Combien d'allocataires du revenu minimum d'insertion (RMI) cherchent un emploi ? en trouvent ? dans le secteur aidé ou sur le marché ? durablement ou non ? Quel est le degré d'insertion de ces allocataires dans leur famille, dans la société ? Quels revenus supplémentaires peuvent-ils attendre du type de travail qui leur est offert ? La différence est-elle suffisamment incitative ? La lutte contre les « trappes à inactivité » est-elle efficace ? Autant de questions qu'une dizaine de chercheurs explorent dans la revue mensuelle de l'INSEE (1).
Plus d'un million de personnes touchaient le RMI en décembre 2000 et les statistiques montrent que leur profil s'est modifié depuis son lancement en janvier 1989 : plus jeunes, plus proches du marché du travail, ils sortent aussi plus vite du dispositif que les premiers bénéficiaires. Pourtant, le devenir des allocataires était mal connu, ce qui a conduit plusieurs instituts de recherche à lancer ensemble, en 1997-1998, une grande enquête sur les sortants du RMI, qui a permis de suivre le parcours de 3 000 bénéficiaires sur une période de 21 mois. C'est cette enquête que les chercheurs exploitent aujourd'hui sous des angles variés. L'une des études montre, par exemple, que deux allocataires sur cinq n'ont jamais signé de contrat d'insertion (pourtant théoriquement obligatoire) et que le passage par un contrat d'insertion facilite l'embauche dans les emplois aidés, mais n'augmente guère les chances d'accéder à un contrat de travail ordinaire,
notamment à temps plein. Les gains à la reprise d'emploi sont souvent faibles, parfois nuls comme pour les mères de famille isolées.
L'une des études les plus intéressantes est celle de deux sociologues qui, à partir d'entretiens individuels, identifient cinq groupes très différents de bénéficiaires. Il existe un monde, en effet, entre les jeunes diplômés issus de milieu modeste qui cohabitent encore avec leurs parents et utilisent l'allocation comme aide financière à la recherche d'un premier emploi correspondant à leur qualification et les femmes chefs de familles monoparentales issues de l'immigration sans projet professionnel. Les perspectives de sortie du RMI ne sont évidemment pas les mêmes pour les uns et les autres et on aurait sans doute intérêt à relire toutes les données chiffrées à travers cette grille. « La diversité de ces situations n'avait pas été envisagée au départ par le législateur, estiment Denis Fougère et Laurence Rioux, les deux chercheurs qui présentent ce travail. Face à cette pluralité de cas, un dispositif comme le RMI est-il encore approprié ? », demandent-ils en dressant un tableau « mitigé » de l'insertion sociale et professionnelle des allocataires.
(1) Economie et Statistiques n° 346-347 - INSEE.