L'affaire des dysfonctionnements du foyer Saint-Nicolas Accueil, à Villeneuve-sur-Yonne (Yonne), pose à nouveau la question de la prise en charge en établissement des personnes lourdement handicapées. Et, la difficulté à repérer et prévenir les violences à l'égard des usagers qui interrogent tout à la fois le fonctionnement institutionnel, la qualification des personnels, les moyens, le contrôle exercé par les autorités de tutelle...
Dans cette affaire (1), il aura fallu près d'un an à l'Association française contre les myopathies (AFM) (2) - aujourd'hui soutenue par l'Association des paralysés de France -, qui dénonçait des manquements, brimades, humiliations à l'égard des résidents, pour obtenir, le 24 mai 2002, du préfet de l'Yonne, la fermeture provisoire du foyer à double tarification Saint-Nicolas Accueil (géré par l'association éponyme) et la nomination pour trois mois d'un administrateur. Les termes de l'arrêté sont clairs : « La santé, la sécurité et le bien-être physique et moral des résidents se trouvent compromis par une organisation et un fonctionnement défaillants » et il y a lieu de prendre « d'urgence les mesures nécessaires à la protection des personnes accueillies ». Par ailleurs, la situation est jugée suffisamment préoccupante pour que le ministère de la Santé, de la Famille et des Personnes handicapées ordonne une mission de l'inspection générale des affaires sociales dans cet établissement.
Ouvert en 1996, Saint-Nicolas Accueil accueille 44 adultes souffrant de handicaps lourds, myopathes et polyhandicapés. Alertée par certains agissements, comme le cas de ce jeune patient dont le système de ventilation assistée avait été débranché, l'AFM était intervenue en juin 2001 auprès du préfet de l'Yonne et du ministère de la Santé. Le rapport d'inspection de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales, rendu public en novembre 2001, relevait « une organisation de soins perfectible, une gestion des ressources humaines opaque et conflictuelle, des manquements graves au respect des droits et de la dignité des usagers ». Et elle proposait 19 mesures pour mettre fin aux dysfonctionnements. En février 2002, une nouvelle directrice était nommée à la tête de l'établissement... avant d'être licenciée trois mois plus tard par l'association gestionnaire. Dans un rapport transmis au conseil d'administration extraordinaire de l'association le 15 avril 2002, elle concluait à « l'incapacité de l'institution à permettre aux personnels d'exercer leurs missions dans des conditions satisfaisantes ». Elle est aujourd'hui réintégrée pour gérer l'établissement sous le contrôle de l'administrateur.
Les responsables évincés du foyer nient, quant à eux, tout mauvais traitement. Et ils ont décidé d'attaquer en justice l'arrêté préfectoral « On a essayé d'être humain avec nos erreurs, nos travers mais sans méchanceté, parce qu'avant tout on voulait que nos résidents vivent bien », a déclaré à l'Agence France presse, le 26 mai, l'ex-président fondateur de l'association, Michel Gigault. De son côté, l'AFM a l'intention de le poursuivre ainsi que l'association Saint- Nicolas Accueil devant le tribunal de grande instance de Sens pour les dommages causés par les dysfonctionne- ments.
(1) Pour plus d'informations, voir
(2) AFM : 1, rue de l'Internationale - BP 59 - 91002 Evry cedex - Tél. 01 69 47 28 28.