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Réforme de la loi de 1975

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Serpent de mer du secteur, le projet de loi rénovant l'action sociale et médico-sociale a enfin été soumis à l'Assemblée nationale en première lecture, les 31 janvier et 1er février 2001. Dans l'attente de son adoption définitive, nous présentons les principaux amendements adoptés par les députés.

La loi sociale du 30 juin 1975 régit les procédures de création, d'autorisation et de tarification des établissements et des services sociaux et médico-sociaux. Elle définit également les rapports entre les organismes gestionnaires de structures, les usagers et les collectivités publiques.

Les modifications qu'elle a connues au fil des années,sans réelle coordination, ont contribué à son manque de lisibilité. Parallèlement, de nouvelles formules d'établissements ont vu le jour et se sont multipliées (lieux de vie, services d'accompagnement à la vie sociale...), sans que leur existence juridique soit reconnue par la loi. Les nombreuses critiques sur l'incapacité de ce texte à s'adapter à l'évolution du contexte social, formulées tant par la Cour des comptes que par l'inspection générale des affaires sociales, en 1995, ou encore par les acteurs concernés, ont conduit, en 1996, Jacques Barrot, alors ministre des Affaires sociales, à lancer les premières pistes d'un projet de réforme. La dissolution du Parlement et l'arrivée d'un nouveau gouvernement devaient retarder le projet. Après moult avant-projets et travaux parlementaires conduits par Pascal Terrasse (1), député socialiste de l'Ardèche, une mouture finale était enfin présentée par Martine Aubry, alors ministre de l'Emploi et de la Solidarité, lors du conseil des ministres du 26 juillet 2000 (2).

Selon Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés (3),qui défend ce texte devant le Parlement, le projet de loi « rénovant l'action sociale et médico-sociale » s'articule autour de quatre orientations :

• promouvoir les droits des bénéficiaires et de leur entourage en affirmant« leur droit à une citoyenneté de plein exercice » ;
• élargir les missions de l'action sociale et médico-sociale et diversifier les interventions des établissements et des services ;
• améliorer les procédures techniques de pilotage du dispositif en favorisant la planification, en rénovant le régime des autorisations et en adaptant la tarification ;
• coordonner les décideurs, les acteurs et organiser de façon plus transparente leurs relations, en améliorant les procédures de partenariat et de concertation.

Ce texte a été soumis aux députés les 31 janvier et 1er février. Nous en présentons aujourd'hui les principaux amendements. Ceux-ci pourront toutefois être modifiés, voire supprimés, par le Sénat, prochainement saisi en première lecture. Notons cependant que la plupart d'entre eux ont reçu l'approbation unanime des députés, toutes tendances confondues, ainsi que celle du gouvernement.

L'urgence ayant été déclarée par le Premier ministre, le vote final pourrait ainsi avoir lieu avant la fin de la session parlementaire, soit en juin 2001.

Les missions de l'action sociale ou médico-sociale

Conscient de la diversification des techniques de prise en charge et d'interventions sociales et médico-sociales depuis la loi du 30 juin 1975, le gouvernement souhaite donner un cadre législatif rénové au secteur médico-social. A cet effet, le projet de loi définit les fondements et les missions de l'action sociale.

L'Assemblée nationale a enrichi le texte initial sur plusieurs points. En premier lieu, elle a affirmé lecaractère interministériel de l'action sociale et médico-sociale. Elle a également complété les missions de ce secteur. Parmi ces dernières figurent notamment l'évaluation et la prévention des risques sociaux et médico-sociaux, la protection administrative et judiciaire de l'enfance, les actions éducatives, médico-éducatives,thérapeutiques, pédagogiques et, désormais, deformation adaptée aux besoins de la personne, à son niveau de développement ainsi qu'à son âge. En revanche, les parlementaires ont refusé de légiférer sur la question de l'intégration des handicapés dans les écoles, renvoyée à la réforme en préparation sur la loi d'orientation en faveur des handicapés, également du 30 juin 1975(4).

