« Historique. » C'est ainsi que le bâtonnier de Paris, Francis Teitgen, a qualifié la grève totale des avocats du 12 décembre. En effet, le barreau de Paris, qui représente plus du tiers des 35 000 avocats français, s'est joint pour la première fois au mouvement, lancé mi-octobre par les barreaux des régions (1). La profession exige une revalorisation des indemnisations dans le cadre de l'aide juridictionnelle afin de rendre un service de meilleure qualité aux plus démunis. Trop mal rémunérés - 576 F, par exemple, pour une commission d'office -, les avocats se disent encouragés à « faire de l'abattage ». Evénement rare également, les magistrats, à travers le Syndicat de la magistrature et l'Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire), soutiennent leurs collègues. « Les avocats et magistrats solidaires souhaitent alerter l'opinion publique sur l'état de délabrement de la justice française », déclare ainsi l'USM, dans un communiqué conjoint avec la Fédération nationale des unions de jeunes avocats. Bref, si ce mouvement est historique, c'est aussi parce que tous les professionnels du droit rejoignent les travailleurs sociaux pour dénoncer une justice inadaptée aux plus démunis (2).
Ce mouvement va-t-il perdurer ? Les négociations semblaient pourtant bien engagées entre les avocats et le ministère de la Justice. Les premiers ont déjà obtenu la création d'un groupe de travail, piloté par Paul Bouchet, président d'ATD quart monde, chargé de mettre à plat l'aide juridictionnelle. Laquelle devait être installée officiellement le 13 décembre (3). Par ailleurs, la garde des Sceaux a accordé un doublement du nombre des unités de valeur (base sur laquelle est calculée chaque intervention d'un avocat) pour les affaires de droit au logement, d'étrangers en situation irrégulière, celles renvoyées en correctionnelle, les comparutions immédiates et les tribunaux pour enfants.
Pourtant, les négociations ont été brusquement rompues le 6 décembre car les avocats n'ont pas obtenu gain de cause en matière de prud'hommes et de divorce pour faute. Ils menacent de reprendre leur mouvement le 18 décembre. Toutefois, Marylise Lebranchu devait présenter de nouvelles propositions le 13 décembre, afin de « sortir le plus rapidement possible [du conflit] pour les avocats et les justiciables avant tout ». P.D.
(1) Voir ASH n° 2185 du 20-10-00
(2) Voir ASH n° 2133 du 17-09-99.
(3) Voir ASH n° 2191 du 1-10-00.