La gestion de la sécurité sociale est a-démocratique car, depuis 1983, les administrateurs ne sont plus élus mais nommés. Alors que la santé, la famille, la vieillesse intéressent chacun au plus haut point. Il est donc normal que les assurés sociaux désignent leurs représentants. A l'heure actuelle, on leur demande beaucoup de responsabilisation tout en les excluant de toute intervention sur la sécurité sociale. Or on s'exclut de ce dont on est exclu.
S'il s'agit de voter pour des institutions qui se contentent de donner des avis consultatifs qui n'empêchent pas le gouvernement de faire ce qu'il veut, l'abstention sera évidemment forte. C'est pourquoi nous souhaitons pour la sécurité sociale non seulement une démocratie élective, mais aussi participative. Il faut que les conseils d'administration aient de réels pouvoirs. Mais on peut imaginer diverses formes de participation, faire en sorte, par exemple, que tous les assurés sociaux prennent part à la gestion de réseaux de santé dans des bassins de vie. Des responsables pourraient être tirés au sort pour un temps donné.
Il ne faut pas tomber dans le piège que nous tend le Medef en se retirant. Les syndicats vont gérer seuls la sécurité sociale, il n'y a donc plus de paritarisme. Si l'on ne trouve pas de parade, on va vers l'étatisation, c'est-à-dire vers un régime a minima, avec un large champ laissé à la protection complémentaire. Pour sortir de l'impasse, il faut mettre fin au tête-à-tête entre le Medef et cinq organisations syndicales. Ainsi, les employeurs de l'économie sociale, qui représentent deux millions de salariés, devraient être présents, à côté du Medef, dans les conseils d'administration. Même chose pour les employeurs des entreprises nationalisées et de la fonction publique. Du côté des assurés sociaux, il faut élargir la représentation aux organisations qui, plus que les syndicats, s'intéressent aux questions de santé : les mutuelles et les associations du champ sanitaire et social. Ces trois acteurs sont aussi légitimes les uns que les autres pour intervenir dans la gestion de la sécurité sociale. Les faire travailler ensemble au sein de cette institution donnerait beaucoup d'efficacité à l'action dans les domaines sanitaire et social.
Les organisations syndicales sont les plus rétives à nos propositions. Tant qu'elles seront dépendantes, pour leur représentativité et leur financement, des organismes de protection sociale, je comprends leur crispation. Il leur faudrait un lieu de représentativité propre et une clarification des modalités de leur financement. Cela dit, nous ne souhaitons pas « exproprier » les syndicats, mais, au contraire, les faire redevenir majoritaires en nombre de sièges dans les conseils d'administration (2).
Nous constatons avec satisfaction que l'on parle à présent de situation « transitoire » pour qualifier celle découlant du départ du Medef. Le risque, en effet, était d'en reprendre pour six ans. C'est le modèle qu'il faut changer. Nous sommes à la veille d'échéances électorales propices à de nouvelles propositions sur la démocratie sociale. Le débat ne fait que commencer. Propos recueillis par Céline Gargoly
(1) FMF : 3/5, rue de Vincennes - 93108 Montreuil cedex - Tél. 01 49 88 52 52.
(2) Pour la caisse nationale d'assurance maladie, la FMF propose l'élection de 33 administrateurs : 17 représentant les syndicats de salariés, 4 la mutualité, 4 les associations du champ sanitaire et social, 8 les employeurs. Actuellement, les conseils d'administration des caisses nationales comprennent 13 représentants des employeurs et 13 représentants des assurés sociaux. Ces derniers se répartissent ainsi : 3 pour la CGT, 3 pour FO, 3 pour la CFDT, 2 pour la CFTC et 2 pour la CGC.