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Personnes et familles à la rue : le « coup de gueule » interassociatif

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« C

ontrairement à ce que nous demandait le ministère, nous avons décidé de ne plus nous taire. » Lassées d'être félicitées pour leur action tout en étant incitées à ne pas crier trop fort le caractère intolérable de la situation des personnes à la rue, une vingtaine d'associations (1) ont poussé publiquement un cri de colère, le 30 octobre, lors d'une journée d'action. Cette mobilisation conjointe des acteurs de l'accueil d'urgence et de l'action sociale, d'une part, et de l'accueil des étrangers, d'autre part, pour souligner combien les difficultés rencontrées par les uns et les autres sont liées et ne peuvent être résolues séparément. L'engorgement du dispositif d'accueil d'urgence - non seulement en région parisienne, mais dans toute la France -provient, pour une grande part, de la saturation complète du dispositif d'accueil spécifique pour les demandeurs d'asile (2). D'où des revendications portant sur ces deux aspects.

Mettre fin au « gâchis financier »

Sur l'hébergement d'urgence, les associations demandent aux pouvoirs publics, au-delà des efforts saisonniers, « un véritable plan national pluriannuel, d'une ampleur suffisante pour ne pas se laisser dépasser au moindre imprévu ». Un plan qui permette en outre d' « aller de l'urgence à l'insertion, par une offre d'accueil et d'accompagnement adaptée ». Il faut ainsi en finir, expliquent les organisations, « avec le bricolage, les conventions orales, sans engagement sur la durée et les moyens » et donner un « statut clair et stable » aux divers établissements :centre d'hébergement et de réinsertion sociale, centres d'accueil des demandeurs d'asile, centres provisoires d'hébergement... Les associations réclament également un hébergement et une prise en charge différenciés selon les situations - personnes isolées, familles... - et « un recours mesuré » aux chambres d'hôtel, solution « coûteuse et inadaptée pour les familles avec enfants ». Elles souhaitent, de plus, que soient établies des conditions précises de mise à disposition des bâtiments publics, en matière d'hygiène, de confort, de sécurité, de capacité, d'implantation... D'une façon générale, souligne un représentant de la Fédération de l'entraide protestante, il faut mettre fin à l' « énorme gâchis financier des dépenses pour l'accueil d'urgence : on installe des bungalows, on réquisitionne des hôpitaux et des casernes sans confort au lieu d'acheter des immeubles ou des hôtels qui pourraient être ensuite transformés en logements sociaux  ».

Pour « un réel droit d'asile en France »

Parmi les propositions concernant spécifiquement l'accueil des réfugiés - inspirées des « dix conditions minimales pour un réel droit d'asile en France » rédigées par la Coordination pour le droit d'asile (3), réunissant 15 organisations associées à cette journée -, figure évidemment « la correction des dysfonctionnements de la demande d'asile ». Le requérant, insistent les associations, doit, à chaque étape, « être effectivement entendu, disposer d'un conseil et d'un interprète au besoin, bénéficier, en cas de refus, d'une possibilité d'appel avec recours suspensif ». Elles dénoncent également des « pratiques administratives inadmissibles »  : les rendez-vous fixés par les préfectures 16 mois après le dépôt d'une demande d'asile territorial, les consignes de renvoi sur d'autres départements...

Autres exigences : un accompagnement social et juridique pour tous et partout, l'octroi aux demandeurs d'asile de ressources « d'un niveau respectant la dignité de chaque personne » - notamment d'une allocation au moins égale au revenu minimum d'insertion pendant toute la période de la procédure (4)  - et le rétablissement de l'accès au travail et à la formation professionnelle rémunérée. Pour les déboutés, que, très souvent, « l'administration ne veut ou ne peut pas [...] éloigner du territoire », les associations réclament des conditions d'existence légale et l'amélioration de l'accès effectif à leurs droits (aide médicale d'Etat...). Enfin, un appel à la vigilance a été lancé vis-à-vis des décisions prises par l'Union européenne en matière d'asile (5). La Coordination pour le droit d'asile s'inquiète de la mise en place, à ce niveau, de « mesures qui affaiblissent le système international de protection ». Elle dénonce l'esquisse d'un « statut au rabais », avec l'apparition de la notion de protection temporaire en cas d'afflux massifs.

Quel écho rencontreront ces revendications ? La délégation reçue à Matignon le même jour, notamment par Jacques Rigaudiat, conseiller social du Premier ministre, est ressortie mitigée de cette entrevue. « La gravité de la situation n'est plus contestée » mais « aucune réponse positive n'a été donnée aux propositions associatives ». Rien en particulier, sur le rétablissement du droit au travail, une attente forte des organisations mais un sujet tabou en période préélectorale. Un nouveau rendez-vous est programmé d'ici à quelques semaines.

C. G.

Notes

(1)  Parmi lesquelles la Cimade, Emmaüs France, la Fondation Abbé-Pierre, le GISTI, la Ligue des droits de l'Homme, Droit au logement, Médecins du monde, l'Uniopss... - Contact : FNARS - 76, rue du Faubourg- Saint-Denis - 75010 Paris - Tél. 01 48 01 82 00.

(2)  Voir ASH n° 2190 du 24-11-00.

(3)  Contact : Cimade - 176, rue de Grenelle - 75007 Paris - Tél. 01 44 18 60 50.

(4)  Egalement préconisée par la Commission nationale consultative des droits de l'Homme. Voir ASH n° 2223 du 13-07-01.

(5)  Les politiques dans ce domaine devront être harmonisées en 2004.

LE SOCIAL EN ACTION

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