Ils ont précisé d'autre part le rôle des gestionnaires des établissements sociaux et médico-sociaux : les missions dans ce secteur« sont accomplies par des personnes physiques ou des personnes morales de droit public ou privé gestionnaires des établissements et services sociaux et médico-sociaux[...] au moyen de prestations diversifiées délivrées à domicile, en milieu de vie ordinaire, en accueil familial ou dans une structure de prise en charge ».

Les droits des usagers

L'un des axes majeurs de la réforme de la loi de 1975 consiste en une meilleure prise en compte de l'usager. Selon son exposé des motifs, le projet de loi initial cherche à « rompre avec une logique d'assistance et de prise en charge au sein de laquelle les avis des bénéficiaires sont rarement pris en compte ».

Aussi, définit-il, quelle que soit la structure d'accueil, les droits fondamentaux des usagers(intégrité physique et morale,sécurité, dignité, vie privée...). Les débats parlementaires les ont renforcés en prévoyant également pour les intéressés un droit à la protection à côté du droit à l'autonomie d'une part et à un accompagnement de qualité d'autre part. En outre, pour les personnes atteintes d'un handicap mental ou les plus vulnérables, qui ne sont pas toujours en mesure d'exercer leurs droits, le recours à leur représentant légal devrait être introduit. Enfin, la garantie d'« un accès équitable sur l'ensemble du territoire » aux établissements sociaux et médico-sociaux serait mieux mise en valeur.

Par ailleurs, l'Assemblée nationale a inséré le droit pour l'usager de participer directement ou avec l'aide de son représentantà la conception et à la mise en œuvre du projet d'accueil et d'accompagnement qui le concerne ainsi qu'à l'élaboration du contrat de séjourou du document individuel de prise en charge qui devra être mis en place par les structures médico-sociales.

Quant à la charte des droits et libertés annexée au livret d'accueil remis par l'établissement à la personne accueillie (ou à son représentant légal), elle sera arrêtée par les ministres compétentsaprès consultation de la section sociale du Comité national de l'organisation sanitaire et sociale (CNOSS),précise le texte à ce stade des discussions. L'usager ou, désormais, son représentant légal peut, en outre, recourir, en cas de difficultés, aux services d'unmédiateur. Mais avant les débats, ce dernier n'avait pas à lui rendre compte de ses interventions. Un point sur lequel les députés sont également revenus.

Le projet de loi instaure l'obligation pour tous les établissements d'établir un règlement de fonctionnement définissant les droits et obligations des personnes accueillies. Ce règlement doit être arrêté après consultation d'un conseil de la vie sociale, qui se substitue aux conseils d'établissement antérieurs. Cette instance deviendrait obligatoire dans certaines catégories d'établissements ou services dont la liste serait précisée par décret. Il est renvoyé au pouvoir réglementaire le soin de définir la composition et les compétences de ce conseil. La possibilité d'autres formes de participation serait reconnue.

Enfin, le règlement de fonctionnement ne devrait plus être communiqué au préfet, aux autorités ayant délivré l'autorisation ou reçu la déclaration, ni au maire de la commune d'implantation. En effet, cette mention a été supprimée par l'Assemblée nationale.

Les schémas d'organisation sociale et médico-sociale

La révision des schémas

En vue d'améliorer la planification des équipements et des services médico-sociaux, le projet de loi prévoit de remplacer les actuels schémas départementaux par des schémas d'organisation sociale et médico-sociale au niveau national,régional ou départemental, ce dernier échelon ayant la priorité. Pluriannuels et réactualisés tous les 5 ans, ils doivent susciter les évolutions nécessaires de l'offre sociale et médico-sociale pour satisfaire de manière optimale les besoins de la population. Le texte initial pose des règles quant à leur contenu et à leurs caractéristiques.

