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Créer une nouvelle possibilité de levée du secret professionnel : « superflu », voire « dangereux »

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Selon nos informations, le gouvernement se proposerait d'intégrer, dans son projet de loi sur la sécurité intérieure (1), une disposition venant modifier l'article 226-14 du code pénal et dépénalisant la rupture du secret professionnel auquel sont tenus les personnels de la santé et de l'action sociale lorsqu'ils « informent l'autorité préfectorale de la dangerosité des personnes qui les consultent et dont ils ont connaissance qu'elles détiennent ou sont susceptibles de détenir une arme ». Interrogée par les ASH, l'Association nationale des assistants de service social (ANAS)   (2) s'oppose à ce projet. Les explications de son président, Didier Dubasque.

« Ce projet de modification du code pénal nous inquiète vivement, car il remettrait en cause le secret professionnel sous couvert de “dangerosité”, une notion particulièrement floue et subjective qui permet tous les excès. Dans le contexte actuel de médiatisation d'affaires mettant en cause des personnes visiblement déséquilibrées, il ne faut pas céder à l'émotion. Chaque fois, les services de police connaissaient déjà les auteurs de ces actes de violence. « Il est bien évident, en cas de menace connue et mettant en danger une vie humaine, que l'assistant social, comme tout travailleur médico-social soumis au secret, ne reste pas les bras croisés. Il agit dans le cadre d'une institution et se réfère à l'article 223-6 du code pénal, qui fait obligation à toute personne de protéger son semblable. Dans ce cadre, les professionnels sont tenus de prendre les mesures qui s'imposent en matière de protection. Les textes actuels sont suffisamment explicites. « Rajouter une possibilité de levée du secret professionnel pour des motifs tels que la “dangerosité” et le fait d'être “susceptible de posséder une arme” est totalement superflu. Cela risque d'augmenter la confusion et de mettre les travailleurs sociaux dans une position d'informateurs des services de police ou de gendarmerie. Or les travailleurs sociaux ne sont pas, et ne peuvent pas être, des auxiliaires de police. A chacun son métier. Cela n'empêche pas les liens entre les uns et les autres. Dans la pratique courante, les assistants de service social et les travailleurs médico-sociaux coopèrent avec la gendarmerie et la police de façon correcte dans le respect des différentes règles professionnelles. Les éléments en notre possession, et notamment les appels téléphoniques reçus lors des permanences tenues par notre association, ne révèlent pas de tensions ni d'affaires particulières dans nos institutions qui justifient le changement de la loi. « Par contre, nous avons connaissance de prises de position publiques de représentants de l'Etat qui manifestent leur intérêt d'être informés par les travailleurs sociaux qui suivent des familles dites “à risque”, avec des adolescents auteurs d'actes de délinquance. Dans la Gironde, par exemple, un sous-préfet s'est exprimé dans la presse pour regretter que “les services sociaux placent des personnes à problématiques sociales lourdes dans une commune sans prévenir qui que ce soit” et que ces publics ne soient pas logés à proximité des centres médico- sociaux. Pourquoi pas à côté des prisons ! « Nous travaillons auprès des usagers de nos services dans le cadre d'une relation de confiance, parce que nous respectons l'intimité des personnes et la confidentialité des informations qu'elles nous donnent. Détruire ce lien en nous déliant du secret professionnel avec des prétextes sécuritaires est dangereux. Et ce n'est pas faire preuve d'angélisme. En fait, un tel projet reflète d'une méconnaissance totale du travail social. Nous pouvons déjà agir et protéger les personnes en danger avec les textes actuels. Appliquons-les. Ne soyons pas dupes de cette volonté de nous inscrire dans une pensée sécuritaire. Elle peut, à terme, nous empêcher de mener à bien nos missions. » Propos recueillis par Céline Gargoly

Notes

(1)  Lequel a déjà suscité de nombreuses craintes. Voir ASH n° 2279 du 4-10-02.

(2)  ANAS : 15, rue de Bruxelles - 75009 Paris - Tél. 01 45 26 33 79.

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