratives (logement, social et médico-social, santé), et l'insuffisance des données statistiques qui « affecte tout aussi bien le nombre actuel de structures ou de lits, les investissements et les financements privilégiés attribués annuellement [que] la répartition des GMP ». Et « ces obstacles ont rendu difficile la réalisation de prévisions, notamment en ce qui concerne le nombre de structures appelées à entrer dans la réforme de la tarification des EHPAD ». Aussi Jean-Pierre Grunspan estime-t-il qu'un « état des lieux solide et pertinent reste à réaliser ». Il a d'ailleurs été entendu puisque des instructions aux préfets de départements seront prochainement données en ce sens.
Malgré ces difficultés, les auteurs du rapport s'accordent toutefois pour lier à la notion de logement-foyer un ensemble de valeurs communes qui montrent, selon eux, « l'attachement des professionnels à ce concept » : une offre de logement indépendant proposant tous les attributs du domicile et adaptable au vieillissement ; une vocation sociale ; une sécurisation de jour et de nuit ; la valorisation de l'autonomie ; la prévention de la perte d'autonomie ; l'inscription dans un réseau gérontologique ; l'accompagnement dans les gestes de la vie quotidienne ; une fonction de socialisation et d'ouverture à la vie sociale locale ; l'optionnalité des services proposés. Et ils suggèrent que les ministères en charge du logement et des affaires sociales prennent ensemble l'initiative d'étudier une nouvelle définition s'appuyant sur celle consacrée par la loi de solidarité et de renouvellement urbains (3) et sur les valeurs communes ainsi dégagées, définition unique qui existerait par-delà la signature d'une convention tripartite faisant du logement-foyer un EHPAD.
En ce qui concerne la sécurité-incendie, le rapport propose notamment de restreindre l'application du nouveau règlement de type J aux seules structures dont le GMP est égal au minimum à 300 ; en deçà de ce seuil, ces dernières relèveraient de la réglementation habitation. Le document préconise également d'échelonner dans le temps les travaux de mise aux normes (4). En outre, il explore différentes solutions de financement des travaux susceptibles de modérer les hausses de redevance.
Bien que le groupe de travail n'ait pas directement été saisi de la réforme de la tarification, il s'est tout de même penché sur le sujet pour deux raisons : « la nécessité, pour chiffrer les besoins d'investissements, de prévoir le nombre de structures appelées à [y] entrer et, plus fondamentalement, le caractère impératif d'une réflexion sur l'avenir des logements-foyers ». Globalement, il réclame plus de souplesse dans la mise en œuvre de la réforme. Ainsi, outre un report de la date butoir de signature des conventions tripartites, d'ores et déjà acté par la loi de financement pour la sécurité sociale pour 2003 (5), il met en avant une solution mixte consistant à admettre que des logements-foyers accueillent tout à la fois des personnes âgées dépendantes et autonomes. Un dispositif de conventionnement partiel serait alors nécessaire. Il prône également un ajustement de la durée des conventions tripartites en fonction du montant des investissements nécessaires et de leur durée d'amortissement, ainsi que le maintien du forfait soins courants aux établissements appelés à ne pas se conventionner « afin de couvrir la fonction de coordination médicale et para-médicale et de suivi des prescriptions ». Enfin, le rapporteur suggère au ministère des Affaires sociales de diffuser une note d'information permettant aux gestionnaires de logements-foyers ayant un GMP proche de 300 de se positionner « le plus vite possible » par rapport à leur entrée ou non dans la réforme.
Mais pour Jean-Marie Palach, chef de la mission d'appui à la réforme de la tarification (Marthe) au ministère des Affaires sociales, « il y a tout dans le dispositif existant pour répondre aux besoins des logements-foyers ». Seul doit encore être publié un arrêté fixant un cahier des charges adapté aux structures ayant un GMP inférieur à 300 ainsi qu'aux petites unités de vie (moins de 25 places) avec un GMP de plus de 300, précise-t-il.
(1) Voir ASH n° 2295 du 24-01-03.
(2) Calculé à partir des groupes iso-ressources (GIR) dans lesquels sont classés les résidents (de 1 à 6), le GMP d'un établissement mesure le niveau moyen de dépendance des usagers accueillis.
(3) Pour le législateur, un logement-foyer est un établissement destiné au logement collectif, à titre de résidence principale, de personnes dans des immeubles comportant à la fois des locaux privatifs meublés ou non et des espaces collectifs - Voir ASH n° 2195 du 29-12-00.
(4) En réponse, un groupe interministériel va être créé sur l'application du règlement de type J aux logements-foyers.
(5) Voir ASH n° 2291 du 27-12-02.