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Un guichet unique santé-social

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Depuis quelques mois, le département de la Loire et la ville du Chambon-Feugerolles font fonctionner ensemble un « pôle de services » médico-sociaux, ouvert également à de nombreux organismes et associations.

Au sortir de Saint-Etienne en direction du Puy, la vallée de l'Ondaine a dû être un site agréable... avant la révolution industrielle. Aujourd'hui abandonnée par les mines de charbon et la sidérurgie, c'est une zone sinistrée, à l'habitat disparate. Deux communes s'allongent sur la nationale 88 avant Firminy : La Ricamarie (8 000 habitants) et Le Chambon- Feugerolles (14 000 habitants). Ces ex-villes ouvrières ont perdu chacune 2 000 âmes entre les deux derniers recensements. Elles abritent nombre de HLM vacants, beaucoup de chômeurs et la plus forte densité d'allocataires du revenu minimum d'insertion  (RMI) du département.

Néanmoins, si La Ricamarie continue de se vider de ses derniers commerces, Le Chambon-Feugerolles est plutôt en phase de réanimation, avec une opération d'urbanisme en centre-ville, une restructuration des zones d'activité, une bonne dotation des clubs sportifs - l'équipe de natation synchronisée ayant même poussé jusqu'aux Jeux olympiques de Sidney !

Au « pôle de services » du Chambon, en tout cas, on ne cultive pas la morosité. Sourire à l'accueil. Locaux lumineux et aménagés de neuf. Après quelques semaines de rodage, les 100 personnes qui y travaillent ou y donnent des vacations depuis septembre 2000 ont pris leurs marques. Quant à la population, elle a trouvé le chemin de ce bâtiment rectangulaire de trois niveaux, bien situé entre le centre-ville et le quartier de Romière- Bouchet, classé en développement social urbain. Le lieu a d'ailleurs toujours eu une vocation sociale. Pour les anciens Chambonnaires, c'était « le dispensaire ». Ces derniers temps, il abritait le centre communal d'action sociale, mais une partie des locaux restait inutilisée.

L' opportunité a été saisie par la ville et le département pour regrouper, dans ces 500 m2, tous les services du secteur social et médico-social. Plus que d'un simple voisinage, il s'agit d'une véritable cohabitation : l'initiative est unique en Rhône-Alpes et sans doute en France. D'où son intérêt, même s'il est encore trop tôt pour en tirer un bilan.

Privilégier la proximité

Le projet n'est pas le fruit du hasard mais procède d'abord de la décision du département, prise en 1996, de territorialiser l'action sociale. C'est ainsi que les cinq anciennes circonscriptions de la direction de la protection sociale ont laissé place à 18 pôles de proximité. Celui du Chambon- La Ricamarie est créé en 1998. « Cependant, explique sa responsable, Isabelle Darnat , il était implanté au départ... à Firminy. Nous cherchions donc à le rapprocher encore du lieu d'exercice effectif des travailleurs sociaux. » La municipalité du Chambon propose alors le bâtiment du centre communal d'action sociale et même, en attendant les travaux de réfection, un local provisoire sur la commune. Les deux parties, ville et département, commencent à réfléchir ensemble à la future installation. La bonne entente entre les partenaires donne vite au projet un tour plus ambitieux qu'un simple rapprochement géographique.

Au départ, le bâtiment du futur pôle compte quatre entrées différentes, qui desservent des étages sans communication entre eux. La ville aurait donc pu installer ses services à un niveau, et le département à un autre, chacun faisant « bureaux à part ». L'idée d'un escalier intérieur s'impose vite pour casser cette étanchéité. Puis les protagonistes se demandent si une entrée unique ne vaudrait pas mieux pour l'usager, qui ignore souvent si le service dépend de telle ou telle collectivité. Cela lui éviterait d'être renvoyé d'une administration à l'autre, d'une entrée à l'autre... Et pourquoi pas, alors, un accueil unique ? A condition de partager un minimum d'informations pour une orientation efficace des visiteurs...

Ailleurs, de telles propositions auraient été sacrilèges. Ici, elles reçoivent vite le feu vert des responsables, élus et fonctionnaires. « Le choix d'un accueil commun, véritablement intégré, est l'axe du projet », commente Jean-Louis Gaulier, responsable de la protection sociale pour le sud du département (Gier-Ondaine-Pilat) et l'un des membres du comité de pilotage. Autre décision importante : l'invitation lancée à tous les autres services sociaux et médicaux intéressés, qu'ils dépendent de l'Etat ou d'associations, à venir s'installer au pôle.

Débute alors un véritable travail d'ingénierie sociale. « L'une des tâches les plus importantes consistait à décrire précisément qui faisait quoi. C'était un préalable indispensable avant d'envisager un accueil efficace et éventuellement des procédures de travail communes », explique Jean-Louis Gaulier. La mission est confiée à Isabelle Darnat et à Jocelyne Dereymond (de la direction de l'informatique et de l'organisation au département), qui vont interviewer chaque futur intervenant du pôle pour rédiger un « guide de fonctionnement ». « Il a fallu désamorcer des craintes d'empiètement ou de dépossession. » De plus, « les travailleurs sociaux ne savent pas expliquer ce qu'ils font, constate Isabelle Darnat, elle-même assistante sociale de formation. Sur ce plan, l'intervention d'une personne extérieure au monde sanitaire et social, en l'occurrence une conseillère en organisation, a été très utile pour nous aider à décrire et à objectiver nos modes d'intervention. »

Deux lignes d'accueil

Pour les locaux, l'installation ignore toute partition politique ou juridique. S'il subsiste deux entrées, elles distinguent un pôle social avec l'accueil principal, et un pôle santé, regroupant les cabinets de consultation, infirmier, dentaire et médical. Tous les locaux recevant le public se trouvent au rez-de-chaussée. Les bureaux pour les seuls personnels sont à l'étage. Les employés de la ville et du département voisinent donc dans les mêmes couloirs et partagent photocopieurs et cafetières...

