« Ce matin, lundi 12 mai 2002, je suis allée à l'ANPE pour consulter les offres d'emplois proposées à l'affichage, et j'en ai profité pour lire les ASH. Au fil des pages, je lis avec un grand intérêt l'article intitulé “Vers un travail social sans travailleurs sociaux ?” (2) [...].
« Sur ce sujet, je voudrais témoigner de mon expérience.
« Il y a peu de temps, j'ai posé ma candidature au poste de coordinateur de secteur adulte dans un centre social intervenant dans un canton. Lors de l'entretien, le dialogue mon- tre que la manière dont j'envisage le poste, son développement, ainsi que le centre social, intéresse fortement la direction. Les propositions que je formule correspondent à des projets en gestation ou leur paraissent très intéressantes.
« Au cours de l'entretien, j'apprends que l'intitulé du poste est revu à la baisse : “animateur d'insertion”. Dans le même temps, le nombre d'heures est augmenté, ainsi que le travail à effectuer et les responsabilités à assumer. Sur le moment, je n'ai pas réalisé toute l'incidence du changement d'intitulé. Le travail ne me fait pas peur, en outre les tâches demandées m'intéressaient fortement. Jusque-là tout va à peu près bien.
« En fait, le beau fixe tourne à l'orage quand la directrice me demande si j'ai droit aux contrats aidés type contrat emploi consolidé, parce que cela fait, me dit-elle, deux ans que je ne travaille pas. En fait, pendant ces deux années, j'ai préparé un concours et j'ai pris le temps de m'occuper de mon bébé. Cela s'appelle rester à ne rien faire !
« Je leur explique donc que je ne suis pas restée à rien faire pendant ces deux années et que, pour moi, c'est un non- sens de demander à une personne d'être qualifiée et diplômée BAC + 3, d'avoir de l'expérience (même si les débutants étaient acceptés), d'être organisée, créative, responsable - et j'en passe - pour, au bout du compte, la sous-payer.
« Pour finir, j'ai reçu une lettre m'indiquant que, malgré un “excellent entretien”, le centre social ne pouvait pas me recruter. Ce qui signifie qu'une personne qualifiée a accepté de voir ses compétences bradées en recevant un SMIC pour un poste qui mérite au moins 8 000 à 10 000 F- pardon, 1 200 à 1 524 €. Ou qu'une personne non qualifiée a été recrutée pour ce poste, ce qui va au détriment de la prestation proposée.
« Tout cela pour vous dire qu'il faudrait que les employeurs réagissent et se posent les bonnes questions : ce n'est pas une crise des vocations à proprement parler. Le travail social a de l'avenir et les travailleurs sociaux qualifiés sont présents. Encore faut-il leur proposer un salaire décent et motivant.
« Comment voulez-vous inciter une personne à faire du bon travail, à s'investir, même au-delà du temps réglementaire, si au départ l'employeur pense à ses finances et non pas à l'efficacité du travail effectué ?
« S'il faut une image pour mieux expliquer, je dirai ceci : demandez à une personne en difficulté d'insertion de faire de multiples efforts pour finalement lui refuser ce pour quoi elle a travaillé. Imaginez sa réaction, il y a de quoi être dégoûté et, soit elle ne fait plus d'effort et se laisse assister, soit elle décide de s'en sortir autrement. Quelle belle image du travail social à la fois pour cette personne, mais aussi pour toutes celles qui l'ont aidée ! [...]
« Enfin, je voudrais rappeler que les contrats aidés sont destinés aux personnes en difficulté et non qualifiées, car l'employeur a l'obligation de financer une formation pour cet employé. [...] »
(1) Contact : 13, rue des Goélands - 17690 Angoulins- sur-Mer - Tél. 05 46 43 42 60.
(2) Voir ASH n° 2259 du 19-04-02.