La pérennisation des emplois-jeunes passe par leur professionnalisation et leur solvabilisation. Or, « ces deux conditions ne sont aujourd'hui pas réunies », déplore Alain Gournac, élu RPR des Yvelines, dans son rapport d'information dressé au nom de la commission des affaires sociales du Sénat et rendu public le 11 octobre.
En premier lieu, son bilan s'arrête sur les « résultats indéniables » du programme « nouveaux services-nouveaux emplois », eu égard au succès rencontré auprès des jeunes (252 600 embauches au 1er juin 2000), à la multiplicité des employeurs (le champ associatif étant le mieux représenté), ainsi qu'à la grande diversité des activités, principalement exercées dans les secteurs de la solidarité, de la famille et de la santé. Dans le même esprit, Alain Gournac note que la plupart des jeunes auditionnés se sont déclarés dans l'ensemble satisfaits, notamment de la nature des missions accomplies. Le programme est considéré, par ailleurs, comme un moyen de « mettre le pied à l'étrier des jeunes », en particulier pour ceux qui rencontrent de fortes difficultés ou qui, comme les jeunes des quartiers difficiles, peuvent se heurter à des phénomènes de discrimination à l'embauche. Toujours au chapitre des effets positifs, une trentaine de nouveaux métiers susceptibles d'être intégrés dans les conventions collectives auraient ainsi été identifiés, notamment dans le domaine de la médiation sociale.
Pour autant, nombre de difficultés sont pointées : formations « difficiles d'accès » et « inadaptées » aux besoins des jeunes ou des entreprises, « flou persistant » du cadre juridique qui est mal connu, « effets pervers pour l'économie » liés à l'existence, parfois avérée, d'une concurrence déloyale vis-à-vis du secteur privé. Autre critique : les activités déployées dans le cadre du dispositif seraient parfois en contradiction avec la loi, certaines se résumant à de simples « coquilles vides », d'autres ne correspondant pas à des « besoins émergents ou non satisfaits ». En outre, il n'y aurait aucun contrôle ni a priori (au moment de la signature de la convention), ni a posteriori (absence de réelle vérification des activités).
Les jeunes commenceront à quitter massivement le dispositif à partir de 2002. Aussi Alain Gournac invite-il le gouvernement à préparer « dès à présent » cette sortie. Avec une difficulté, la nécessaire conciliation de trois exigences prioritaires et en partie contradictoires : « assurer l'avenir professionnel des jeunes au-delà de la fin de leur contrat, soutenir les activités émergentes ayant fait la preuve de leur utilité sociale, maîtriser la charge budgétaire ». Parmi les pistes à explorer : la mise en place de « passerelles permettant aux emplois- jeunes de s'insérer durablement dans le secteur marchand en valorisant leur expérience acquise ». A ce titre, le sénateur suggère de revoir le fonctionnement des plates-formes régionales de professionnalisation pour mieux associer les entreprises. Il préconise également d'étendre la démarche de contractualisation avec les entreprises, initiée par l'Education nationale. La promotion du multisalariat en temps partagé, l'incitation à la création d'activité par les jeunes, ou encore l'étude d'un système de « prime » dégressive à l'embauche des emplois-jeunes par les entreprises sont aussi avancées.
En conclusion, le rapport s'interroge sur l'opportunité ou non de réviser le dispositif. Il estime qu'il apparaît d'ores et déjà envisageable de diminuer l'aide forfaitaire pour les conventions d'emplois-jeunes signées à partir du 1er janvier 2001. Et en tout état de cause, il trouve difficile d'envisager le maintien du dispositif en l'état au-delà de 2002, en raison de son coût « qui n'apparaît plus justifié » avec l'amélioration de la conjoncture. La solution pourrait ainsi être, soit d'abroger dans deux ans le dispositif si la situation de l'emploi des jeunes continue de s'améliorer, soit de cibler le dispositif sur les publics les plus en difficulté.