« Choquées », « indignées » par l'arrêt de la Cour de cassation, rendu le 17 novembre, accordant une indemnité à Nicolas Perruche, né handicapé (1), une centaine de familles ont annoncé, le 1er décembre, qu'elles fondaient un « Collectif contre l'handiphobie » (2). « Nous avons vécu cet arrêt comme un regard extrêmement violent porté sur notre enfant, une remise en cause de sa dignité. Comment les parents oseront-ils accueillir la différence, demain ?Jusqu'où les médecins vont- ils se protéger des risques médico-légaux ? », demande son porte-parole, Xavier Mirabel, père d'un enfant trisomique. Ce dernier a assigné l'Etat pour « faute lourde du service de la justice » . Car selon lui, l'arrêt consacre un « principe de discrimination » à l'égard des handicapés et sous-entend « qu'il est préférable de mourir plutôt que de vivre handicapé ». Enfin, cette décision qui « érige l'avortement en devoir est parfaitement intolérable à ceux qui consacrent une partie de leur vie à accompagner leurs enfants souffrant d'un handicap » (3).
La question de la liberté des parents « Je comprends l'indignation des parents. Cet arrêt, en disant que leur enfant est une erreur médicale, remet en cause leurs efforts pour construire une vie la plus riche et la plus épanouissante possible pour leur enfant. Au contraire, il les incite à se battre pour rechercher un responsable et obtenir des indemnités », estime Chantal Lebatard, administrateur à l'Union nationale des associations familiales (UNAF) (4). Autre conséquence, les médecins, au lieu d'avouer leur incertitude quant au risque de handicap, risquent de se protéger en proposant un « diagnostic maximaliste ». « Le seuil de tolérance par rapport au handicap sera de moins en moins élevé », craint l'UNAF.
Celle-ci voit par ailleurs dans l'action en justice des parents Perruche, l'expression d'une inquiétude sur l'avenir de leur enfant après leur décès. Et de dénoncer un manque de solidarité collective, particulièrement en matière de prise en charge des handicapés adultes.
Bref, si la société « limite ainsi d'emblée son soutien et sa confiance aux parents », si les médecins ne « sont plus en mesure de les accompagner raisonnablement » et si cet arrêt induit « que dans un avenir indéterminé il pourra y avoir recherche de responsabilité du handicap », alors la liberté des parents de choisir en toute conscience s'ils accueillent ou non un enfant handicapé est remise en cause, déplore l'UNAF. A l'instar de l'Unapei (5), elle demande donc au Comité national consultatif d'éthique de rappeler ce droit fondamental, ainsi que les devoirs de respect de la dignité des personnes handicapées.
(1) Voir ASH n° 2190 du 24-11-00.
(2) Tél. 06 22 51 63 72.
(3) Voir également ce numéro.
(4) UNAF : 28, place Saint-Georges - 75009 Paris - Tél. 01 49 95 36 00.
(5) Voir ASH n° 2190 du 21-11-00.