Il ne s'agit pas de cracher dans la soupe. Le décret concernant les centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) paru au Journal officiel le 4 juillet (1), « marque de grands progrès », reconnaît la Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale (FNARS) (2), qui attendait ce texte depuis trois ans. Parmi les avancées les plus notables, selon la fédération, l'admission, désormais décidée par l'établissement lui-même et non plus par le préfet, et la suppression du plafond de six mois restreignant la durée d'accueil, au profit d'une évaluation personnalisée, par le CHRS, des besoins de la personne. Autant de dispositions « qui entérinent des pratiques largement répandues », se félicite Jean-Paul Péneau, directeur de la FNARS.
Autre motif de satisfaction, les modifications concernant les CHRS spécialisés dans l'accueil des demandeurs d'asile et réfugiés, les centres d'accueil pour demandeurs d'asile et centres provisoires d'hébergement. « Une révolution », insiste Jean-Paul Péneau : désormais, les décisions d'admission sont prises par le CHRS sur proposition d'une commission, tandis qu'à l'heure actuelle, « les gestionnaires et les demandeurs n'ont pas le choix, la totalité des admissions étant décidée à Paris ».
En outre, la mise au travail hors du droit du travail et la pratique du pécule, en œuvre depuis 25 ans, disposent désormais d'un cadre juridique. « Un grand progrès pour toutes les personnes qui, temporairement, ne peuvent avoir accès à un contrat de travail », commente le directeur de la FNARS.
Pourtant, l'association ne manque pas de souligner les « nombreuses frilosités et réticences » du décret, bien éloigné de l'esprit de la loi contre les exclusions. Celle-ci « voulait considérer les personnes exclues ou en voie d'exclusion comme des citoyens à accompagner, parlait d'autonomie sociale et personnelle. Là, on reste dans le schéma d'une aide sociale protectrice. La logique de protection n'a pas été abandonnée au profit de la logique de promotion », note Jean-Paul Péneau, qui relève que ce décret aurait pu dater d'il y a dix ans.
C'est vrai dans le domaine du logement, où la possibilité pour les résidents d'avoir un statut de locataire n'est pas évoquée. C'est vrai aussi dans le champ de la mise au travail : si les pratiques hors droit du travail sont entérinées, le recours à l'insertion par l'activité économique (IAE), qui se situe, elle, dans le cadre du droit du travail, apparaît fortement limité par des modalités budgétaires d'IAE feront l'objet d'un budget complètrès restrictives. Ainsi, les activités tement autonome, hors dotation du CHRS par l'Etat. Résultat : « il faudra équilibrer l'activité par de petits financements précaires », regrette Jean-Paul Péneau, qui voit dans cette précarité « une tentative de l'administration, par le biais d'un article technique, d'écarter les titulaires de l'aide sociale de l'insertion par l'activité économique ». Et de conclure : « le décret tente de nous retirer ce que la loi nous a donné ».
(1) Voir ce numéro.
(2) FNARS : 76, rue du Faubourg-Saint-Denis - 75010 Paris - Tél. 01 48 01 82 00.