Elaborés, selon les cas, par différentes autorités variables selon leur niveau national,régional ou départemental (président du conseil général, représentant de l'Etat dans le département ou les deux conjointement pour les schémas départementaux), les schémas pourraient être révisés à tout moment,mais uniquement à la demande de l'une de ces autorités, a précisé l'Assemblée.Cela ne signifie pas que les associations ne pourront demander leur révision, indique Francis Hammel, rapporteur du projet de loi, mais uniquement qu'elles ne pourront l'obtenir de droit(Rap. A.N. n° 2881, janvier 2001, Hammel,Page 57).

Les schémas départementaux

Aucune sanction n'est prévue en l'absence de schéma départemental alors que son instauration est obligatoire. C'est sur ce point que l'Assemblée nationale est revenue. Ainsi, elle dispose que « si les éléments du schéma [départemental]n'ont pas été arrêtés dans les conditions définies [...], soit dans un délai de 2 ans après la publication de la présente loi, soit dans un délai d'un an après la date d'expiration du schéma précédent, le représentant de l'Etat dans le département dispose de 3 mois pour arrêter ledit schéma ». Pour le rapporteur, cet amendement « crée un verrou pour éviter des situations trop fréquentes,lorsque, pour les personnes handicapées adultes, par exemple, il n'existe aucun schéma départemental » (J.O.A.N. (C.R.) n° 10 du 1-02-01).

En outre, les schémas départementaux devraient être étendus aux lieux de vie. Il est précisé que ces structures devront respecter les règles relatives aux droits des usagers.

Le rôle des CROSS

Enfin, le rôle des comités régionaux de l'organisation sanitaire et sociale (CROSS) serait élargi.Ils donneraient leur avis sur l'élaboration des schémas régionaux. Ils recevraient également,pour information, les schémas départementaux et régionaux.

Accueil des jeunes enfants

Dans le droit fil de la réforme des structures d'accueil pour les jeunes enfants (5) , un amendement crée une commission départementale de l'accueil des jeunes enfants, instance de réflexion, de conseil, de proposition et de suivi sur toute question relative à l'organisation, au fonctionnement et au développement des modes d'accueil des jeunes enfants et à la politique générale conduite dans le département. Placée auprès du président du conseil général, cette commission comprendrait notamment des représentants des collectivités territoriales, des services de l'Etat, des caisses d'allocations familiales, d'associations, de gestionnaires et de professionnels,ainsi que des représentants d'usagers.

Les établissements sociaux et médico-sociaux

La liste des structures

Les foyers de jeunes travailleurs conventionnés au titre de l'aide personnalisée au logement (APL)réapparaissent expressément dans la liste des établissements et services médico-sociaux. Ils figuraient déjà dans la loi du 30 juin 1975 mais avaient été exclus du projet de loi initial.

S'agissant des établissements d'accueil des personnes handicapées, il est indiqué qu'ils devraient les accueillir quel que soit leur âge.Cette précision vise à prendre en compte le cas des personnes handicapées vieillissantes. Actuellement, en effet, ces publics bénéficient d'un accueil spécifique jusqu'à leurs 60 ans. Au-delà, ils sont pris en charge comme les retraités. Les foyers d'accueil médicalisés - foyers à double tarification - sont par ailleurs explicitement insérés dans la liste.

Plusieurs dispositions intégrées par l'Assemblée nationale concernent les centres de réadaptation, de préorientation et de rééducation professionnelle. La région ayant des compétences en matière de formation professionnelle, le régime de ces centres est aménagé. Ainsi, les schémas nationaux et départementaux d'organisation sociale et médico-sociale ne pourront porter sur eux. Ils pourront en revanche figurer dans les schémas régionaux. Le comité régional de la formation professionnelle, de la promotion sociale et de l'emploi (Coref) et le conseil régional émettront un avis sur tous les projets de création, d'extension ou de transformation de ces centres.Rappelons que pour les autres établissements et services médico-sociaux, l'autorisation est précédée de l'avis du comité de l'organisation sanitaire et social compétent. Enfin,l'autorisation sera délivrée par le représentant de l'Etat dans la région si elle est compatible avec les besoins et débouchés recensés en matière de formation professionnelle.

