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Des passeurs pour la scolarisation des handicapés

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Le développement des services d'auxiliaires d'intégration scolaire est un des piliers du plan Handiscol'. S'ils sont reconnus aujourd'hui comme une aide à la scolarisation des élèves handicapés, reste à résoudre la question de la pérennité des emplois et du financement des projets.

Nathalie, 21 ans, accompagne un petit de 4 ans, aveugle, en maternelle ; elle s'occupe aussi d'un jeune trisomique de 6 ans, quatre matinées par semaine. Dorothée, 20 ans, assiste un lycéen tétraplégique de seconde ; au collège, c'est à un adolescent déficient visuel qu'elle apporte son aide. Elle a un bac économique et social et un brevet d'aptitudes aux fonctions d'animateur. Son projet ? Devenir éducatrice spécialisée pour jeunes malvoyants.

Ces deux auxiliaires d'intégration scolaire  (AIS) font partie de l'équipe du service de Charente-Maritime, SAIScol 17 (1), soit neuf jeunes qui accompagnent aujourd'hui 29 élèves. C'est l'un des 26 services actuellement expérimentés sur le territoire français.

A l'initiative des parents

Retour en arrière : dès le début des années 80, des parents se démènent pour que leur enfant bénéficie d'un accompagnement en classe ; des associations commencent à monter des équipes d'auxiliaires d'intégration scolaire embauchés en contrat emploi-solidarité. En 1996, une dizaine d'entre elles fondent la Fédération nationale pour l'accompagnement scolaire des élèves présentant un handicap  (Fnaseph)   (2). Celle-ci se dote d'une charte spécifiant que tout élève, quel que soit son handicap, qu'il soit scolarisé dans le public ou le privé, peut bénéficier d'un auxiliaire d'intégration scolaire dont le service est gratuit. Par ailleurs, toutes les associations concernées sur un même département s'engagent à travailler ensemble en évitant la mise en place de dispositifs concurrents.

En 1999, le collectif qui s'est étoffé, signe avec l'Education nationale et l'association IRIS-Initiative (3), une convention tripartite « dans le but de développer en France des services d'auxiliaires d'intégration scolaire ». Une évolution de taille qui s'inscrit dans la volonté affirmée du gouvernement de doubler, en cinq ans, le nombre d'élèves handicapés accueillis à l'école de la République. Pour accélérer le processus, celui-ci lance la même année son plan national d'intégration (4) et institue dans chaque département un groupe Handiscol'.

La convention tripartite prévoit la création de postes d'auxiliaires dans le cadre des emplois-jeunes. Electricité et Gaz de France, partenaires d'IRIS-Initiative, complètent le financement des salaires pris en charge à 80 % par l'Etat. 500 nouveaux postes ont ainsi été créés, plus une centaine co-financés par la RATP. Ce qui porte le nombre actuel d'auxiliaires à quelque 1 300,  accompagnant environ 2 000 élèves. On estime qu'à terme, il en faudrait 5 à 6 000. A côté des 26 services mis en place sur autant de départements, une trentaine de projets sérieux sont en quête de financements. « On crée des “entreprises associatives” », explique Didier Fessard, détaché durant deux ans par EDF et GDF à IRIS-Initiative pour travailler sur ce dossier. Sillonnant les départements, il aide à l'installation des dispositifs en apportant l'expérience déjà capitalisée. Et, à partir de la diversité des situations de terrain, il travaille au sein d'un groupe de réflexion nationale, à dessiner les perspectives de fonctionnement et de rationalisation des services.

On observe deux grands types de structures : les services montés et gérés par un collectif d'associations et ceux dont la gestion est confiée à une seule association. C'est le cas de SAIScol 17. Ce jeune service est régi par l'Association départementale des pupilles de l'enseignement public  (Adpep 17), à la tête de 11 établissements et de 340 salariés. Alain Dréano, son directeur général, se souvient : « Il a fallu neuf mois de maturation pour créer le service. Les associations fondatrices (représentant tous les handicaps) n'ont pas de lien financier avec l'Adpep mais sont membres du comité de pilotage et s'engagent à apporter leur concours bénévole à la formation des auxiliaires. » Avant d'entrer en fonction, ceux-ci suivent un stage de deux semaines, dont quatre jours d'observation sur le terrain, complété par des périodes de formation en cours d'emploi.

