En cette année de centenaire de la loi sur la liberté d'association, où en est l'économie sociale ? Le présent ouvrage, dirigé par le président de l'Association des lecteurs d'Alternatives économiques, également secrétaire général du centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (Crédoc), propose une utile synthèse des débats en cours au sein de ce large secteur, riche de plus de 1,7 million de salariés et de 30 millions de bénévoles. Avec l'ambition affichée de contribuer à « faire reconnaître [...] l'utilité pour notre société du “droit de produire autrement” ». Différents auteurs plaident, chacun dans son registre, pour cette reconnaissance. Alain Lipietz, député Verts, auteur d'un rapport sur le sujet (voir ASH n° 2206 du 16-03-01), réitère sa demande d'une loi-cadre sur les « sociétés à vocation sociale ». Il ne s'agirait pas de créer un statut nouveau, mais plutôt un label d'utilité sociale et solidaire, non limité aux associations, mutuelles et coopératives, et défini par une charte portant à la fois sur les buts sociaux et l'organisation interne. De son côté, Edith Arnoult-Brill, présidente du Conseil national de la vie associative, défend l'idée d'un « véritable statut » du volontariat, afin de « reconnaître le sens social de l'activité et d'éviter les dérives ». Et elle regrette que « la relation entre pouvoirs publics et associations [soit] souvent proche du contrat de prestation de services qui “instrumentalise” » (voir également sa contribution dans les ASH n° 2191 du 1-12-00).
La puissance publique, cependant, n'est pas en reste de reproches à l'encontre de ces structures du tiers secteur, particulièrement, rappelle Hugues Sibille, celui « d'indépendance abusive pour se soustraire à l'évaluation, voire aux sanctions, dans l'utilisation de fonds, pourtant souvent d'origine publique ». Et c'est pour mettre fin à cette défiance réciproque que le délégué interministériel à l'économie sociale et à l'innovation sociale prône la mise en place d'une véritable politique publique d'appui à l'économie sociale et solidaire, passant notamment par la clarification et la mise en cohérence du cadre juridique et fiscal et le développement d'un partenariat contractuel. Cette « refondation » ne doit pas être envisagée au seul plan national. Comme le souligne Jean-Louis Laville, sociologue, beaucoup reste encore à faire au niveau de l'Union européenne, qui ne s'est pas, elle non plus, totalement départie d'une « conception tronquée » opposant « de façon simpliste une économie de marché créatrice de richesse, génératrice de croissance, à des activités non marchandes et non monétaires perçues comme “parasitaires” ». A noter également l'intéressante contribution de Jean-Christophe Le Duigou, secrétaire confédéral de la CGT, sur la « possible convergence entre le syndicalisme et l'économie sociale et solidaire », après des années d' « incompréhension réciproque ».
C.G. La nouvelle économie sociale. Efficacité, solidarité, démocratie - Sous la direction de Christophe Fourel - Ed. Syros - 65 F (9,91 € ).