En revanche, les parlementaires ont refusé de placerles associations gestionnaires dans la liste des institutions sociales et médico-sociales. Pour le rapporteur, « il ne faut pas confondre [...] les associations avec les institutions chargées de la prise en charge de l'accueil des personnes concernées. Les associations ne sont pas en tant que telles, des institutions sociales et médico-sociales » (Rap. A.N.n° 2881, janvier 2001, Hammel).

L'accueil temporaire

Par ailleurs, le texte amendé reconnaît officiellement l'accueil temporaire des personnes handicapées ou atteintes de démence sénile,symbole « d'un véritable droit au répit des familles ». Toutefois, Dominique Gillot a jugé devant les députés plus« raisonnable d'introduire cette notion dans la loi[...] en écrivant que c'est par le règlement que nous parviendrons à satisfaire aux obligations [qu'elle]entraîne », notamment en ce qui concerne les conditions de financement (J.O.A.N. (C.R.) n° 11 du 1-02-01).

Les personnels de direction

Contre l'avis du gouvernement, l'Assemblée nationale a retenu que la direction des établissements sociaux et médico-sociaux serait assurée par des professionnels,renvoyant à un décret la fixation du niveau de qualification après consultation de la branche professionnelle concernée.

La protection des publics accueillis

Surtout, les députés ont introduit une disposition très importante annoncée dans le cadre du plan contre la maltraitance, le 26 septembre 2000 (6), afin de prévenir certaines violences et récidives éventuelles de la part des intervenants dans les établissements sociaux et médico-sociaux déjà condamnés. Ainsi, le texte amendé énonce qu'« est incapable d'exploiter, de diriger tout établissement, service ou structure, [...]d'y exercer une fonction, à quelque titre que ce soit, ou d'être agréée, toute personne condamnée définitivement pour crime », ou condamnée pour les délits pour :

• atteintes à la vie des personnes ;
• atteintes à l'intégrité physique ou psychique de la personne parmi lesquelles les actes de tortures, de violences, et les agressions sexuelles ;
• mises en danger de la personne (à l'exception de l'expérimentation sur la personne humaine) ;
• atteintes aux libertés de la personne(à l'exception du détournement d'aéronef, de navire, ou de tout autre moyen de transport) ;
• atteintes à la dignité de la personne ;
• atteintes aux mineurs et à la famille.

Les établissements qui accueillent des personnes vulnérables (personnes âgées, enfants,handicapés) sont concernés. Cet amendement« de précaution » a reçu le soutien de Dominique Gillot, qui a néanmoins souligné que les affaires« scandaleuses » récentes étaient « exceptionnelles ». Il complète la disposition sur la protection des salariés qui signalent des faits de maltraitance,insérée dans la proposition de loi de lutte contre les discriminations en cours d'examen devant le Parlement.

Le conseil supérieur des établissements et services sociaux et médico-sociaux

Enfin, l'Assemblée nationale a instauré unConseil supérieur des établissements et services sociaux et médico-sociaux, compétent pour donner un avis sur les problèmes généraux relatifs à l'organisation de ce secteur, notamment sur les questions concernant le fonctionnement administratif, financier et médical des établissements et services sociaux et médico-sociaux. Composé de parlementaires, de représentants de l'Etat, des organismes de sécurité sociale et des collectivités territoriales intéressées, des personnes morales gestionnaires d'établissements et services sociaux et médico-sociaux, des personnels, des usagers et de personnalités qualifiées, il devrait être présidé par un parlementaire.

