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Rompre le silence autour des « morts sous X »

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« Les associations ont la douleur de vous faire part des décès d'Anaïs, 30 ans, de Samia, environ 50 ans, Mathias, 40 ans »... Fin avril, pour la troisième fois depuis un an, des organismes d'aide aux plus démunis, des élus et la presse recevront ce faire-part de décès de personnes sans domicile fixe. « Aux captifs, la libération » (1), association chrétienne d'aide aux personnes sans abri et aux prostitués, a lancé cette campagne avec le soutien de La Mie de pain, ATD quart monde, le collectif SDF d'Ivry-sur- Seine, Emmaüs Liberté et Les Restos du cœur, pour rompre le silence sur la mort des plus démunis.

Interpeller les travailleurs sociaux

« Jusqu'ici, même si nous savions que beaucoup de sans-abri meurent dans la rue, nous préférions l'occulter et nous battre pour les vivants. Mais l'an dernier, nous avons dû faire face à 16 décès en 14 mois de personnes sans domicile fixe à notre antenne de la rue Saint-Denis, à Paris. Nous avons réalisé que nos aidants,  mais aussi les personnes que nous accompagnons, se sentaient écrasés par ces décès. Et surtout par la manière dont les personnes ont été enterrées : dans une tombe comportant un numéro, sans cérémonie », raconte Cécile Rocca. Cette responsable de l'association a alors reçu pour mission d'alerter pendant un an les médias, mais surtout les travailleurs sociaux sur les questionnements qu'implique une sépulture aussi succinte pour les plus démunis.

« Donner un numéro et pas un nom, cela revient à nier l'unicité de l'être humain. Mais cette attitude ne se retrouve-t-elle pas en amont dans le travail social ? Par exemple, est-ce qu'on porte attention à la singularité des personnes dans les foyers d'hébergement ? On attribue les chambres sur des critères louables d'économie, de fonctionnement, d'hygiène. Mais à force de ne pas tenir compte des goûts des personnes, est-ce qu'on n'en fait pas des garages à humains ? Bref, est-ce que le travail social ne se soucie pas, parfois, uniquement de tenir des corps en vie, au lieu de soigner l'humanité de chacun ? », demande Cécile Rocca. L'absence de rite funéraire empêche aussi les « copains » des sans-abri décédés de faire leur deuil et de lutter pour donner un sens à leur propre vie, ont constaté les travailleurs sociaux d'Aux captifs, la libération. Et de suggérer que rétablir des rites - pas forcément religieux - autour de la mort des plus démunis redonnerait de l'humanité aux vivants.

L'association invite aussi ses consœurs qui viennent en aide aux personnes sans domicile fixe à échanger avec elle leurs informations et leurs statistiques sur les décès dans la rue. En effet, on ignore aujourd'hui combien meurent ainsi chaque année, et pourquoi. L'Institut national de la statistique et des études économiques, qui vient de mener une première enquête auprès de cette population, devrait apporter de son côté quelques connaissances (2).

Notes

(1)  Aux captifs, la libération : 151, rue du Chemin-Vert - 75011 Paris - Tél. 01 49 23 89 90.

(2)  Voir ASH n° 2197 du 12-01-01.

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