LES GROUPES HANDISCOL'

La création des groupes Handiscol' figure parmi les 20 mesures du plan national Handiscol' (5) . Instruments de pilotage de la politique départementale d'intégration scolaire, ils ont pour mission de coordonner et de faciliter les actions des différents partenaires concernés. Y siègent, à côté des services publics, aussi bien les associations de parents que les représentants des personnels des établissements scolaires et médico-sociaux, ainsi que les élus territoriaux. « La pluralité des interlocuteurs constitue une chance à saisir pour dédramatiser les difficultés et les résoudre conjointement dans la transparence », se réjouit Jean-Louis Brison, inspecteur de l'Education nationale, délégué ministériel à l'intégration scolaire. La première tâche qui incombe à ces instances locales, installées au sein des comités départementaux consultatifs des personnes handicapées, est un état des lieux prospectif. Les groupes sont constitués dans environ trois quarts des départements, plus de la moitié étant co-présidés simultanément par l'inspecteur d'académie et le DDASS. « Jusqu'ici, les services déconcentrés des deux administrations s'étaient plutôt ignorés, observe Jean-Louis Brison. Au niveau central, l'interministérialité est efficace. Avec Handiscol', il faut faire la démonstration qu'elle fonctionne aussi sur le terrain. »

Prestataires de services

Le service n'intervient qu'à la demande, c'est-à-dire lorsque le projet individuel de scolarisation de l'élève, validé par la commission de circonscription compétente, a été signé entre ses parents et l'école. « Nous ne sommes pas prescripteurs mais prestataires », observe Olivier Bollengier, coordonnateur du SAIScol 17. A ce titre, une convention est signée entre le service et l'établissement scolaire. En même temps qu'elle précise la mission de l'AIS, elle sert de garde-fou contre d'éventuels abus de la part des enseignants. Si certains auxiliaires sont bien acceptés, d'autres ont du mal à trouver leurs marques. Parfois, il leur arrive de se sentir découragés, impuissants devant la souffrance. Des temps de regroupement sont prévus pour des échanges sur les pratiques. Les auxiliaires ont aussi la possibilité d'exprimer leur ressenti dans des petits groupes animés par une psychologue.

Parmi leurs desiderata : une meilleure reconnaissance de leur rôle par les services d'éducation spécialisée et de soins à domicile avec lesquels il leur est parfois difficile de communiquer, leurs intervenants se retranchant derrière le secret médical. Faudrait-il alors signer des conventions avec eux pour formaliser une coopération avec les professionnels du soin, comme le préconisent certains services ? Par ailleurs, comment pérenniser la fonction ?

Si un certain nombre d'auxiliaires d'intégration scolaire se préparant à des métiers du champ médico- social, éducatif ou pédagogique, considèrent cette activité comme une période d'apprentissage, les moins diplômés sont prêts à exercer cette fonction plus longtemps. Une solution pour assurer la pérennité de l'emploi serait d'intégrer la spécificité de la fonction à un métier existant, ce qui permettrait à des titulaires de BEP à vocation médico-sociale d'être embauchés hors emploi-jeune. Mais il faudrait alors élaborer un référentiel des compétences et instituer un système de validation des acquis professionnels.

Actuellement, les AIS se recrutent à 90 % en emplois-jeunes. Lorsque ceux-ci viendront à expiration (fin 2002), qui financera les postes ? L'Adpep 17 a répondu en embauchant ses auxiliaires en contrat à durée indéterminée et en les intégrant à sa convention collective. Les petites structures ne peuvent pas se le permettre, d'autant plus qu'il faut compter les frais d'encadrement. C'est pour elles la course aux subventions. Pour leur part, la Fnaseph et IRIS-Initiative optent pour des financements publics croisés relevant de l'aide sociale, de la solidarité, de l'éducation et de la santé.