Le régime des établissements

L'autorisation

L'une des innovations du projet de loi consiste dans la rénovation du régime des autorisations (fixation d'une durée déterminée, instauration d'un dispositif dit « des fenêtres »,compatibilité entre l'autorisation et le schéma...).L'idée est, en effet, de clarifier leur régime et d'instaurer un lien entre autorisation, planification et programmation des équipements. En outre, il substitue au régime de l'autorisation tacite actuellement en vigueur, un dispositif de refus tacite. Dès lors, il dispose que l'absence de notification d'une réponse dans les 6 mois suivant l'expiration de l'une des périodes de réception des demandes d'autorisation vaut rejet de la demande. L'Assemblée nationale a aménagé ce principe. Les intéressés pourraient solliciter, dans les 2 mois du refus, les motifs qui l'ont justifié, ceux-ci devant leur être notifiés dans le mois. Dans ce cas, le délai de recours contentieux contre la décision de rejet serait prorogé de 2 mois à compter du jour où les motifs leur auraient été communiqués. A défaut,l'autorisation serait réputée acquise.L'Assemblée nationale a instauré ainsi une clause de sauvegarde plus favorable aux associations qui se montraient critiques sur cette question. « Les autorisations tacites ne sont pas supprimées mais la procédure bénéficiera en amont d'un cliquet de sécurité compatible avec le respect du principe de motivation des actes administratifs », a expliqué Dominique Gillot. « On favorisera la transparence en obligeant l'administration à justifier son refus. Si celle-ci ne répond pas dans les délais,cela vaudra autorisation tacite » (J.O.A.N. (C.R.)n° 11 du 2-02-01). Enfin, la secrétaire d'Etat s'est engagée à prévoir, par voie réglementaire, que l'administration ferait connaître aux intéressés ses décisions de classement des demandes d'autorisation ou de renouvellement.

La coordination

Pour favoriser la coordination des établissements sociaux et médico- sociaux, le projet de loi ouvre la faculté, pour ces structures, de conclure des conventions entre elles mais également avec les établissements de santé. Désormais, de tels accords seraient également possibles avec les établissements publics locaux d'enseignement et les établissements d'enseignement privés. L'objectif est de faciliter l'accueil des enfants handicapés en milieu scolaire et les moyens de leur scolarisation dans les établissements spécialisés.

L'évaluation

L'évaluation de la qualité et de l'efficience des prestations sociales et médico-sociales devenant une exigence légitime des usagers comme des autorités allouant les ressources financières, le projet de loi initial généralise cette pratique. Dans cet objectif,il instaure un Conseil national de l'évaluation sociale et médico-sociale chargé d'élaborer les références et recommandations de bonnes pratiques professionnelles. Le renouvellement de l'autorisation est lié à une évaluation positive de l'activité. Pour renforcer ce mécanisme et le rendre plus indépendant, le texte amendé dispose que les résultats de ce processus d'évaluation seront communiqués tous les 5 ans à l'autorité ayant délivré l'autorisation. Dominique Gillot a approuvé cette modification estimant que « la transmission des résultats de l'évaluation tous les 5 ans, tout en conservant la périodicité de renouvellement de l'autorisation tous les 10 ans[constitue un] rendez-vous à mi-parcours très intéressant » (J.O.A.N. (C.R.)n° 11 du 2-02-01). En outre, tout en rejetant l'idée d'une « ANAES sociale » (7), l'Assemblée nationale a retenu que les établissements et services feraient procéder à l'évaluation de leurs activités et de la qualité de leurs prestations par un organisme extérieur, leur liste étant fixée par décret après consultation du Conseil national.L'idée est ainsi de rompre avec une forme d'auto-évaluation et de garantir son indépendance.

Enfin, elle a introduit dans la composition du Conseil national de l'évaluation la présence d'un représentant des trois instances représentatives des personnes accueillies dans les établissements :Conseil national représentatif des personnes âgées, Conseil national consultatif des personnes handicapées et Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Pour le rapporteur, les usagers et les associations seraient ainsi bien représentés (Rap. A.N. n° 2881, janvier 2001, Hammel).

