Après l'Association française de criminologie (AFC) et ses 55 propositions pour la future loi pénitentiaire (1), certains membres du Conseil d'orientation stratégique (COS), chargé de la réflexion sur la future loi, contribuent à leur tour au débat. Ils ont rendu publique, à l'occasion de leur réunion du 12 juillet, une « plate-forme commune » (2) précisant les grandes lignes de leur position.
Premier volet abordé, celui du « sens de la peine ». Les signataires (3) rappellent en préambule que celle-ci n'a d'autre vocation que de « signifier l'interdit social qui a été enfreint et [...] donner les moyens [à la personne sanctionnée] d'assurer sa réinsertion dans la société ». Dans cette optique, recommandent-ils, il s'agit de « faire de l'incarcération une réelle exception et des peines dites “alternatives” la règle normale de la sanction pénale. » En conséquence, les auteurs préconisent une remise en question profonde de l'échelle des peines, dans laquelle « la prison ne peut être la sanction référentielle ». C'est pourquoi en amont, dès la phase de jugement, le recours à la prison « doit être considéré comme exceptionnel », les magistrats devant « motiver avec clarté leurs décisions ». La plate-forme commune propose encore la suppression de la peine à perpétuité, jugée « inutile et inhumaine ». Elle souligne également la nécessité qu'à « toute peine, même les plus courtes, corresponde un processus de réinsertion » individualisé. Ce qui implique une redéfinition du rôle des surveillants de prison - mais aussi de leur statut, en leur accordant notamment le droit de grève. Le texte réaffirme en outre « l'importance de l'équipe pluridisciplinaire (surveillants, travailleurs sociaux, enseignants, visiteurs de prisons, etc.) qui fait cruellement défaut dans les maisons d'arrêt ».
Deuxième grand principe énoncé par les signataires : « Ce sont des citoyens qui sont sanctionnés ou incarcérés. » Tous leurs droits, et en particulier leur droit au travail, à une vie privée - notamment à l'intimité et à une cellule individuelle -, au maintien des droits familiaux ou des minima sociaux, doivent donc être préservés.
Enfin, troisième volet de cette nouvelle contribution au débat, l'idée d'un « contrat personnalisé de l'exécution de la peine », qui va de pair avec la notion de « détenu citoyen ». Concrètement, malgré des obstacles de droit, puisqu' « un contrat suppose, c'est même une condition de sa validité, la liberté des contractants », elle suggère la signature d'un contrat de travail entre le détenu et « son véritable employeur », mais aussi celle de contrats de formation ou d'insertion. « Entrer dans des relations fondées sur des droits et des obligations réciproques ferait sortir tout le monde de l'arbitraire inhérent à toute structure strictement hiérarchisée et fondée sur le commandement. La fonction et le statut de surveillant se verraient enfin reconnus à la hauteur de la tâche assumée. » L'utilisation du contrat, concluent les auteurs, suppose donc « un profond changement » culturel.
(1) Voir ASH n° 2223 du 13-07-01, et sur les grandes lignes de l'avant-projet de loi, ce numéro.
(2) « Plate-forme commune de membres du Conseil d'orientation stratégique soussignés pour la future loi pénitentiaire » - Disp. à la FNARS : 76, rue du Faubourg- Saint-Denis - 75010 Paris - Tél. 01 48 01 82 00.
(3) Parmi les premiers signataires de ce texte : Guy-Bernard Busson, Fédération des associations réflexion action prison justice ; Liliane Chenain, Association nationale des visiteurs de prison ; Liliane Daligand, Institut national d'aide aux victimes et de médiation (Inavem) ; Marie-José Strickler, Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale ; Michel Tubiana, Ligue des droits de l'Homme...