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Vivre au grand âge

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La dépendance est-elle inexorablement le lot des personnes âgées - et d'elles seules ?Répondre par l'affirmative reviendrait à commettre une double bévue, assure Bernard Ennuyer, directeur d'un service d'aide à domicile et responsable de la coordination gériatrique du XVIIe arrondissement de Paris dans cet ouvrage collectif. Les statistiques sont là pour attester qu'un quart seulement des plus de 85 ans connaissent des difficultés telles qu'ils ont besoin d'être aidés dans leur vie quotidienne. Mais, surtout, défend Bernard Ennuyer, la notion de dépendance repose sur un déni : celui de la souveraineté relative de tout être social inscrit dans un circuit de dépendances plus ou moins contrôlées et cachées, qui participent de la dynamique de l'échange et du don entre les personnes et les générations.

Vecteur d'exclusion, le concept servant à (dis) qualifier les personnes âgées qui vont mal, est relativement récent. Il est apparu en 1973 pour la première fois en France, sous la plume de médecins travaillant en établissements d'hébergement de long séjour. Autrefois dits « semi-valides », « invalides », ou « handicapés » - termes communs à d'autres classes d'âge -, les vieillards sont ainsi devenus « dépendants ». Malgré les nombreuses critiques qu'elle a suscitées, cette vision incapacitaire de la vieillesse s'est progressivement imposée comme le résultat de l'inéluctable processus de sénescence. Elle est ensuite entrée dans le vocabulaire des politiques et s'est vu consacrée par la mise en place d'outils servant à l'évaluer. Ainsi a été clos le débat sur ce qu'est la dépendance, explique Bernard Ennuyer. Quant à la « perte d'autonomie » qu'on lui substitue aujourd'hui, cette formulation ne lui semble pas plus heureuse puisqu'elle introduit une confusion entre l'impossibilité d'assumer seul les principales activités de la vie quotidienne et l'impossibilité de décider par soi-même de son mode de vie.

Bien sûr, aujourd'hui, les personnes vieillissantes ayant des incapacités importantes ne sont pas en mesure d'exercer cette liberté ; si elles en sont privées, cependant, ce n'est pas en raison de détériorations psychiques importantes qui n'affectent qu'une minorité d'entre elles, mais de l'insuffisance du dispositif d'aide à domicile. En cela aussi, le grand âge est menaçant : par ses incidences sur les choix de la collectivité et sa conception de l'interdépendance, c'est-à-dire de la solidarité.

Vivre au grand âge. Angoisses et ambivalences de la dépendance  - J. Chabert, B. Ennuyer, D. Grunwald, C. Gucher, P. Haehnel, M.-E. Joël - Ed. Autrement -14,95  .

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