Autres dispositions

• Contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens. Le projet de loi initial prévoit la possibilité de conclure de tels contrats entre les personnes physiques et morales gestionnaires d'établissements et services et les autorités chargées de la délivrance de l'autorisation. Leur durée serait de 5 ans au maximum, et non plus comprise entre 3 et 5 ans.Outre la réalisation des objectifs du schéma d'organisation sociale et médico-sociale et la mise en œuvre du projet d'établissement, ils permettront la coopération des actions sociales et médico-sociales.
• Contentieux tarifaire. Les commissions interrégionales de la tarification sanitaire et sociale se verraient conférer la qualité de juridiction. Elles deviendraient les tribunaux interrégionaux de la tarification sanitaire et sociale. Il en est de même pour la section permanente du Conseil supérieur de l'aide sociale, transformée en Cour nationale de la tarification sanitaire et sociale. Ces instances auraient les compétences des juridictions administratives,notamment des pouvoirs d'injonction lorsque l'autorité tarifaire n'a pas fixé les tarifs dans les délais.
• Etablissements publics. Certaines règles applicables aux établissements publics sociaux et médico-sociaux devraient être également enrichies. Ainsi, les anciens directeurs de tels établissements ne pourraient pas appartenir au conseil d'administration de l'établissement dans lequel ils ont exercé, afin d'éviter les situations complexes qui peuvent en résulter. Ce conseil se verrait par ailleurs confier une nouvelle attribution : délibérer sur les contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens. Surtout, dans chaque établissement public social ou médico-social devrait être institué un comité technique d'établissement à l'image de ceux existant dans les établissements publics de santé depuis la loi du 31 juillet 1991.
• CCAS. Le rôle des communes en matière médico-sociale sera aussi réaffirmé, ces dernières pouvant, par le biais des centres communaux et intercommunaux, créer et gérer en services non personnalisés des institutions sociales et médico-sociales (foyers-logements,maisons de retraite...).
• Comité national de l'organisation sanitaire et sociale. Selon le projet de loi, le ministre chargé des affaires sociales présentera,chaque année, un rapport à la section sociale du Comité national de l'organisation sanitaire et sociale sur la mise en œuvre des mesures prévues par les lois de finances et de financement de la sécurité sociale.L'Assemblée a limité cependant cette information aux mesures concernant le domaine médico-social.

Le contrôle

L'Assemblée nationale a également aménagé les procédures de contrôle mises en place par le projet de loi initial. Les représentants du personnel devraient être informés en cas d'injonction adressée à un établissement pour qu'il remédie aux infractions ou aux dysfonctionnements constatés dans le gestion, susceptibles d'affecter la prise en charge des usagers.

Par ailleurs, l'avis du comité national ou régional d'organisation sanitaire et sociale, selon le cas, ne serait plus requis préalablement à la décision de l'autorité compétente de mettre fin à l'activité d'un établissement qui ne serait pas soumis au régime de l'autorisation.

Le financement des structures

Les autorités compétentes en matière tarifaire

Les députés ont déterminé les autorités compétentes en matière de tarification des foyers à double tarification pour les adultes handicapés (représentant de l'Etat pour les prestations de soins remboursables aux assurés sociaux,président du conseil général pour les prestations relatives à l'hébergement et à l'accompagnement à la vie sociale). Déjà insérés dans la liste des établissements sociaux et médico- sociaux, il est ainsi donné une assise législative à ces structures(8). Pour mémoire, leur régime défini par circulaire avait en effet été censuré par le Conseil d'Etat dans un arrêt du 30 juin 1999 pour défaut de base légale.

En outre, le texte amendé autorise la signature de conventions entre les conseils généraux pour confier le pouvoir de tarification à un autre département que celui où l'établissement est implanté. Il s'agit d'éviter les disparités en matière de tarifs entre les différents départements utilisateurs d'un même établissement.

Le régime budgétaire et tutelle

Les règles relatives à la procédure budgétaire applicable aux établissements sociaux et médico-sociaux ont été clarifiées par l'Assemblée nationale. A cet égard, le délai d'approbation des dépenses budgétaires globales et de fixation des tarifs par les autorités compétentes (Etat, département) passerait de 90 jours- dans le projet de loi initial - à 60 jours à compter de la date de notification des enveloppes régionales.

