Face aux vives critiques formulées contre l'avant-projet de loi de sécurité intérieure (1), qui devrait être présenté en conseil des ministres le 23 octobre, Nicolas Sarkozy a, semble-t-il, accepté de nouer le dialogue avec les associations. En tout cas avec certaines d'entre elles : le 14 octobre, cinq grandes organisations caritatives - ATD quart monde, l'Entraide protestante, le Secours catholique, l'Armée du salut et Emmaüs France - ont été conviées place Beauvau où elles ont pu prendre connaissance du projet de loi, tel qu'il a été présenté au Conseil d'Etat début octobre. « Le ministre a accepté le principe de nous rencontrer régulièrement et de recevoir des amendements de notre part, rapporte David Berly, vice-président de l'Entraide protestante. Et, une fois le texte voté, d'organiser des rencontres trimestrielles d'évaluation avec les responsables associatifs et les responsables de la police et de la gendarmerie. »
Les associations, qui veulent continuer de se mobiliser collectivement, se rencontreront dès la semaine prochaine, au sein du collectif Alerte (2), afin de rédiger leurs propositions. Car le texte qui leur a été remis les a peu convaincues. Depuis le document de travail dont les dispositions visant notamment les squatters, les gens du voyage, les personnes prostituées et les mendiants avaient été, en septembre, divulguées dans la presse, seul l'article rétablissant le délit de mendicité a été corrigé de manière sensible. Selon la dernière mouture du texte, sont considérées comme des infractions « l'exploitation de la men- dicité » et la « demande de fonds sous contrainte ». Passible d'une peine de six mois d'emprisonnement et de 7 500 € d'amende, cette dernière est caractérisée par « le fait, en réunion et de manière agressive ou sous la menace d'animaux dangereux, de solliciter la remise de fonds, de valeurs ou d'un bien ».
Pour le reste, les craintes associatives demeurent d'actualité. Le collectif Alerte - qui rappelle d'ailleurs que la mendicité réellement agressive peut déjà, en l'état actuel du code pénal, être sanctionnée, par exemple pour « voie de fait » - demande « solennellement au chef de l'Etat et au Premier ministre » de retirer du projet les dispositions visant l'ensemble des publics fragilisés. « Est-ce en créant un délit de prostitution qu'on mettra fin à celle-ci ? [...] Les squatters [...] trouveront- ils à leur sortie de prison à se loger, alors qu'il manque en France un million de logements pour que chacun ait un toit ? », interroge-t-il, se demandant aussi s'il est juste de faire peser sur les gens du voyage une condamnation pénale pour installation sur la propriété d'autrui, « alors que deux lois successives qui obligent les municipalités à créer des aires d'accueil ne sont pas respectées ». Sans qu'il soit, d'ailleurs, question de sanctions à l'encontre des communes n'appliquant pas ces textes...
(1) Voir ASH n° 2279 du 4-10-02.
(2) Alerte c/o Uniopss : 133, rue Saint-Maur - 75011 Paris - Tél. 01 53 36 35 00.