Pour répondre à ces questions, le ministre de l'Education nationale a confié à Mireille Malot, déléguée générale de l'association IRIS-Initiative, « la conduite d'une étude sur les conditions d'accompagnement et de pérennisation des auxiliaires d'intégration scolaire »   (6). Mère d'une fille atteinte du syndrome de Rett, longtemps impliquée dans la création d'un service d'auxiliaire d'intégration scolaire en Indre-et-Loire, cette militante connaît bien les difficultés inhérentes à ce type de montage. Mais aussi les risques de dérive du côté des établissements scolaires qui, de plus en plus, exigent la présence d'un auxiliaire avant d'accepter un élève. Or tous n'ont pas besoin d'une tierce personne, qui plus est, à plein temps ! « Il faut éviter de donner l'idée que l'élève disposera toujours d'une aide individuelle. Cela va à l'encontre de son autonomisation. Quand on décide d'enlever cette “béquille” à un enfant qui peut s'en passer, pour l'affecter à un autre qui en a plus besoin, on peut toujours trouver une alternative : un aide-éducateur (7) pour emmener le jeune aux toilettes, par exemple. »

C'est intuiti personae (et non en tant que déléguée d'IRIS-Initiative) que Mireille Malot remettra son rapport au gouvernement en juin prochain. Mais, si elle attend beaucoup de l'engagement des pouvoirs publics, elle n'ignore pas qu'il y a encore bien des préjugés à faire voler en éclats !

Françoise Gailliard

UNIFIER LA RÉGLEMENTATION

La circulaire du 18 novembre 1991 indique que si les conditions requises ne sont pas réunies pour accueillir un élève en milieu scolaire ordinaire, la commission de circonscription compétente doit proposer une autre solution aux parents. Mais qui décide que les conditions ne sont pas réunies ? Réponse : l'équipe pédagogique sous l'autorité du chef d'établissement. Celui-ci est donc juge et partie. Voilà une des anomalies repérées dans un des nombreux textes applicables en matière d'orientation et d'intégration scolaire. Il était urgent de recenser, clarifier et simplifier la réglementation dans ce domaine. Pour ce faire a été mis en place un groupe de travail restreint associant des représentants des administrations centrales et des services déconcentrés des ministères de l'Education nationale et de l'Emploi et de la Solidarité. A sa tête, Jean-Marie Pachon, inspecteur de l'Education nationale, chargé de l'adaptation et de l'intégration scolaire en Ille-et-Vilaine : « Nous sommes conscients de la “multiformité” et de la complexité des textes. Et nous aurons à tenir compte des décrets de révision de la loi de 1975 sur les institutions sociales et médico-sociales. Dans un rapport d'étape, courant mai 2001, nous allons pointer les précisions qui devraient être apportées à certains textes mais aussi proposer une nouvelle réflexion pour moderniser les règles applicables aux aménagements d'examens et de diplômes. »

Notes

(1)  SAIScol 17 : 25 bis, rue Villeneuve - 17000 La Rochelle - Tél. 05 46 41 68 46.

(2)  Fnaseph : le Forum, bureau 212 - 64100 Bayonne - Tél. 05 59 42 16 03.

(3)  IRIS Initiative : 37, rue Gay-Lussac - 37000 Tours - Tél. 02 47 05 87 87.

(4)  Voir ASH n° 2116 du 23-04-99.

(5)  Voir ASH n° 2144 du 3-12-99.

(6)  Voir ASH n° 2189 du 17-11-00.

(7)  Alors que l'AIS est attaché à l'élève, l'aide-éducateur, employé de l'Education nationale, est attaché à l'établissement scolaire. Il est là pour tout le monde. Et, quand il assiste des élèves handicapés, c'est surtout en groupe. Il peut ainsi intervenir à l'école dans les classes d'intégration scolaire (CLIS) et, en collège et lycée, dans les unités pédagogiques d'intégration (UPI). On compte environ 7 500 aides-éducateurs.

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