De plus, la tutelle sur les décisions budgétaires courantes de ces établissements sera allégée. L'approbation par l'autorité de tutelle des décisions modificatives de crédits deviendrait ainsi tacite avec un droit d'opposition alors qu'une approbation expresse était requise dans le texte initial. Enfin, l'autorité de tutelle devrait apprécier le coût de fonctionnement d'un établissement par rapport aux autres établissementsfournissant des prestations comparables en termes qualitatifs, ce qui n'était pas exigé antérieurement.

Les établissements hébergeant des personnes âgées

Les établissements d'hébergement de personnes âgées à but lucratif sont régis par la loi du 6 juillet 1990. Ils fixent librement de manière contractuelle, avec le résident, le prix de l'hébergement sous réserve de l'application des règles de concurrence. L'Assemblée nationale a adopté un amendement précisant que les établissements privés dont l'activité principale consiste à héberger des bénéficiaires de l'aide sociale ne relèvent pas du régime des prix conventionnels. Il s'agit de garantir une égalité de traitement pour toutes les personnes âgées accueillies dans une maison de retraite dont l'activité principale consiste à héberger des bénéficiaires de l'aide sociale. « Une différence de mode de prise en charge ne doit pas entraîner de différence de prix, car les coûts sont identiques », a souligné le rapporteur(J.O.A.N. (C.R.) n° 11 du 2-02-01).

Sophie André

Des réactions globalement positives

Du côté des associations, les premières réactions expriment plutôt la satisfaction. Le vote unanime de l´Assemblée nationale est accueilli comme un fait très positif. Ce débat consensuel « n'est pas unique dans les annales, mais il est assez rare pour être noté », se félicite Jean-Paul Péneau, directeur général de la FNARS. Cela n'empêche pas Jean-Jacques Andrieux, directeur général de l'Unasea,de regretter la procédure d'urgence retenue pour la discussion parlementaire, « alors que rien dans le texte ne la justifie ». C'est, selon lui, le« signe que l'on n'avait pas envie d'avoir un grand débat, sur des sujets qui l'auraient pourtant mérité », même s'ils ne sont pas« grand public ».
D'une façon générale, bon nombre d'amendements suggérés par les associations ont été intégrés dans le texte, par exemple la reconnaissance« très symbolique mais essentielle » du caractère interministériel de l'action sociale et médico-sociale. Des avancées ont été également obtenues sur le champ d'application de la loi, qui inclut désormais « un véritable accueil et l'accompagnement des personnes », se réjouit l'APF. De plus, elle permet officiellement aux établissements de recevoir les personnes handicapées sans barrière d'âge, souligne l'Uniopss. La place de l'accueil temporaire est également affirmée, se félicite le Groupe de réflexion et réseau pour l'accueil temporaire des personnes handicapées (GRATH).Autre progrès important, relevé notamment par l'UNADMR : l'intégration dans le texte des services d'aide à domicile pour les personnes âgées et handicapées. Par contre, les services intervenant en direction des familles n'y figurent toujours pas, malgré la demande des grandes fédérations. Enfin, l'inscription des lieux de vie est un grand pas en avant. Quoique l'Association pour l'étude et la promotion des structures intermédiaires déplore de ne pas avoir obtenu les modifications souhaitées pour « une reconnaissance sans équivoque ».

