Après les accords sur l'assurance chômage et la santé au travail, un troisième chantier de la refondation sociale, celui des retraites complémentaires, s'achève également sur un compromis obtenu à l'arraché par le Medef, après 22 heures de négociations terminées au petit matin du 10 février. L'accord comporte trois chapitres : le premier, d'ordre politique, pose « les principes sur lesquels [une] réforme du régime de base par le législateur devrait reposer pour équilibrer le système de retraite » ; les deux autres, plus techniques, concernent la prorogation, jusqu'au 31 décembre 2002, du régime actuel des retraites complémentaires et le financement de leur surcoût pour les pensions liquidées à partir de 60 ans.
La principale organisation patronale refuse de scinder son texte comme le lui ont demandé la CFE-CGC et FO, toutes deux opposées au premier volet de l'accord qu'elles considèrent comme une injonction faite à l'Etat. Le Medef ne devrait donc signer l'accord obtenu qu'avec les seules CFTC et CFDT, la CGT ayant, quant à elle, claqué la porte au cours des discussions.
Les principes pour une réforme du régime de base « L'adaptation des régimes de retraite complémentaire doit être articulée avec la réforme du régime de base d'assurance vieillesse. » Aussi l'accord fixe-t-il d'entrée de jeu « les principes sur lesquels cette réforme par le législateur devrait reposer pour équilibrer le système de retraite » :
garantir un niveau de pension pour les dix ans à venir ;
stabiliser les taux de cotisation sur dix ans ;
privilégier la variable de la durée de cotisation pour l'accès à la retraite à taux plein ;
créer un dispositif favorisant la liberté de choix pour le départ en retraite à partir de 60 ans ;
introduire la possibilité de liquider ses droits à la retraite avant 60 ans en cas de travaux pénibles ou d'un début de carrière précoce ;
mettre en place un groupe de travail chargé d'étudier l'articulation entre les différents régimes d'assurance vieillesse. La prorogation des régimes de retraite complémentaire...
Jusqu'au 31 décembre 2002, les rendements des régimes AGIRC et ARRCO seront maintenus à leurs niveaux actuels et les pensions seront revalorisées au 1er avril de chaque année en fonction de l'évolution des prix hors tabac à partir de la signature de l'accord. Les salaires suivront la même évolution.
Les taux de cotisations AGIRC et ARRCO, tels que prévus dans l'accord du 25 avril 1996, seront inchangés d'ici au 31 décembre 2002, sans exclure des redéploiements d'autres prélèvements connexes.
Les deux régimes seront rapprochés d'ici au 31 décembre 2002 pour « rationaliser » leur fonctionnement et les institutions regroupées selon des modalités arrêtées avant le 30 juin 2001. Le niveau des frais de gestion et d'action sociale sera fixé par les partenaires sociaux d'ici au 31 mars 2001.
Le texte prévoit que « dès la réforme du régime général décidée, les partenaires sociaux engageront des négociations pour adapter les régimes de retraite complémentaire ».
... et le financement du surcoût des retraites à 60 ans
Pour préserver jusqu'au 31 décembre 2002 la capacité d'assumer le financement du surcoût pour l'AGIRC et l'ARRCO des retraites liquidées à partir de 60 ans dans les conditions actuelles, l'accord programme la création d'une Association pour la gestion du fonds de financement (AGFF) de l'AGIRC et de l'ARRCO, gérée de façon paritaire et qui se substituera à l'Association pour la structure financière (ASF). Une cotisation sur les salaires, versée à compter du 1er avril 2001, supportée par les employeurs et les salariés relevant des régimes AGIRC-ARRCO, devraient lui être affectée. Son taux, supérieur à celui de l'ASF, sera de :
2 % (au lieu de 1,96 % pour l'ASF) sur la tranche A de rémunérations (limitée au plafond de la sécurité sociale, soit jusqu'à 14 950 F), supportés à raison de 1,20 % par les employeurs et 0,80 % par les salariés ;
2,20 % (au lieu de 2,18 %) sur la tranche B des rémunérations (comprise entre 1 fois et 4 fois le plafond de la sécurité sociale, de 14 950 F à 59 800 F), à raison de 1,30 % pour les employeurs et 0,90 % pour les salariés.
Il est prévu que l'AGFF conclue avec l'AGIRC et l'ARRCO une convention de gestion afin que ces cotisations soient recouvrées par les institutions de retraite complémentaire dans les mêmes conditions que les cotisations des deux régimes (1).
Cette structure assumera l'ensemble des dépenses supportées antérieurement par l'ASF depuis le 1er janvier 2001. Elle reprendra intégralement les créances et les dettes de l'ancienne ASF.
Le texte ne précise rien sur la cotisation ASF au 1er trimestre 2001. Le Medef a simplement affirmé, le 13 février, qu'en l'absence d'accord sur la reconduction de l'ASF, la cotisation ne pouvait pas être levée. Dès lors, selon l'organisation patronale, les entreprises et les salariés qui auraient payé la cotisation ASF devraient être remboursés. Et les pensions liquidées dès 60 ans au cours de cette période seraient financées sur les réserves de l'ASF.
(1) La cotisation ASF était gérée par l'Unedic.