Il y a maintenant près de trois ans, divers établissements de crédit s'étaient attirés les foudres de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL). Laquelle s'était penchée sur le développement de la technique dite du « score », qui consistait, à partir de calculs statistiques et de probabilités, à évaluer automatiquement la capacité de remboursement d'un candidat au crédit en fonction des informations collectées sur lui : sa situation familiale, professionnelle, bancaire... mais aussi sa nationalité (Français, ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne, autre). Le but du système : permettre aux établissements de crédit de tenir compte des difficultés plus ou moins grandes de recouvrement des créances, dans l'hypothèse où le débiteur regagnerait son pays d'origine. Ce qui, dans les faits, conduisait plutôt les banques à refuser un crédit à un ressortissant étranger.
Bien que condamnée par la CNIL (1), cette pratique reçoit aujourd'hui la bénédiction du Conseil d'Etat, qui affirme qu'elle « ne constitue pas une discrimination ». La prise en compte de la nationalité d'un demandeur de prêt comme élément d'appréciation d'éventuelles difficultés de recouvrement des créances correspond ainsi, selon les sages du Palais-Royal, à la finalité du système en cause. Et constitue donc bien une « donnée pertinente, adéquate et non excessive », selon les exigences posées par la loi. Ce faisant, la Haute Juridiction annule l'interdiction posée par la CNIL, répondant ainsi aux vœux des associations représentant les banques.
Une décision pour le moins surprenante à l'heure où la France renforce sa législation anti-discrimination (2).
(1) La CNIL avait reconnu que la durée de validité du titre de séjour est une variable pertinente, « en tout cas pour les crédits comportant un long échelonnement d'amortissement » dans la mesure où elle permet de déterminer la stabilité d'un emprunteur. Mais avait jugé « qu'admettre que l'information relative à la nationalité soit pondérée différemment selon la nationalité serait considérer que celle-ci constituerait un critère pouvant déterminer de manière significative un comportement indifféremment des conditions sociales, financières ou matérielles caractérisant la situation de l'intéressé » - Voir ASH n° 2099 du 25-12-98.
(2) Voir ce numéro.