Le guichet unique de l'accueil est tenu en tandem par deux secrétaires médico-sociales, une de la ville et une du département. Elles réalisent un pré-diagnostic et donnent une première réponse dans les cas simples : indication des conditions à remplir pour bénéficier de telle prestation, information sur les papiers à fournir, prise de rendez-vous, etc. L'accueil dispose du planning de toutes les permanences et des carnets de rendez-vous de la plupart d'entre elles. Volontaires pour ce poste, les accueillantes s'y relaient par demi-journées et s'occupent à d'autres tâches le reste du temps.

Derrière cette ligne de front, un « co-accueil » est assuré par une assistante sociale. Installée dans son bureau à l'étage supérieur, elle est appelée à intervenir en cas d'urgence, quand la demande de l'usager n'est pas claire, ou lorsqu'une personne non encore connue des services sollicite une intervention.

Durant les quatre premiers mois d'activité, l'accueil a reçu, en moyenne, 642 personnes par mois, soit 37 par jour, plus 45 appels téléphoniques quotidiens (chaque service ayant aussi sa ligne directe). Le co-accueil a été sollicité en moyenne 27 fois par mois (soit dans 4 % des cas), ce chiffre allant en diminuant à mesure que la « première ligne » gagnait en expérience et en assurance. « Le fonctionnement du dispositif est observé de près et garde pendant un an un caractère expérimental », précisent les deux co-pilotes, Isabelle Darnat et Hugues Chalet, le nouveau directeur de la vie locale pour la ville. Tous deux constituent, avec les chefs des principaux services, un « comité technique » qui se réunit aussi souvent que nécessaire, et au moins une fois par mois, pour régler les problèmes. Mais, le voisinage quotidien permet d'ajuster beaucoup de détails sans formalités...

Une question de fond avait été tranchée durant la phase préparatoire, car il aurait pu être tentant d'aller plus loin dans le partage d'informations. Après tout, les assistantes sociales du département et les enquêteurs du centre communal d'action sociale ont souvent affaire aux mêmes familles.

Le partage des fichiers étant strictement prohibé par la Commission informatique et libertés, toute mise en commun des systèmes informatiques a été exclue d'office. La convention de partenariat, signée en février 2000, rappelle que les informations restent la propriété de chaque institution, que l'accès direct en est interdit aux autres, et que les échanges doivent être « réalisés d'agent à agent, chacun assumant ses responsabilités ».

Mais bien sûr, la proximité facilite les synergies. Par exemple, en venant présenter son nourrisson à la protection maternelle et infantile, telle mère de famille s'aperçoit que le Planning familial est tout à côté et facile d'accès. En déposant un dossier de RMI, tel père peut repartir avec une information de la permanence d'accueil, d'information et d'orientation pour son fils...

C'est bien cette simplicité d'accès, cette visibilité et ces effets de proximité qui ont été recherchés par les créateurs du pôle. Au premier rang desquels il faut placer les élus, qui ont clairement encouragé le projet, la bonne entente - personnelle et politique - entre le maire, Jean-François Barnier  (UDF), et le président du conseil général, Pascal Clément  (DL), ne nuisant évidemment pas à l'affaire.

Les travaux d'aménagement (près de 3 millions de francs) ont été financés par la ville et le département à peu près par tiers, la région Rhône-Alpes apportant la troisième part en signe d'encouragement au décloisonnement. Les frais de fonctionnement sont partagés par moitié entre les deux collectivités utilisatrices. Quant à la question de savoir si, de mettre au même guichet des personnels de statut différent ne risque pas de susciter des revendications, salariales ou autres, elle est balayée d'un revers de main. On se donnera les moyens d'aplanir ce genre de problèmes.

Marie-Jo Maerel

LES SERVICES PRÉSENTS SUR LE PÔLE

Tous les Chambonnaires sont appelés à fréquenter, un jour ou l'autre, le pôle de services (1) pour y rencontrer :

  des interlocuteurs municipaux  : le centre communal d'action sociale, le développement social urbain, la direction de la vie locale, le service de soins à domicile et la médecine du travail ;

  des interlocuteurs départementaux  : le service de la protection sociale, la protection maternelle et infantile, le service de vaccination ;

  d'autres services publics comme la médecine scolaire, le dépistage dentaire, la psychiatrie de secteur, la permanence d'accueil d'information et d'orientation, la protection judiciaire de la jeunesse ;

  des associations comme l'Union départementale des associations familiales, l'Association d'action sociale qui s'occupe d'aide aux victimes, ou le Planning familial. Attirée par le pôle, une association d'aide aux alcooliques va sans doute aussi y créer une permanence. Soit au total 18, bientôt 19, services différents. Seules manquent, pour l'heure, les permanences de sécurité sociale (allocations familiales, retraite...).

Notes

(1)  Pôle de services : 1, bd d'Auvergne - 42500 Le Chambon-Feugerolles. Tél. 04 77 10 18 48.

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