Le décret signé par le garde des Sceaux et le ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie relatif au solde bancaire insaisissable (SBI) (couramment appelé « revenu minimum d'insertion bancaire » ), imaginé par le précédent gouvernement dans le cadre du plan de lutte contre les exclusions (1), est paru. Il entrera en vigueur le 1erdécembre.
Le texte, d'une lecture difficile, laisse place à deux interprétations. L'administration devrait, d'ici à son entrée en vigueur, apporter les éclaircissements nécessaires.
Initialement, il s'agissait de clarifier les règles complexes de la procédure d'insaisissabilité de sommes portées sur le compte bancaire (salaire, minima sociaux, retraite...) d'une personne faisant l'objet d'une saisie et qui ne pouvait, en pratique, les obtenir immédiatement. Et pour ce faire, de mettre immédiatement à sa disposition une somme - forfaitaire -considérée comme alimentaire. Au bout du compte, le décret prévoit effectivement qu'une personne dont le compte fait l'objet d'une saisie, a la possibilité de demander à sa banque de débloquer une somme (à titre alimentaire) qui ne peut excéder ni le montant (mensuel) du revenu minimum d'insertion pour un allocataire (405,62 € depuis le 1er janvier 2002), ni le solde créditeur de son compte au jour de la demande. Mais il l'insère dans la réglementation générale des procédures insaisissables.
Aussi, deux lectures sont-elles possibles. La première est que cette mise à disposition devient un droit pour toute personne faisant l'objet d'une saisie sur compte bancaire. La seconde cantonne ce droit aux personnes ayant déjà, sur leur compte bancaire, des sommes à caractère insaisissable.
Quoi qu'il en soit, certaines dispositions du décret sont indiscutables. Le montant - forfaitaire - mis à la disposition de la personne ne sera pas nécessairement égal au revenu minimum d'insertion, si le solde de son compte ne le lui permet pas. Et s'il le peut, rien ne l'empêche de demander moins.
Ensuite, la mise à disposition sera immédiate, car le demandeur n'aura pas à prouver qu'il y a droit. Mais elle ne sera pas automatique. Concrètement, l'intéressé devra dans les 15 jours suivants la saisie, en faire la demande à la banque, au moyen d'un formulaire (dont le modèle est fixé par arrêté ministériel) annexé à l'acte de dénonciation de la saisie, ou adressé sur sa requête. Une copie de la demande sera envoyée au créancier.
En outre, le texte ne remet pas en cause les mécanismes existants de protection des sommes insaisissables. Il prévoit simplement une articulation entre eux. Ainsi, la somme à caractère alimentaire mise à disposition est déduite des montants ultérieurement versés au titre des créances insaisissables (2) que le débiteur peut faire valoir sur justificatifs (en général, plus élevées). Et ce, qu'il s'agisse de créances à échéances périodiques (rémunérations du travail, pensions de retraite, sommes payées au titre des allocations familiales ou des indemnités de chômage...) non périodiques (capital-décès...) ou tout autre créance insaisissable (minima sociaux, pensions alimentaires...). A l'inverse, les sommes insaisissables mises à la disposition du titulaire du compte viennent en déduction de la somme alimentaire qu'il pourrait ultérieurement demander.
Une seule demande pourra être faite par saisie, y compris en cas de pluralité de comptes, ou de pluralité de titulaires de comptes. Néanmoins, en cas de nouvelle saisie, la procédure pourra être renouvelée après l'expiration d'un délai de un mois à compter de la précédente demande.
Enfin, il est prévu que si le titulaire du compte se fait remettre, dans le mois qui suit la saisie, un montant supérieur à celui qui peut être mis à sa disposition, il peut être condamné - sans préjudice des sanctions pénales éventuelles - sur demande du créancier, à la restitution des sommes indûment perçues et à des dommages-intérêts.
(1) Voir ASH n° 2225 du 24-08-01.
(2) Le décret n'envisage pas la situation d'un compte entièrement alimenté par des sommes saisissables.