« La situation des sans-papiers, problème récurrent en France, ne constitue pas une particularité nationale. Partout en Europe, les mêmes personnes en situation de détresse attendent un sort meilleur. C'est bien à ce niveau que les questions se posent, et c'est bien l'Europe qui devrait y répondre. » Fortes de ce constat, une quinzaine d'associations (1) ont lancé, le 13 septembre, une campagne européenne pour la régularisation de tous les sans-papiers en Europe. Regrettant qu'au Conseil européen de Séville, en juin (2), il n'ait été fait nulle mention des droits des « résidents de fait, appelés ici “sans-papiers”, là “clandestins” », les organisations signataires estiment « inadmissible de tolérer que ces personnes, pour certaines depuis des années parmi nous, restent exclues de tout ce qui fonde la citoyenneté, vivent dans la crainte permanente d'être refoulées, se voient privées de droits élémentaires et soient la proie de criminels de toutes sortes ». A ceux qui les taxent d' « irréalisme », elles répondent en outre : « Les sans-papiers européens sont là parce qu'ils trouvent à s'embaucher et s'ils avaient de véritables droits, ils pourraient cotiser aux systèmes de protection sociale et beaucoup créeraient des activités et des emplois. Le risque de provoquer “un appel d'air” n'a, lui, jamais été démontré. » Elles réclament donc un titre de séjour pour tous les résidents de fait sur le territoire de l'Union, un statut de résident européen, l'intégration dans les principes de l'Europe du droit à la liberté de circulation pour tous, ressortissants européens ou non, et, dans l'immédiat, une directive européenne obligeant les Etats membres à une régularisation de tous.
De régularisation, il n'a même pas été question, ce jour-là, à Copenhague, lors de la réunion des ministres européens de la Justice et de l'Intérieur. Lesquels ont examiné -outre l'harmonisation des définitions du réfugié - les moyens de mettre en place une politique commune de rapatriement pour les immigrants illégaux et les demandeurs d'asile déboutés (3). Le sommet de Séville leur a d'ailleurs donné mandat pour adopter d'ici à la fin de l'année un tel programme. La commission européenne, de son côté, a exprimé son intention de présenter en octobre une proposition générale sur le sujet, comportant notamment des éléments sur le financement et des normes communes pour garantir les retours.
En attendant, les mouvements de sans- papiers en Europe esquissent des rapprochements. Plusieurs collectifs devraient ainsi se retrouver le 21 septembre à Berlin pour essayer de poser les bases d'une convergence de leurs luttes. En France, la mobilisation continue. Refusant le principe du réexamen des dossiers au cas par cas adopté par le gouvernement, environ 150 sans-papiers ont réoccupé pendant quelques heures, le 15 septembre, l'église Saint-Ambroise, lieu de la première occupation parisienne en mars 1996. De nouvelles occupations devraient avoir lieu tous les dimanches jusqu'à ce que les sans- papiers obtiennent satisfaction, a annoncé Romain Binazon, l'un des porte-parole de la Coordination nationale.
(1) Parmi lesquelles Droits devant ! !, le Centre d'études et d'initiatives de solidarité internationale (Cedetim), la Coordination nationale des sans-papiers, la Fédération des associations de soutien aux travailleurs immigrés (FASTI), le Groupe d'information et de soutien des immigrés (GISTI)... Deux associations étrangères, SOS Racismo (Portugal) et Immigration Law Practitioners' Association (Grande Bretagne), figurent également parmi les premiers signataires. Contact : GISTI : 3, villa Marcès - 75011 Paris - Tél. 01 43 14 84 84.
(2) Voir ASH n° 2269 du 28-06-02.
(3) Voir ce numéro.