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La loi Perben est votée mais déférée devant le Conseil constitutionnel

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Le Parlement a définitivement adopté, le 3 août 2002, le projet de loi d'orientation et de programmation pour la justice, présenté par le garde des Sceaux comme l'un des «  deux piliers  » de la politique du gouvernement en matière de sécurité, le second étant celui sur la sécurité intérieure défendu par Nicolas Sarkozy (1). Très critiqué (2), notamment sur son volet délinquance des mineurs, le texte fait, sans surprise, l'objet de deux recours de l'opposition, qui conteste la plupart des mesures, devant le Conseil constitutionnel. Sous réserve de la décision de ce dernier, qui devrait intervenir d'ici au 6 septembre, en voici les principales dispositions.

Un effort budgétaire renforcé en faveur de la Justice

La loi prévoit, sur la période 2003-2007, la création de 10 100 emplois, dont 1 250 dans les services de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ). Une dotation de 3,65 milliards d'euros supplémentaires est programmée sur cette période pour couvrir le coût de ces nouveaux postes ainsi que, notamment, le fonctionnement des juridictions et des services chargés de l'exécution des décisions de justice. En outre, 1,75 milliard d'euros sera dédié à la construction d'établissements pénitentiaires (11 000 places).

Le durcissement de la justice des mineurs

Au cœur du texte, les dispositions sur les mineurs délinquants, qui modifient l'ordonnance du 2 février 1945.

La mesure phare : la création de centres éducatifs fermés, établissements publics ou privés habilités dans lesquels les mineurs sont placés en application d'un contrôle judiciaire ou d'un sursis avec mise à l'épreuve. Les mineurs y feront l'objet de mesures de surveillance et de contrôle permettant d'assurer un suivi éducatif et pédagogique renforcé et adapté à leur personnalité. S'ils violent les obligations auxquelles ils sont astreints, ils pourront être placés en détention provisoire ou emprisonnés dans le cas où ils ont déjà été jugés. A la sortie du centre éducatif renforcé, quelle qu'en soit la cause, « le juge des enfants prend toute mesure permettant d'assurer la continuité de la prise en charge éducative du mineur en vue de sa réinsertion durable dans la société ». Pendant le placement, les allocations familiales versées pour le mineur délinquant sont suspendues. Toutefois, le juge peut les maintenir lorsque la famille participe à sa prise en charge morale ou matérielle ou en vue de faciliter son retour chez lui. D'ici à 2007, 600 places en centres éducatifs fermés seront créées et mises sous la responsabilité de la protection judiciaire de la jeunesse.

Parmi les autres mesures adoptées, figure la possibilité de prononcer des sanctions éducatives à l'encontre des mineurs dès l'âge de 10 ans (confiscation de l'objet ayant servi à commettre l'infraction, mesure d'aide ou de réparation, suivi d'un stage de formation civique...). Jusqu'à présent, les mineurs de 10 à 13 ans ne pouvaient faire l'objet que d'une mesure éducative. Si l'enfant ne respecte pas la sanction, le tribunal pourra prononcer son placement en établissement. Par ailleurs, devant la progression du nombre de mineurs de moins de 13 ans mis en cause dans un crime ou un délit, la loi assouplit les conditions de leur retenue à disposition d'un officier de police judiciaire (3).

Une procédure spécifique de placement sous contrôle judiciaire des mineurs âgés de 13 à 18 ans est également mise en place. En particulier, pour les moins de 16 ans, ce contrôle ne peut prendre la forme, en matière correctionnelle, que d'un placement en centre éducatif fermé. En outre, la loi autorise le placement en détention provisoire d'un mineur dès 13 ans (au lieu de 16) en cas de non-respect du contrôle judiciaire. Ce qui rend la détention provisoire également possible en cas de délit.

Relevons enfin l'instauration d'une procédure de jugement rapide pour les mineurs déjà connus de la justice et encourant une peine d'emprisonnement d'au moins trois ans. Ainsi que la possibilité d'assortir le sursis avec mise à l'épreuve d'un placement en centre éducatif renforcé.

Parallèlement à cette réforme de l'ordonnance de 1945, la loi punit désormais de six mois d'emprisonnement et de 7 500  € d'amende l'outrage à un enseignant ou un membre du personnel éducatif, commis à l'intérieur ou aux abords d'un établissement scolaire ou éducatif.

La création d'une justice de proximité

La loi pose les fondements d'une justice de proximité, appelée à traiter les petits litiges en matière civile (affaire n'excédant pas 1 500 €) et, en matière pénale, les contraventions qui seront précisées par décret. 3 300 juges de proximité, dont le statut doit être fixé par une loi organique (voir ci-dessous), seront recrutés dans les cinq ans à venir. Il seront également compétents à l'égard des mineurs s'agissant des contraventions de police des quatre premières classes.

L'amélioration des droits des victimes

Dorénavant, les victimes d'infractions qui souhaitent se constituer partie civile pourront demander, dès leur première audition par les services d'enquête, à être assistées par un avocat. En outre, les victimes des crimes les plus graves et leurs ayants droit pourront bénéficier de l'aide juridictionnelle sans condition de ressources.

Les autres mesures

La procédure d'hospitalisation et les droits des détenus atteints de troubles mentaux, jusqu'alors régis par des dispositions réglementaires, sont désormais inscrits dans la loi. Ainsi, un chapitre du code de la santé publique édicte notamment le principe selon lequel l'hospitalisation, volontaire ou non, d'un détenu présentant des troubles psychiatriques doit avoir lieu dans un établissement de santé, au sein d'une unité spécialement aménagée. Et non plus dans les services médico-psychologiques régionaux implantés en milieu pénitentiaire (4). En outre, l'hospitalisation sous contrainte d'un détenu n'est autorisée que s'il nécessite des soins immédiats assortis d'une surveillance constante en milieu hospitalier, et si ses troubles mentaux rendent impossible son consentement et constituent un danger pour lui-même ou pour autrui.

Plus généralement, pour permettre aux détenus d'améliorer leurs conditions de détention, la loi supprime, à compter du 1er janvier 2003, le prélèvement pour frais d'entretien opéré, le cas échéant, sur le produit de leur travail. Une disposition conforme aux préconisations du récent rapport Loridant (5). En outre, une nouvelle forme de travail en prison est créée, les détenus étant autorisés à travailler pour leur propre compte.

Par ailleurs, les conditions de placement sous surveillance électronique sont aménagées  : le bracelet devient une des modalités du contrôle judiciaire des personnes mises en examen, et n'est donc plus réservé à celles déjà condamnées. En revanche, la possibilité d'effectuer une détention provisoire sous ce régime, introduite par la loi du 15 juin 2000, est supprimée. Par ailleurs, la mise en œuvre du dispositif technique permettant le contrôle à distance de l'intéressé (6), jusqu'alors assurée par des fonctionnaires de l'administration pénitentiaire, peut désormais être confiée à une personne de droit privé habilitée.

Enfin, pour améliorer l'efficacité de la procédure pénale, plusieurs points de la loi du 15 juin 2000 sur la présomption d'innocence sont une nouvelle fois aménagés (7).

(Loi à paraître)
Notes

(1)  Voir ce numéro.

(2)  Sur les réactions des associations, voir ce numéro.

(3)  Seuls les mineurs de 13 ans et plus peuvent faire l'objet d'une garde à vue de 24 heures.

(4)  Voir ce numéro.

(5)  Voir ASH n° 2269 du 28-06-02.

(6)  Voir ASH n° 2272 du 19-07-02.

(7)  Voir ASH n° 2252 du 1-03-02.

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