Une circulaire du ministère de la Justice précise la nouvelle procédure d'assistance éducative, fixée par décret, qui entrera en vigueur au 1er septembre (1).
Elle rappelle ainsi qu'avant toute mesure d'information (enquête sociale, examens médicaux...) ordonnée par le juge des enfants ou mesures provisoires (tel un placement), les parties doivent être entendues par le magistrat, sauf situation d'urgence spécialement motivée. Par là, il faut entendre le « cas d'impossibilité matérielle de convoquer les familles (hospitalisation, incarcération, disparition des parents laissant les mineurs livrés à eux-mêmes...) ou de nécessité de protection immédiate du mineur », note la circulaire.
Au-delà, l'administration revient longuement sur les modalités concrètes de communication des dossiers d'assistance éducative. Pour mémoire, la nouvelle réglementation a ouvert un accès direct aux dossiers aux parents, au tuteur, à la personne ou au représentant du service à qui l'enfant a été confié et aux mineurs capables de discernement. Ainsi qu'aux services éducatifs. Toutefois, elle a posé une exception de prudence consistant à autoriser le juge, en l'absence d'avocat, à écarter, par décision motivée, certaines pièces de la consultation lorsque celle-ci ferait courir un danger physique ou moral grave au mineur, à une partie ou à un tiers. Cette décision est susceptible de recours, explique le ministère. Lequel ajoute que des situations particulières (secrets de famille liés notamment à une question de filiation, troubles mentaux, violences graves...) appréciées concrètement pourront justifier d'écarter ces pièces jusqu'à la création d'un contexte favorable (travail éducatif, audience). Il évoque également la situation des familles recomposées « dans lesquelles les parents ne sont concernés qu'en fonction des différentes filiations » et admet l'exclusion des pièces comportant des informations sur la vie privée, l'histoire personnelle ainsi que les difficultés conjugales, médicales ou personnelles de chacun.
S'agissant des mineurs capables de discernement, cette consultation ne peut avoir lieu qu'en présence de l'un des parents ou de son avocat. Cette exigence « doit prévaloir, y compris en cas de désaccord des parents », insiste la circulaire, en rappelant qu'en cas d'opposition des parents à la consultation du dossier et en l'absence d'avocat, le juge fera désigner un avocat d'office au mineur ou autorisera le service éducatif à l'accompagner.
Quant aux services éducatifs (exerçant une mesure d'investigation ou d'assistance éducative en milieu ouvert), leur accès au dossier est prévu selon les mêmes conditions que celles fixées pour les parties. « Cette disposition nouvelle entérine une pratique courante des cabinets de juges des enfants qui, compte tenu de l'intérêt qui s'attache pour ces professionnels à la connaissance des éléments des dossiers en vue de l'exercice de la mission qui leur a été confiée, autorise cette consultation de la façon la plus souple possible. »
En pratique, les intéressés pourront consulter directement leur dossier au greffe du tribunal pour enfants après en avoir fait la demande auprès du magistrat. Aucun formalisme n'étant exigé pour cette requête. Conformément aux principes généraux de la procédure civile, un interprète pourra être désigné par ordonnance pour permettre aux parties d'avoir accès à la consultation, indique la circulaire. Alors que le dossier peut être consulté aux jours et heures fixés par le juge, la circulaire recommande d'établir un planning et d'organiser une gestion des rendez-vous. Ces derniers pourront être pris par les parties sous toutes formes (appel téléphonique, écrit ou fax). Pour ce qui est de la surveillance des consultations, elle devra être confiée aux fonctionnaires qui assistent habituellement le magistrat à l'audience. La consultation devra être organisée en fonction de la disponibilité des locaux. Toutefois, les chefs de juridiction veilleront « avec une particulière attention » à ce que soit mis à la disposition des familles un espace suffisant permettant la confidentialité. Et « des locaux suffisamment vastes faciliteront l'accueil simultané de plusieurs familles ».
Au final, « cette réforme va nécessairement bouleverser les pratiques tant des juridictions que des services éducatifs », conclut Marylise Lebranchu. Laquelle ajoute que cette rénovation « demandera aux services éducatifs un effort particulier sur la qualité de leurs écrits et leur argumentation ainsi qu'une plus grande rigueur pour la remise de leurs rapports qui devra intervenir dans des délais raisonnables et non par fax le jour même de l'audience, sous peine de faire échec à la consultation des dossiers par les familles ». La ministre de la Justice poursuit en notant que cette nouvelle procédure s'appliquera d'autant mieux que cette exigence de contradictoire sera comprise en amont par les services éducatifs eux-mêmes à l'occasion d'une présentation et d'une explication de leur rapport et de ses conclusions aux parties. Afin d'accompagner la réforme et éventuellement d'aider les familles, les conseils départementaux d'accès au droit pourront être mobilisés, conclut la garde des Sceaux.
(1) Voir ASH n° 2255 du 22-03-02.