Fierté de Ségolène Royal, la loi relative à l'autorité parentale a été définitivement adoptée le 21 février par le Parlement. La ministre déléguée à la famille, à l'enfance et aux personnes handicapées aura donc réussi à passer outre les embûches semées par certains sénateurs, en particulier sur la question de la prostitution des mineurs.
La loi donne, en premier lieu, une nouvelle définition de l'autorité parentale. Elle réaffirme que celle-ci est un ensemble de droits et de devoirs, sa finalité étant l'intérêt de l'enfant. Et associe plus étroitement l'enfant aux décisions qui le concernent, suivant son âge et sa maturité.
La loi cherche également à rendre plus lisible le principe de l'égalité entre tous les enfants et l'égale responsabilité entre le père et la mère quel que soit leur statut de couple. Elle instaure un droit commun de l'autorité parentale en regroupant au sein d'un chapitre unique du code civil l'ensemble des règles relatives à l'exercice de l'autorité parentale. Il s'applique à tous les enfants quelles que soient les circonstances de la naissance. Le juge peut prendre toute mesure permettant de garantir l'effectivité et la continuité du lien de l'enfant avec ses deux parents.
Dans ce cadre, la condition de communauté de vie exigée au moment de la reconnaissance d'un enfant naturel pour l'attribution de l'autorité parentale conjointe est supprimée. Les parents non mariés exercent désormais automatiquement l'autorité parentale, dès lors qu'ils ont tous deux reconnus l'enfant dans la première année de sa naissance. Par ailleurs, le principe de la résidence alternée chez chacun de ses parents acquiert une valeur légale.
Des assouplissements sont prévus pour favoriser et donner toute leur force aux accords négociés entre les parents : possibilité d'exécution en nature de l'obligation alimentaire, déductibilité fiscale des pensions alimentaires fixées à l'amiable. En outre, l'enfant devient ayant droit de ses deux parents pour la sécurité sociale.
Par ailleurs, la médiation familiale fait son entrée dans le code civil. En effet, afin de faciliter la recherche par les parents d'un exercice consensuel de l'autorité parentale, le juge peut leur proposer une mesure de médiation et, après avoir recueilli leur accord, désigner un médiateur familial. Il peut également leur enjoindre de rencontrer un médiateur familial qui les informera sur l'objet et le déroulement de cette mesure. Rappelons que, d'ores et déjà, un diplôme de médiateur familial est en préparation (1).
La loi détermine, par ailleurs, un nouveau régime pour les relations de l'enfant avec ses ascendants et des tiers (notamment un beau-parent). Il affirme que l'enfant a le droit d'entretenir des relations personnelles avec ses ascendants. Si tel est l'intérêt de l'enfant, le juge aux affaires familiales fixe les modalités de relations entre l'enfant et un tiers, parent ou non.
Dans le droit-fil de la loi du 3 décembre 2001 relative au droit successoral (2), la loi supprime également toutes les discriminations entre les enfants légitimes, naturels et adultérins. Elle pose, en effet, le principe de l'égalité de tous les enfants dont la filiation est légalement établie dans leurs rapports avec leurs père et mère et vis-à-vis de la famille de chacun d'eux.
En outre, l'acte de reconnaissance d'un enfant naturel est solennisé. A cette occasion, lecture sera faite aux parents ou futurs parents des principales dispositions du code civil relatives à l'autorité parentale et aux droits et devoirs des parents.
Pour garantir la continuité et l'effectivité du maintien des liens de l'enfant avec ses deux parents, la loi prévoit que le juge aux affaires familiales peut décider l'inscription sur le passeport des parents de l'interdiction d'une sortie du territoire français sans l'autorisation des deux parents.
Par ailleurs, les peines encourues par le parent qui enlève un enfant sont aggravées. Elles sont portées de deux à trois ans d'emprisonnement et de 30 000 € à 45 000 € à l'égard du parent qui soustrait un enfant des mains de ceux qui exercent l'autorité parentale ou auxquels il a été confié ou chez qui il a sa résidence habituelle.
Dans un autre registre, la loi sanctionne désormais la détention d'une image pornographique de mineurs de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 €. Jusqu'à présent, ces faits pouvaient être poursuivis uniquement en cas de recel. La loi incrimine également le recours à la prostitution de mineurs de 15 à 18 ans. Pour mémoire, seuls les clients de mineurs prostitués de moins de 15 ans étaient jusque-là pénalement sanctionnables. La loi interdit donc la prostitution des mineurs sur tout le territoire français. Et affirme que tout mineur qui s'y livre, même occasionnellement, est réputé en danger et relève de la protection du juge des enfants au titre de la procédure d'assistance éducative. En outre, de nouvelles sanctions pénales contre les clients sont instaurées : trois ans d'emprisonnement et 45 000 € pour le seul fait de solliciter, d'accepter ou d'obtenir, en échange d'une rémunération ou d'une promesse de rémunération, des relations sexuelles de la part d'un mineur de 15 à 18 ans. Lorsqu'il s'agit de mineurs de 15 ans, les peines sont portées à sept ans et 100 000 €.
Enfin, dernière mesure annoncée lors des Etats généraux de l'enfance (3), la loi prévoit la désignation d'un administrateur ad hoc pour les mineurs étrangers isolés. En effet, en l'absence d'un représentant légal accompagnant le mineur, le procureur de la République, avisé de l'entrée du mineur en zone d'attente, lui désigne « sans délai » un administrateur ad hoc qui l'assiste pendant son maintien dans cette zone et assure sa représentation.
(1) Voir ASH n° 2247 du 25-01-02.
(2) Voir ASH n° 2242 du 21-12-01.
(3) Voir ASH n° 2238 du 23-11-01.