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RMI : le Territoire de Belfort fait son autocritique

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Retenu dès 1988 comme département pilote pour expérimenter le revenu minimum d'insertion (RMI), le Territoire de Belfort a procédé, plus de dix ans après, à une intéressante évaluation du dispositif (1)... qui a le grand mérite d'être sans complaisance.

Confiée à trois jeunes chargés d'études, appuyés par deux universitaires, l'investigation ne prétendait pas faire le tour de la question. Elle ne traite pas, notamment, des parcours d'insertion, ni de la dynamique locale de l'offre d'insertion, pas plus que des aspects financiers du RMI. Par contre, elle s'est attachée à écouter la « parole des usagers » , puis à « s'immerger  » dans les services qui les accueillent et examinent les dossiers.

Les « figures différenciées » des usagers

Parmi ses 137 400 habitants, le Territoire de Belfort compte 2 050 allocataires du RMI. L'état civil des bénéficiaires se situe dans la moyenne nationale, mais leur rotation est un peu plus rapide (80 % renouvelés en cinq ans). A la fin 1998,121 personnes (6 %) présentes dès l'origine étaient toujours dans le dispositif.

Les 26 longues interviews des usagers font ressortir des « figures différenciées » entre ceux qui croient en l'avenir (les deux tiers) et ceux qui n'y croient plus, les habitués des services sociaux et ceux qui les découvrent, les personnes pour lesquelles le RMI est synonyme de dégradation ou... de consolidation du lien social. Un point commun cependant, souligné par les enquêteurs : aucun n'identifie spontanément le « Point accueil solidarité »   (PAS) par lequel il est pourtant forcément passé pour rencontrer une assistante sociale.

Pour mailler finement le Territoire, le département a mis en place sept PAS. Selon l'étude, leur fonctionnement est très hétérogène d'un secteur à l'autre. Chacun fonctionne selon une « coutume » non écrite, sans fonction d'accueil véritable, pour un résultat « avant tout administratif ».

Des assistantes sociales mal informées

Les contrats d'insertion, majoritairement établis hors délais légaux, après une attente moyenne de cinq à sept mois, n'ouvrent pas d'accès à l'offre publique d'insertion. Ils contiennent en moyenne deux actions, parmi lesquelles peu «  d'offres précises et qualifiées » et beaucoup de vagues engagements à la « recherche d'emploi ».

L'étude souligne que les assistantes sociales connaissent mal les dispositifs d'insertion, que leur information n'est d'ailleurs pas organisée pour y pourvoir, que le lien avec l'ANPE est inexistant, et qu'elles « ne semblent pas elles-mêmes persuadées de l'utilité du contrat comme outil d'insertion » . Elles considèrent devoir « travailler d'abord sur les problèmes des personnes avant d'envisager une démarche vers l'emploi [...] comme si l'insertion sociale devait précéder l'insertion professionnelle ». D'où ces contrats d'insertion moins destinés à l'usager lui-même qu'à la commission locale d'insertion (CLI).

Les quatre CLI du département ne fonctionnent pas non plus correctement. Leur « gestion différenciée » n'assure pas « l'égalité de traitement devant le service public ». Le dossier d'un bénéficiaire passe en commission une ou trois fois l'an, selon qu'il réside à l'est ou au sud du Territoire. Avec un examen qui ne dépasse jamais cinq minutes, et qui se réfère plus au comportement de l'intéressé qu'aux possibilités offertes par un plan départemental d'insertion... inexistant.

Au total, les CLI travaillent « comme un tribunal », mais presque sans débats, « sans recueil de jurisprudence, sans minutes, sans témoin et surtout sans prévenu », constatent les évaluateurs.

Des pistes d'amélioration

Pour améliorer la « performance sociale » du dispositif, le rapport formule une série de préconisations, qui vont de l'organisation d'un véritable accueil dans les PAS à l'élargissement de la palette des interlocuteurs (intégrant plus rapidement l'emploi et l'orientation professionnelle), de la création d'une équipe technique en amont des CLI à la requalification de l'offre d'insertion, bref à la création d'un véritable service public social départemental.

Christian Proust, président du conseil général, qui a commandé cette évaluation et l'a rendue publique le 7 décembre, se félicite du « regard libre et critique » porté sur le dispositif : « c'était le but de l'évaluation, la condition de son efficacité ». Il se réjouit aussi du « bon accueil » réservé par les travailleurs sociaux à cette « recherche sincère ». Associés au comité de pilotage et au travail « en immersion » dans les PAS et les CLI, ceux-ci ont été informés des résultats et sont maintenant sollicités pour faire des propositions. Le conseil général travaille également avec ses partenaires, l'Etat notamment, pour aboutir à des décisions en mars ou avril 2001. Avec une certitude : « Il faudra faire une place plus grande à l'écoute, à l'accueil, à l'accompagnement individualisé. »   M.-J.M.

Notes

(1)   « Le RMI dans le Territoire de Belfort », disp. sur demande à catherine.grosjean@cg90.fr - Conseil général : place de la Révolution-Française - 90020 Belfort - Tél. 03 84 36 90 90.

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