Est-ce le fruit de plusieurs années d'embellie économique ? Toujours est-il que les Français, si l'on en croit le sondage réalisé par l'institut CSA à la demande du collectif Alerte (1) et du quotidien La Croix, et rendu public le 12 mars, sont moins nombreux à se déclarer prêts à aider les exclus qu'en 1998 (39 %, contre 43 %), et plus nombreux à se montrer méfiants à leur égard (20 % contre 13 %).
L'exclusion demeure cependant « une préoccupation majeure » des Français, commente Alerte, puisque 55 % redoutent de devenir à leur tour des exclus, taux qui varie peu depuis le premier sondage de cette sorte, en 1993. En outre, 69 % estiment que le problème de l'exclusion n'est pas moins grave actuellement qu'il y a quelques années. Ce qui a conduit le collectif Alerte à s'inquiéter, dans un courrier daté du 7 mars adressé aux candidats à l'élection présidentielle, de la quasi-absence de la lutte contre l'exclusion dans les propositions de la campagne. Les associations « vous demandent de vous engager clairement à lutter contre toutes les causes d'exclusion », leur ont-elles écrit (2).
Autre sujet peu abordé jusqu'à présent dans le débat électoral, l'emploi. Alors que pour les Français, être exclu, c'est avant tout être sans travail (48 %), puis sans logement (41 %). Ils sont d'ailleurs 88 % à approuver l'idée d'une couverture logement universelle, sur le modèle de la couverture maladie universelle. Laquelle est plébiscitée : 69 % la jugent efficace, tandis qu'ils ne sont que 33 % à porter une telle appréciation sur la loi de lutte contre les exclusions, il est vrai plus diffuse et moins facile à cerner par le grand public.
Le baromètre a également mesuré le crédit qu'accordent les sondés aux diverses institutions impliquées dans le combat contre la pauvreté. Seulement 36 % font confiance à l'Etat... alors que les trois quarts demandent une plus grande mobilisation de l'argent public dans cette lutte. En revanche, la confiance est grande dans les travailleurs sociaux (79 %, contre 70 % en 1998), les associations d'aide aux exclus (75 %), l'école (60 %). C'est cette dernière dont il faudrait prioritairement renforcer les moyens pour combattre efficacement l'exclusion, estiment 60 %des personnes interrogées. Une mesure qui vient devant la réquisition de logements vides (53 %), la réduction des charges sociales des entreprises (44 %), l'augmentation des minima sociaux (40 %).
A noter que 52 % des sondés jugent que les demandeurs d'asile ne doivent pas être mieux accueillis en France. « Sur ce point, l'opinion est d'accord avec les pouvoirs publics », souligne, amer, Raymond Kohler, secrétaire général de la Fédération nationale des associations de réinsertion sociale.
(1) C/o Uniopss : 133, rue Saint-Maur - 75541 Paris cedex 11 - Tél. 01 53 36 35 00.
(2) Le Secours catholique, membre du collectif, lance par ailleurs, entre le 18 et le 31 mars, une campagne de mobilisation intitulée « Candidat : tu m'écoutes ? ». Quatre camions vont sillonner la France et stationner au cœur des villes, invitant le public à voter sur des propositions émises par l'association notamment sur l'accès aux droits pour tous, l'habitat et son environnement, l'emploi et les demandeurs d'asile. Le résultat de ces votes sera remis aux candidats au second tour. Secours catholique : 106, rue du Bac - 75007 Paris - Tél. 01 45 49 73 00.