Révélation de viols de mineures handicapées, multiplication des affaires mettant en cause des instituteurs ou des prêtres, sans compter la polémique artificielle autour des écrits publiés en 1975 par Daniel Cohn-Bendit... Les amalgames entretenus par les médias, réducteurs et sans nuances, autour d'un sujet aussi sensible auprès de l'opinion que la pédophilie, desservent finalement la cause qu'ils prétendent défendre. En clair, en risquant d'attirer systématiquement les soupçons sur les professionnels éducatifs et sociaux, ne va-t-on pas à l'encontre de la défense des droits de l'Enfant ? C'est la question que pose un collectif d'enseignants actifs ou retraités, d'animateurs et de bénévoles, dans un texte commun, adressé à différents journaux (1). Car « si l'on n'y prend pas garde, le souci de protéger abstraitement l'enfance, la crainte des suspicions diverses (comme d'ailleurs le risque de la survenue d'accidents mettant en cause les éducateurs pénalement) risquent fort de cantonner un peu plus les éducateurs à l'écart de la vie des enfants et de déshumaniser un peu plus l'école d'aujourd'hui ».
Sous le titre « Je suis enseignant, éducateur, animateur : je touche des enfants et des enfants me touchent », les 50 signataires rappellent que la relation éducative passe aussi par le corps. « [...] J'ai touché des enfants et je les touche encore. J'ai passé ma main dans leurs cheveux ou le long de leur dos quand ils ont réussi quelque chose de difficile pour eux. Je le fais toujours.
« J'ai pris leur bras, et je le fais toujours, et je pose ma main sur leur épaule pour les faire asseoir, parce qu'ils s'éparpillent en déplacements inutiles. Ma main d'adulte peut se faire lourde ou légère, sur leur épaule d'enfant, pour qu'ils se stabilisent. J'en ai pris sous le menton, pour me regarder dans les yeux certaines fois... J'en ai pris d'autres par l'épaule, et je les ai serrés contre moi, contre mon corps d'adulte, parce que leur chien (ou leur grand-père) était mort[...]. « J'avoue que je touche les enfants, Monsieur le juge. Quand ils vont bien, quand ils vont mal, quand ils sont malades. « Mais je dois dire aussi que les enfants me touchent ! ! Pendant les sorties, quand les plus petits ne quittent pas ma main ; en classe, quand ils m'agrippent pour que je m'occupe d'eux ; à chaque moment de la journée, en classe ou à la récré, pour me prouver qu'ils existent. »
(1) Contact : Laurent OTT - Tél. 06 03 01 15 43.