Avec 12 000 morts par an, le suicide fait nettement plus de victimes que les accidents de la route. La France est l'un des pays européens les plus touchés, pourtant le sujet y reste tabou. Les 140 000 tentatives annuelles sont « souvent minimisées ou banalisées par les professionnels et l'entourage familial », a-t-il été rappelé lors de la Ve journée nationale organisée, le 5 février, par l'Union nationale pour la prévention du suicide (1). L'occasion pour Dominique Gillot, alors secrétaire d'Etat à la santé et aux personnes handicapées, de rappeler les actions gouvernementales lancées dans le cadre de la stratégie française de prévention du suicide pour 2000-2005 (2).
C'est également ce jour-là que l'Inserm a rendu publique une enquête réalisée dans la Gironde, en mars-avril 2000, par le biais des infirmières scolaires, auprès de 1 000 lycéens. Une population « à risque » puisque l'on dénombre 40 000 tentatives et 800 décès par an chez les 15-24 ans. Les résultats (3), présentés par l'épidémiologiste Marie Choquet et le psychiatre Xavier Pommereau, offrent des pistes en matière de prévention.
Contrairement aux idées reçues, les candidats au suicide ne vivent pas en marge, tristes, isolés, repliés sur eux-mêmes. Ils ont quasiment les mêmes loisirs que leurs condisciples. En revanche, ils multiplient les comportements à risques et les pratiques excessives : ils fument et boivent deux fois plus que les autres, fuguent, absorbent des psychotropes et « se font mal » trois ou quatre fois plus que les autres. Ce sont aussi des « sur-consultants du milieu médical », mais ils ne font que « consommer des soins à la chaîne, au coup par coup ».
Il est donc important de « prendre au sérieux ces signaux de détresse » et de les détecter à temps. La première tentative de suicide ayant souvent lieu avant 15 ans, les enquêteurs préconisent de mettre en place des infirmeries dans les collèges, de procéder à des examens systématiques et de suivre les sujets à risque dès la 6e. Il faut aussi aborder le sujet avec discernement mais sans craindre « de leur donner de mauvaises idées ». Dans la majorité des cas, les jeunes ont d'ailleurs envie d'en parler, même s'ils ne le font pas spontanément, constatent les infirmières. A elles, ensuite, de les orienter vers des professionnels de santé, qui doivent « traiter la maladie mentale comme les autres ». Neuf suicidants sur dix ne sont pas hospitalisés lors de leur première tentative (4), constate l'enquête, « comme si la gravité du geste était sous- estimée en présence d'un jeune de moins de 20 ans ».
(1) UNPS : 36, rue de Gergovie - 75014 Paris - Tél. 01 45 45 68 81.
(2) Voir ASH n° 2181 du 22-09-00.
(3) Disp. auprès de l'unité Inserm 472 à Villejuif - Tél. 01 45 59 52 25 - Ou sur le site Internet : http://ifr69. vjf. inserm. fr/~ado472.
(4) Sur ce sujet, voir aussi ASH n° 2152 du 4-02-00.