« La décision de placement ne répond plus à un projet éducatif. Elle est devenue un moyen de contrainte et de contrôle », résume Claude Beuzelin, secrétaire générale du Syndicat national des personnels de l'éducation surveillée (SNPES) (1). L'hébergement collectif est ainsi transformé en « un lieu de contention voire d'exécution de peine », ajoutent les personnels d'une soixantaine de structures, dans un appel solennel rédigé le 27 novembre au terme d'une « rencontre nationale des hébergements collectifs ».
« Le constat est unanime : les conditions de travail n'ont jamais été aussi difficiles » dans les différents foyers d'action éducative, les centres de placement immédiat et les centres éducatifs renforcés, commente la secrétaire générale. Et cela, malgré la forte augmentation des effectifs, passés de 6 000 à 7 300 personnes depuis trois ans. Car « l'ouverture à marche forcée de nombreuses structures perpétue, malgré les créations d'emplois, des manques de personnels dans de nombreux services », déplore le syndicat. Sans compter le turn over important qui traduit les « souffrances de trop nombreux personnels ». Un véritable « phénomène de fuite ».
Pourquoi ce malaise ? A cause de l'absence « trop fréquente » de projets de service « élaborés et maîtrisés par les équipes elles-mêmes » ou, lorsqu'ils existent, de leur manque de garantie par les responsables départementaux face aux magistrats, estime le syndicat. Les équipes sont ainsi dépossédées des projets pédagogiques « au profit de modèles uniques rédigés par l'administration centrale, découlant directement d'une commande politique » et ne garantissant plus « l'autonomie de l'action éducative ». A quoi s'ajoutent les « difficultés, voire l'impossibilité, d'instruire une relation de collaboration et de confiance réciproque avec les juridictions », et le « manque de considération » de leur propre administration.
Une fois tiré ce « constat alarmant », le syndicat formule des propositions pour « arrêter la casse, en finir avec les violences [... et] l'incohérence vis-à-vis des jeunes et des familles ». Il demande d'abord que la décision de placement soit « avant tout motivée par de réelles considérations éducatives. Un placement ne doit pas être une sanction », sous peine de totale d'inefficacité. Deuxième souhait : que le placement « puisse être travaillé, négocié, préparé » avec le mineur et sa famille (comme l'implique d'ailleurs la loi) et avec les services de milieu ouvert. « Un placement ne doit pas constituer une violence supplémentaire. » Autres résolutions : « retrouver les moyens d'une véritable autonomie éducative » et « ré-instaurer avec les magistrats une relation de collaboration et non de subordination ». Et pour cela « imposer [...] la considération professionnelle et l'attention humaine » indispensables à l'exercice d'une action éducative qui met les salariés « chaque jour en jeu » sur les plans professionnel et personnel.
En rédigeant cet appel pour « briser l'isolement », le SNPES se promet de poursuivre la réflexion pour proposer une véritable « charte de l'hébergement ». Il avoue aussi vouloir s'armer face aux « surenchères sécuritaires ».
(1) SNPES-PJJ : 54, rue de l'Arbre-Sec - 75001 Paris - Tél. 01 42 60 11 49.