Il existe désormais officiellement un fichier national des personnes suspectées dans le cadre d'une procédure de police. Un décret vient, en effet, avaliser l'existence du « système de traitement des infractions constatées » (STIC), régulièrement utilisé par les services de police, depuis 1996, sans contrôle et en dépit de toute reconnaissance légale. Poussé par la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) et le Conseil d'Etat, le ministère de l'Intérieur encadre aujourd'hui l'usage et le contenu de ce fichier.
Géré par la direction générale de la police nationale sous le contrôle de la CNIL, le STIC enregistre tout un ensemble d'informations nominatives portant à la fois sur les personnes soupçonnées d'avoir participé à la commission d'un crime, d'un délit ou d'une contravention de 5e classe (1), et sur les victimes de ces infractions (2). Le traitement de ces informations se fait sous le contrôle des parquets. Exceptionnellement, dans certaines situations, le STIC peut être utilisé sans autorisation du parquet pour des missions de police administrative ou de sécurité, « lorsque [leur] nature ou les circonstances particulières dans lesquelles elles doivent se dérouler comportent des risques d'atteinte à l'ordre public ou à la sécurité des personnes ». Un usage réservé cependant, dans ce cas, à des policiers individuellement désignés et spécialement autorisés, soit à vérifier simplement si une personne figure ou non au STIC, soit à avoir largement accès aux données la concernant.
La durée de conservation des données concernant les victimes est au maximum de 15 ans, étant entendu que ces dernières peuvent toujours demander à ne plus apparaître dans le fichier dès lors que l'auteur des faits a été condamné définitivement. Quant aux données relatives aux personnes mises en cause, leur durée de conservation est variable : 20 ans si le suspect est majeur, sauf pour certaines infractions (de 5 à 40 ans, selon la gravité des faits) ; 5 ans s'il est mineur, sauf exceptions liées, là encore, à la gravité de l'infraction (de 10 à 20 ans).
Le mis en cause innocenté avant la date limite de conservation n'est pas, pour autant, automatiquement « effacé » de la base de données. Tout dépend en fait des suites données à l'enquête : suppression des informations en cas de décision de relaxe ou d'acquittement devenue définitive ; simple mise à jour - sauf effacement prescrit par le procureur de la République - en cas de non-lieu ; conservation en cas de décision de classement sans suite motivée par l'insuffisance de charges à l'encontre de l'intéressé.
(1) Sont concernées les personnes à l'encontre desquelles sont réunies, lors de l'enquête préliminaire, de l'enquête de flagrance ou sur commission rogatoire, des indices ou des éléments graves et concordants attestant leur participation à la commission de l'infraction.
(2) Pour les personnes mises en cause, les informations enregistrées concernent leur identité, surnom éventuel, date et lieu de naissance, situation familiale, filiation, nationalité, adresse, profession, état de la personne, signalement et photographie. Celles relatives aux victimes recensent les mêmes informations, à l'exception du surnom, de la filiation, ainsi que du signalement et de la photographie qui ne figurent au fichier que pour les personnes disparues ou les corps non identifiés.