« Les problèmes posés par le vieillissement des personnes souffrant d'un handicap physique ou mental prennent une importance croissante et ils ne devraient faire que s'amplifier dans les années à venir. » Au moins 150 000 personnes handicapées devraient atteindre l'âge de 60 ans au cours des dix prochaines années. C'est fort de ce constat que le Haut Conseil de la population et de la famille a rendu public un avis, le 25 novembre, sur le vieillissement de ces publics.
Il y déplore, tout d'abord, les lacunes dans l'estimation du nombre des personnes en cause, de leurs caractéristiques et de leur situation administrative. Tout en relevant l'apport de l'enquête Handicaps-Incapacités-Dépendance (HID) (1), il lui apparaît donc nécessaire, à l'instar du Conseil économique et social (2), que soit élaboré un rapport public à destination du Parlement, sur la situation des personnes handicapées et la politique menée à leur égard. Ce document, d'une périodicité tri-annuelle, devrait isoler les problèmes spécifiques liés au vieillissement de ces personnes.
Dans le second volet de son avis, le Haut Conseil souhaite que l'action publique soit construite autour de cinq principes :le souci de la dignité des personnes handicapées, notamment par une prévention efficace de tout risque de maltraitance ; la possibilité pour les intéressés et leur entourage de choisir leur mode de résidence, le lieu et la forme de leur activité, quel que soit l'endroit où ils vivent ; la stabilité de leur environnement, c'est-à-dire une continuité de leur mode d'hébergement et de leurs activités ; la nécessité de compenser les conséquences du handicap dans la vie sociale ; l 'adaptation des solutions au type de handicap .
Au-delà, le conseil veut « gommer les effets négatifs du couperet des 60 ans », les dispositifs sociaux changeant profondément à cette occasion.
Relevant que l'existence d'une limite d'âge pour le travail et l'hébergement dans des institutions spécifiques est à l'origine d'un bouleversement des conditions de vie de beaucoup des personnes handicapées et que, par ailleurs, le passage de ce seuil change la nature des prestations auxquelles ces dernières sont susceptibles d'avoir droit (3), l'instance recommande, en premier lieu, de favoriser la continuité de vie. Un souci de stabilité qui impose que soient développés l'aide et les soins à domicile afin que les personnes handicapées qui le souhaitent puissent continuer de vivre chez elles ou auprès de parents. La continuité des solutions d'hébergement, si elle doit être permise aux handicapés, est, quant à elle, plus difficile à mettre en œuvre, admet le conseil, en raison de la pénurie de places dans les structures. En tout état de cause, l'avis insiste sur la formation - et en nombre suffisant - des personnels spécialisés dans les soins et l'accompagnement des intéressés, en institution ou à domicile. Il s'interroge aussi sur la pertinence d'une retraite automatique à 60 ans pour les handicapés quand leur activité professionnelle est un élément central de leur projet de vie. Et pense qu'une certaine souplesse pourrait être encouragée, « ce qui suppose sans doute un accroissement de l'offre de places en centres d'aide par le travail ».
Le Haut Conseil de la population et de la famille regrette également l'inégalité du mode de prise en charge des personnes handicapées dès lors qu'elles atteignent 60 ans. En effet, celles qui avaient jusque-là une place en établissement, continuent de voir leur hébergement et leurs soins assumés « de manière très complète par le département et l'assurance maladie », contrairement à celles qui vivaient chez elles. Lesquelles doivent davantage contribuer au financement de leurs soins et de leur éventuel hébergement en maison de retraite. Aussi le conseil juge-t-il essentiel que toutes se voient offrir « le même soutien, à ce stade de leur vie, qu'elles aient résidé dans leur famille ou dans une institution adaptée ».
Enfin, il s'alarme de la disparité des critères d'attribution des allocations pour les personnes handicapées- essentiellement médicaux avant 60 ans, fonctionnels au-delà dans le cadre de l'allocation personnalisée d'autonomie (appréciation d'une dépendance et non plus d'un handicap). Et appelle de ses vœux une réflexion sur la révision des mécanismes d'attribution des aides « afin d'éviter toute rupture ou toute éviction d'un handicapé par le franchissement de cette limite d'âge ».
Autant de pistes qui doivent, selon la Haute Instance, trouver toute leur place dans le cadre du chantier de rénovation de la loi du 30 juin 1975 en faveur des personnes handicapées. La question du vieillissement devant, d'après elle, faire l'objet de dispositions spécifiques.
(1) Voir ASH n° 2280 du 11-10-02.
(2) Voir ASH n° 2180 du 15-09-00.
(3) L'allocation aux adultes handicapés est supprimée au profit, le cas échéant, d'une pension de vieillesse, qui peut être complétée par l'allocation personnalisée d'autonomie.