La place est faite aux usagers, pas aux associations

La partie du texte consacrant les droits des usagers fait l'objet d'un satisfecit général. C'est« une grande avancée pour le secteur », souligne par exemple le Snapei. L'Uniopss et l'Unasea approuvent également les nuances introduites à propos du conseil de la vie sociale en fonction des publics accueillis. De même, l'Uniopss apprécie que l'objectif de recherche de l'autonomie des personnes soit complété par la référence aux nécessités de la« protection » des plus fragiles.
De l'avis général, la place des associations gestionnaires, ignorée dans la version initiale du texte,est désormais mieux mise en évidence par l'article premier. Cependant, estime Jean-Jacques Andrieux, la suite« reste très marquée par une logique de contrôle de l'administration sur chaque établissement ou service. Sur ce plan, les associations, qui sont pourtant pénalement et civilement responsables de ce qui s'y passe,ne sont pas reconnues comme les interlocuteurs naturels. » De même, elles ne sont pas représentées, en tant que telles, dans les instances qui établiront les schémas départementaux ou régionaux, regrette-t-il. Bref, « la portion congrue est laissée aux associations comme acteurs des politiques sociales », juge l'Association nationale des communautés éducatives (ANCE). Sans compter le refus opposé à la reconnaissance du rôle des fédérations ou des groupements d'associations,pointé en particulier par la FNARS.
L'intervention d'un organisme externe pour l'évaluation de la qualité des prestations fournies par les établissements et services est considérée comme une bonne chose par l'ANCE, le Snapei, la Fédération hospitalière de France (FHF),l'Unasea... L'ANCE souligne toutefois que son financement n'est pas évoqué.

D'accord pour la rigueur, à condition...

Par contre, les modalités de contrôle,administratif et financier, sont discutées. Si la FHF se félicite que ce contrôle soit renforcé et se rapproche du droit commun, l'Adehpa, au contraire, s'insurge contre« le renforcement des contrôles a priori » sur tous les établissements, les préférant ciblés pour permettre« la fermeture effective des 5 %d'établissements qui dysfonctionnent ». Par ailleurs, note-t-elle, l'administration est sous-équipée pour renouveler tous les 10 ans« l'autorisation de 23 000 établissements ».
En matière de planification, le renforcement des schémas départementaux, qui « feront référence », contente notamment la FHF, même si elle regrette que la « logique de régionalisation n'ait pas été plus poussée ». L'Adehpa considère, pour sa part, que ce sont « les enveloppes financières qui seront opposables » et non plus les« besoins des populations ». L'Uniopss continue, elle, de demander une « régulation équilibrée » entre les besoins sociaux et les impératifs comptables. Et rappelle son souhait d'une« consultation du CNOSS en amont de l'élaboration des lois de finances et de financement de la sécurité sociale ».
Le compromis intervenu sur le régime d'autorisation -la non- réponse continue à valoi rejet, mais les motifs de refus pourront être demandés à l'administration - semble un moindre mal pour beaucoup. Les nouvelles dispositions vont surtout allonger les délais de réponse, déplore Marie-Sophie Desaulle,présidente de l'APF. Préoccupation voisine pour Jean-Jacques Andrieux, de l'Unasea, qui désapprouve l'imprécision des délais de réponse de l'administration en matière tarifaire. « La loi aurait pu être l'occasion de moderniser les relations entre les gestionnaires et leur tutelle. On peut demander aux associations plus de clarté et de rigueur dans la gestion,mais à condition de donner l'exemple. »
Au total, les organismes et associations pensent encore pouvoir obtenir quelques améliorations lors des prochaines étapes du débat. Jean-Paul Péneau espère aussi que la discussion au Sénat ne s'attardera pas trop longtemps sur les problèmes de« clarification des compétences,c'est-à-dire de partage des pouvoirs, que le gouvernement n'a pas voulu aborder dans ce texte, mais que les départements souhaitent remettre sur la table ». Reste que la loi« renvoie à beaucoup, beaucoup de décrets d'application, ce qui nuit à sa lisibilité », déplore la FHF. Et reporte à plus tard une « appréciation définitive sur un dispositif globalement pertinent ».
Marie-Jo Maerel

Notes

(1) Voir ASH n° 2160 du 31-03-00.

(2) Voir ASH n° 2177 du 25-08-00.

(3) A présent secrétaire d'Etat aux personnes âgées et aux personnes handicapées.

(4) Voir ASH n° 2200 du 2-02-01.

(5) Voir ASH n° 2177 du 25-08-00.

(6) Voir ASH n° 2182 du 29-09-00.

(7) Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé.

(8) Voir ASH n° 2179 du 8-09-00.

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