C'est une loi de compromis que députés et sénateurs ont adopté définitivement, le 21 novembre, sur les droits du conjoint survivant et des enfants adultérins. Pour l'essentiel, ces dispositions entreront en vigueur le premier jour du septième mois suivant sa publication, sauf exceptions. Ce texte, issu d'une proposition de loi du député socialiste des Landes, Alain Vidalies, s'inscrit dans le cadre plus global de la réforme du droit de la famille menée par le gouvernement (1).
Outre des dispositions modernisant le droit successoral en général, la loi s'attache à améliorer le sort des conjoints successibles. Lesquels sont définis comme le conjoint survivant non divorcé, contre qui n'existe pas de jugement devenu définitif de séparation de corps.
Ainsi, en présence d'enfants communs au couple, la loi offre au conjoint successible une possibilité d'option entre un usufruit sur la totalité des biens ou un quart en pleine propriété. Antérieurement, il n'avait droit qu'à un quart en usufruit. En présence des père et mère du défunt, le conjoint survivant, qui n'obtenait jusque-là que la moitié en usufruit, recueillera désormais la moitié en pleine propriété, voire les trois quarts en pleine propriété en cas de prédécès de l'un des parents.
Par ailleurs, le conjoint survivant recueillera la totalité de la succession, et notamment de tous les biens acquis par le couple pendant le mariage en l'absence de descendants et d'ascendants privilégiés (père et mère du défunt). Il passe donc avant les collatéraux privilégiés (frères et sœurs du défunt). Toutefois, sur les biens dits de famille, entrés dans le patrimoine du défunt par succession ou donation de ses père et mère, le conjoint survivant et les collatéraux privilégiés recueilleront chacun la moitié de la succession.
Enfin, en présence de grands-parents ou d'arrière-grands- parents du défunt, le conjoint survivant obtiendra la totalité de la succession, alors qu'il ne recueillait jusque-là que la moitié en usufruit en présence d'ascendants dans les deux branches, et la moitié en propriété en présence d'ascendants dans une seule branche. En contrepartie, lorsque le conjoint survivant recueillera la totalité ou les trois quarts des biens, ces ascendants dits ordinaires, dans le besoin, bénéficieront d'une créance d'aliments contre la succession du prédécédé.
Autre innovation du texte : faire du conjoint survivant un héritier réservataire pour le quart de la succession en l'absence d'enfants et de parents du défunt.
Enfin, un pan de la loi crée un droit au logement temporaire, applicable dès l'entrée en vigueur de la loi , et un droit viager d'habitation et d'usage sur l'habitation principale au profit du conjoint survivant.
Le texte met, par ailleurs, fin au traitement discriminatoire réservé aux enfants adultérins en matière de succession. Désormais, aucun enfant ne sera pénalisé. La loi se met ainsi en conformité avec la jurisprudence européenne qui avait sanctionné la France (2).
L'entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions concernera, pour les enfants adultérins, toutes les successions ouvertes au jour de la publication de la loi et n'ayant pas abouti à un partage définitif, sous réserve des accords amiables déjà intervenus et des décisions judiciaires devenues irrévocables.
Nous reviendrons dans un prochain numéro sur la globalité de ce texte (qui comporte également des dispositions sur la prestation compensatoire, sur la couverture du risque décès en cas de suicide, sur la délivrance d'une information sur le droit de la famille dans le livret de famille) .
(1) Voir ASH n° 2202 du 16-02-01.
(2) Voir ASH n° 2153 du 11-02-00.