Le projet de loi de solidarité et de renouvellement urbains (SRU) (1), dont l'examen aura donné lieu à de nombreuses passes d'armes entre le gouvernement et la droite sénatoriale, a été adopté définitivement par l'Assemblée nationale, le 21 novembre. Alliant pour la première fois, dans une même approche, les questions d'urbanisme, de logement et de transport, le texte a pour ambition de « rénover la politique urbaine », pour mettre un terme aux inégalités sociales entre territoires, marquées par l'existence de véritables « ghettos », selon les termes de Jean-Claude Gayssot, ministre de l'Equipement et du Logement.
Dans l'attente de sa publication au Journal officiel et sous réserve de la décision du Conseil constitutionnel qui devrait être saisi par l'opposition, voici les principales dispositions de la loi.
Rééquilibrer l'implantation du logement social
Mesure phare, l'article 25 impose aux villes de plus de 3 500 habitants (1 500 en Ile-de-France), dans les agglomérations de plus de 50 000 habitants, l'obligation de parvenir en 20 ans à 20 % de HLM sur leur territoire. Ce quota, déjà fixé par la loi d'orientation sur la ville du 13 juillet 1991 pour les communes situées dans une agglomération de plus de 200 000 habitants, n'avait pas été appliqué partout de façon satisfaisante. La nouvelle loi prévoit donc d'infliger aux communes ne remplissant pas leurs obligations une pénalité financière de l'ordre de 1 000 F par an par logement manquant par rapport à ce seuil. Cette contribution pourra être réclamée à partir de 2002 et sera versée, non à l'Etat, mais à la communauté d'agglomérations ou à la communauté urbaine dont la commune est membre. Par ailleurs, le texte donne aux préfets la possibilité, en cas de carence des communes, de se substituer aux maires pour faire appliquer la loi.
Les débats auront été très animés sur la question de la définition du logement social. La droite sénatoriale a ainsi souhaité élargir au maximum la liste des logements pouvant entrer dans le quota de 20 %. Elle aura notamment obtenu l'intégration des logements- foyers de personnes âgées et de personnes handicapées, des logements en accession sociale à la propriété (pendant les dix années suivant leur acquisition), ou encore de certains logements financés par un prêt locatif intermédiaire.
Notons, enfin, toute une batterie de mesures visant à garantir la pérennité du logement locatif social, à redéfinir les conditions d'intervention des organismes HLM dans le domaine de l'accession à la propriété ainsi qu'à adapter les modalités de création et de fonctionnement de ces derniers.
Lutter contre l'insalubrité et les copropriétés dégradées
Les députés ont introduit dans la loi la notion de « logement décent » qui impose au bailleur de mettre à la disposition du locataire un logement adapté à l'usage d'habitation. La sanction : la faculté pour celui-ci de demander au propriétaire la mise en conformité sans que la validité du bail puisse être contestée. De plus, toujours pour améliorer les droits des locataires et afin de faciliter le règlement amiable des conflits locatifs, le champ de compétence de la commission départementale de conciliation est étendu (2).
Par ailleurs, la nouvelle loi unifie et simplifie les procédures applicables pour lutter contre les logements insalubres ou dangereux. Désormais, elles pourront être déclenchées par le maire, sous l'autorité du préfet. Le texte renforce également le principe d'interdiction d'habiter et d'utiliser les lieux, met à la charge du propriétaire une obligation d'assurer le relogement des occupants de bonne foi et pose le principe de la suspension du paiement de loyer pendant la durée de validité de l'arrêté d'insalubrité ou de péril (3).
Dans le même ordre d'idées, un volet est consacré à la mise en place d'un nouveau dispositif pour prévenir et traiter les copropriétés en difficulté ou en voie de dégradation. Des mesures sont ainsi destinées à mieux informer et protéger les acquéreurs de logements anciens. Enfin, le champ d'intervention de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat ( ANAH ) est élargi.
Assurer une revitalisation économique des quartiers
De nouveaux outils sont instaurés afin de traduire les engagements pris par le gouvernement, durant le dernier comité interministériel des villes (CIV) du 14 décembre 1999 (4), en termes de développement économique des banlieues. Est notamment créé un Fonds de revitalisation économique auquel le budget 2001, en cours d'examen devant le Parlement, consacrera 375 millions de francs.
Toujours au chapitre de la politique de la ville, possibilité est offerte aux organismes d'habitations à loyer modéré de mettre des logements vacants à la disposition des associations qui assurent un travail de terrain dans les cités, moyennant le paiement des charges locatives correspondant auxdits locaux. De même, il est désormais inscrit dans la loi que les organismes HLM peuvent participer à des actions de développement à caractère social d'intérêt direct pour les habitants des quartiers difficiles.
(1) Voir ASH n° 2152 du 4-02-00.
(2) Une commission de conciliation n'intervient actuellement que sur les litiges concernant les hausses de loyer.
(3) Ces mesures de lutte contre les taudis s'inspirent en partie du rapport Bouché d'octobre 1998 - Voir ASH n° 2145 du 10-12-99.
(4) Voir ASH n° 2146 du 17-12-99.