Dans un rapport, remis le 9 novembre à Claude Bartolone, une équipe de chercheurs, coordonnée par Marie Choquet, directrice de recherche à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, présente une centaine de propositions pour « une prévention globale » des violences à l'adolescence. Désireux de sortir du « mécanisme victimaire » faisant des jeunes les boucs émissaires des difficultés ressenties par les adultes, le ministre délégué à la ville explique, en préface de l'ouvrage publié à cette occasion (1), avoir voulu apporter un éclairage nouveau sur la question en liant la violence et la souffrance des intéressés à partir d'approches différenciées : sociologique, psychopathologique, éducative et épidémiologique.
L'école peut être aussi « violente »
Catherine Blaya et Eric Debarbieux se sont notamment intéressés à « la fabrication sociale de la violence en milieu scolaire ». S'ils soulignent l'importance du rôle de l'école pour l'endiguer, ils rappellent que celle- ci peut parfois aussi être source de violence, d'agression contre ou entre les jeunes. « A variables sociodémographiques identiques, la victimation, les agressions, la dégradation du climat peuvent être extrêmement différentes selon les établissements, suivant en particulier la solidité des équipes adultes, le style de leadership de la direction, l'implication des habitants et des parents, la participation des élèves eux-mêmes », constatent notamment les chercheurs. Lesquels évoquent « l'effet-établissement » qui contribuerait à la « fabrication » non pas tant de « noyaux durs » d'élèves - formule qu'ils rejettent - mais d'une culture d'opposition à l'école. « Le sentiment de haine développé vis-à- vis de l'école n'est pas une simple résultante de la situation socio-économique et d'une sorte de “haine de classe” qui préexisterait à l'école. Il se construit dans des interactions quotidiennes », précisent les auteurs, expliquant comment l'équipe d'un établissement peut aussi offrir un terrain propice à la violence en « fabriquant » les classes et en favorisant les crispations.
Comment prévenir ?
Au final, le rapport, où figure une longue étude épidémiologique de Marie Choquet, ouvre sur une série de propositions. Lesquelles partent du postulat « que l'on peut intervenir sur l'enchaînement qui conduit de la souffrance à la violence ». Déjà mises en œuvre pour certaines par les acteurs de terrain ou par le gouvernement, ces orientations visent à renforcer la prévention au sein de la famille (par le développement en particulier des mesures éducatives en milieu ouvert) et de l'école, à intensifier les pratiques de médiation, la prévention précoce, le suivi des jeunes en grande difficulté et à améliorer la vie dans la ville. Des propositions défendues d'abord comme « un ensemble cohérent », « une forme d'engagement d'intellectuels » ouvrant au débat sur la mise en place « d'une nouvelle politique de prévention des souffrances et des violences ».
(1) Souffrances et violences à l'adolescence - Ed. ESF - 139 F.